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Société

Affaire Zemmour : « La stigmatisation d'une communauté ne saurait être une opinion, c'est un délit »

Interview de Chems-eddine Hafiz

Rédigé par | Samedi 19 Février 2011 à 02:38

           

Ses propos sur les Noirs et les Arabes avaient choqué la France. Condamné pour provocation à la haine raciale, Eric Zemmour a écopé, vendredi 18 février, de 2 000 € d'amende avec sursis. Auteur du livre « De quoi Zemmour est devenu le nom »*, dans lequel est dressé un portrait au vitriol du chroniqueur, Chems-eddine Hafiz, avocat et vice-président du Conseil français du culte musulman (CFCM), s'est dit « satisfait » du jugement et réserve ses premières réactions sur cette affaire pour Saphirnews.




Saphirnews : Comment réagissez-vous à la condamnation d'Eric Zemmour par le tribunal correctionnel de Paris, ce vendredi 18 février ?

Chems-eddine Hafiz : Satisfait, puisque justice a été faite. Les juges de la 17e chambre du tribunal correctionnel de Paris, qui viennent de condamner Eric Zemmour pour incitation et provocation à la discrimination raciale, ont rappelé la norme juridique qui est conforme à l’esprit républicain.
En France, on ne peut pas impunément stigmatiser un groupe humain en fonction de sa race ou de son appartenance.

Eric Zemmou a été condamné à 2 000 € d'amende avec sursis. Est-ce ce que vous aviez espéré ? Estimez-vous qu'il devait écoper d'une plus lourde peine ?

Ch.-e. H. : La sanction d’Eric Zemmour est symbolique, l’essentiel est que ces juges ont reconnu sa culpabilité. Je suis un homme mesuré et vois que cette condamnation a des vertus pédagogiques.
En revanche, je déplore les réactions hystériques de certains responsables politiques, venus au secours du polémiste, en critiquant sans vergogne une décision de justice. C’est lamentable !

M. Zemmour s'est souvent rangé derrière l'argument de la liberté d'expression pour justifier ses propos. Que lui répondez-vous ?

Ch.-e. H. : Ce n’est pas fort heureusement Eric Zemmour qui a la charge de délimiter les contours de la liberté d’expression. Il s’agit d’une liberté fondamentale consacrée et protégée par de nombreux textes, nationaux et internationaux, qui connaît des restrictions fixées par la loi, nécessaires au respect des droits et de la réputation d'autrui.
Eric Zemmour a violé cette disposition. Il est donc juste qu’il en supporte les conséquences légales.
Par ailleurs, le tribunal de Paris a rappelé un principe de droit essentiel : la stigmatisation d'une communauté ne saurait être considérée comme une opinion, mais comme un délit et une atteinte aux principes républicains.

Comment jugez-vous la montée de l'extrême droite et la récupération du thème de l'islam et de l'immigration par une partie de la classe politique ? Le racisme est-il en phase d'être banalisé, selon vous ?

Ch.-e. H. : Marine Le Pen va donner un coup d’accélérateur aux actes racistes et xénophobes. Elle a déjà donné le ton en pointant du doigt l’islam.
Durant le débat récent sur l’identité nationale animé par Eric Besson, nous avons pu constater l’instrumentalisation de deux thèmes : immigration et islam. La campagne présidentielle va être l’occasion pour certains responsables politiques, espérant capter un certain électorat, de céder à la stigmatisation des musulmans de France qui sont devenus le bouc émissaire de tous les maux.
C’est aux musulmans et à eux seuls de se défendre, en refusant cette posture et en faisant part haut et fort de leur ras-le-bol.



* Chems-eddine Hafiz, De quoi Zemmour est devenu le nom (Ed. du Moment, 2010).





Rédactrice en chef de Saphirnews En savoir plus sur cet auteur



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