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Finance éthique

La finance islamique fait ses premiers pas en Tunisie

Rédigé par | Lundi 2 Juillet 2012 à 00:00

           

La finance islamique commence doucement à démarrer en Tunisie. L’École supérieure des sciences économiques et commerciales de Tunis (ESSECT) s’est décidée à se lancer dans l’aventure et à se saisir d’une opportunité jusque-là non saisie, en proposant, pour la rentrée de septembre 2012, un master professionnel en finance islamique, la première du genre en Tunisie. Le Conseil français de la finance islamique (COFFIS) s’y est associé pour aider la nouvelle Tunisie à se positionner dans ce secteur porteur. Lamia Bouattour, de l'ESSECT, nous explique les tenants et les aboutissants de ce diplôme.



Une première en Tunisie. Un master professionnel spécialisé en finance islamique est lancé par l'École Supérieure des Sciences Economiques et Commerciales de Tunis (ESSECT)  pour la rentrée 2012-2013.
Une première en Tunisie. Un master professionnel spécialisé en finance islamique est lancé par l'École Supérieure des Sciences Economiques et Commerciales de Tunis (ESSECT) pour la rentrée 2012-2013.
Comme dans la plupart des pays d’Afrique du Nord, pays pourtant musulmans, la finance islamique reste très peu développée en Tunisie. Mais ce n’est pas le potentiel qui manque et l’engouement pour ce système ne va pas tarder à porter ses fruits dans cet Etat dirigé depuis les élections de l’Assemblée constituante, en octobre 2011, par Ennahdha.

Pour réussir à développer la finance islamique, encore faut-il des formations académiques adéquates, inexistantes à ce jour. Face à cette cruelle absence, l’École supérieure des sciences économiques et commerciales de Tunis (ESSECT) a annoncé, mercredi 27 juin, son intention de former, dès la rentrée de septembre, les premiers cadres désireux d’obtenir un diplôme spécialisé en finance islamique dans le cadre d’un master professionnel.

Une première en Tunisie labellisée par le COFFIS

Ce cursus de deux ans, répondant du nom d'« Exécutive MBA en finance islamique », est la première du genre du Tunisie. « Il n'existe actuellement aucune autre formation de ce type, à l'exception de celle qui a été lancée par l'Université Zitouna (attachée à la mosquée à Tunis qui porte le même nom, ndlr), plutôt axée sur le côté "chariatique" et juridique que sur l'aspect pratique de la finance », nous confirme Lamia Bouattour.

Pour ne rien rater de ses objectifs, l’ESSECT s’est associée avec le Conseil et assistance en finance islamique (CAFI), le Conseil général des banques et institutions financières islamiques (CIBAFI) ainsi que le Conseil français de la finance islamique (COFFIS), présidé par Mohamed Nouri.

« Le CAFI, partenaire de l'ESSECT, a pu bénéficier de l'expérience et du savoir-faire du COFFIS en matière de formation et de contact avec les formateurs expérimentés dans le domaine de la finance islamique. Il est venu soutenir la mise en place de la finance islamique en Tunisie, lui permettant de se positionner dans ce secteur à travers la multiplication des formations », nous explique-t-elle.

Une formation qui se veut prestigieuse

Preuve de l’implication du COFFIS dans ce master, une bonne partie des enseignants sont membres du cabinet. M. Nouri lui-même dispensera des cours aux côtés, notamment, d'Ibrahim Zeyyad Cekici, ex-coresponsable du DU Finance islamique à l'Ecole de Mmanagement de Strasbourg, des membres haut placés de la banque Zitouna, de la Banque islamique du développement (BID) ou encore de l'Organisation de comptabilité et d'audit pour les institutions financières islamiques (AAOIFI).

La formation sera ainsi assurée par une équipe composée essentiellement de professeurs de renom et de professionnels de la finance islamique reconnus à l’échelle internationale, « tous venus soutenir la mise en place de la finance islamique en Tunisie, lui permettant de se positionner dans ce secteur », selon l’ESSECT. « Le programme se compose de modules de formation de haut niveau conformes aux standards internationaux », fait savoir Mme Bouattour.

Des cadres triés sur le volet et au portefeuille garni

Le master est destiné aux cadres (en activité) titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur (licence ou master) qui ont une expérience professionnelle d'au minimum trois ans et des prérequis dans le domaine de la finance. Les cours étant dispensés en français, anglais ou arabe, les étudiants devront également savoir maîtriser les trois langues. « Nous avons prévu de former un groupe de 25 étudiants au maximum, afin de garantir un enseignement de qualité. En cas de besoin, un autre groupe pourrait être constitué », nous déclare-t-elle.

Pour ceux et celles qui désirent suivre de cursus, il n’en coûtera pas moins de 15 000 dinars par étudiant pour les deux ans d’études couvrant toutes les charges liées à l’enseignement. Pour la porte-parole, « ce que nous offrons aux participants est une formation de qualité où des experts internationaux, chacun dans son domaine, viendront apporter leur savoir faire et leur expérience afin d'acquérir les connaissances requises dans le domaine de la finance islamique. Une bonne partie des coûts de la formation est justifiée par la rémunération de ces experts. » Les étudiants pourront toujours travailler en parallèle, puisque les cours sont donnés en cours du soir et en fin de semaine. Il n'empêche que la formation n'est clairement pas offerte à tous.

L’Etat benaliste, principal frein au développement de la finance islamique

Le diplôme leur permettra, selon l’école, d’occuper des postes à responsabilité dans des institutions financières islamiques. « Durant les cinq prochaines années, la Tunisie aura besoin de 30 000 cadres spécialisés en finance islamique », a indiqué M. Nouri lors de la conférence de presse, faisant valoir que le pays n’a pu répondre qu’à 10 % de ces besoins en la matière à ce jour.

« Les parts d'actifs conformes à la charia dans le total des actifs bancaire en Tunisie ne s’élève qu’à 1,2 % », constate aussi Mme Bouattour, pour qui l’une des principales raisons à l'inexistence de la finance islamique en Tunisie sous la présidence de Ben Ali était « le manque de soutien de l’Etat. En effet, en absence de loi bancaire islamique complète, les institutions financières islamiques ne peuvent pas exercer correctement leurs activités ».

Vers l’intégration d’un système financier mixte ?

Même les pays européens, à l’instar de la France et de la Grande-Bretagne, sont plus avancés en la matière. « Les choses sont en train de changer, un groupe d'experts est en train de travailler sur la nouvelle législation, en essayant de s'inspirer des expériences de plusieurs pays et en essayant de tirer des leçons de leurs erreurs. Toutes les institutions financières classiques s'intéressent à la finance islamique et la règlementation va vers l'ouverture d'"islamic windows "(fenêtres islamiques) par les banques conventionnelles », affirme Mme Bouattour.

Le système financier conventionnel fait et fera encore largement loi en Tunisie, mais la finance islamique, qui a prouvé son efficacité face à la crise financière mondiale, ne devrait pas manquer de se faire une belle place dans les années à venir. Aux intéressés, ils peuvent s’inscrire à la formation de l’ESSECT d’ici au 31 juillet.




Rédactrice en chef de Saphirnews En savoir plus sur cet auteur



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