
Quand la Grande Mosquée de Paris avait publiquement annoncé, en décembre 2022, disposer d’un mandat exclusif, délivré par les autorités algériennes, pour « certifier la licéité halal des produits consommables et non consommables exportés vers l’Algérie », personne ne s’en était offusqué dans la classe politique française. La politique, c’est aussi l’art de savoir ouvrir et fermer les yeux sur ce qu’on veut, quand on veut, au moment qui semble pour les uns ou les autres le plus opportun... Alors tant que les relations entre la France et l'Algérie étaient stables, personne ne pipait mot.
Or depuis quelques mois, rien ne va plus. Une grave crise diplomatique secoue Paris et Alger avec, en toile de fond, le soutien appuyé par Emmanuel Macron en 2024 de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental. Un affront pour le régime algérien, qui épouse depuis des décennies les revendications indépendantistes du Front Polisario. « On a atteint avec l'Algérie un seuil extrêmement inquiétant », a déclaré le 10 janvier le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau. Et la GMP, dont les liens de proximité avec l’Algérie n’ont jamais été un secret pour personne (au point où Chems-Eddine Hafiz a organisé en France une campagne de soutien à la reconduction au pouvoir d’Abdelmadjid Tebboune, réélu en septembre 2024), est devenue une cible de choix pour ses détracteurs. La détention depuis mi-novembre dernier de l’écrivain Boualem Sansal, accusé par le régime algérien d’avoir commis des « actes visant la sûreté de l’État », a envenimé des relations déjà houleuses. Le chef de l’Etat français avait alors estimé début janvier que l’Algérie est entrée « dans une histoire qui la déshonore », provoquant encore les foudres d’Alger.
Or depuis quelques mois, rien ne va plus. Une grave crise diplomatique secoue Paris et Alger avec, en toile de fond, le soutien appuyé par Emmanuel Macron en 2024 de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental. Un affront pour le régime algérien, qui épouse depuis des décennies les revendications indépendantistes du Front Polisario. « On a atteint avec l'Algérie un seuil extrêmement inquiétant », a déclaré le 10 janvier le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau. Et la GMP, dont les liens de proximité avec l’Algérie n’ont jamais été un secret pour personne (au point où Chems-Eddine Hafiz a organisé en France une campagne de soutien à la reconduction au pouvoir d’Abdelmadjid Tebboune, réélu en septembre 2024), est devenue une cible de choix pour ses détracteurs. La détention depuis mi-novembre dernier de l’écrivain Boualem Sansal, accusé par le régime algérien d’avoir commis des « actes visant la sûreté de l’État », a envenimé des relations déjà houleuses. Le chef de l’Etat français avait alors estimé début janvier que l’Algérie est entrée « dans une histoire qui la déshonore », provoquant encore les foudres d’Alger.
Un monopole au fonctionnement qui interroge
L’on parle aujourd’hui de révélations sur un « juteux système financier » mis en place par le recteur de la GMP grâce au mandat exclusif avec Alger, ce qui a notamment poussé l’eurodéputé (LR) François-Xavier Bellamy à saisir « la Commission européenne, chargée du fonctionnement du marché intérieur » pour mettre fin « sans délai » au système de certification halal auquel sont soumises les entreprises européennes désireuses d’exporter vers l’Algérie.
Le système interroge bien évidemment, il va sans dire. Pour la GMP, accusée d’être devenu un « bureau des douanes » pour Alger, il sert au fonctionnement du culte musulman en France, dans un contexte où l’exécutif n’a eu de cesse ces dernières années de mettre la pression sur les lieux de culte musulmans pour qu’ils trouvent des sources de financement autres que ceux provenant de pays étrangers. Néanmoins, et alors que l’activité rapporte des millions d’euros dans les caisses de la GMP, à raison de 0,02 € à 0,10 € par kilo selon les produits – pas moins de cinq millions selon L’Opinion –, le défaut présumé de transparence fait polémique. La société qui se charge de la certification ne compte que trois salariés, « des personnels administratifs, pas de contrôleurs », avec Chems-Eddine Hafiz à sa tête. S'il n’est pas rendu clair jusqu’à présent sur la façon dont la manne financière est précisément gérée, le recteur dément tout enrichissement personnel, martelant que son institution religieuse « opère en parfaite conformité avec les droits français, algérien et européen, y compris en matière de droits de la concurrence ».
En outre donc, la GMP est accusée de ne pas réaliser un travail de contrôle sérieux sur les produits exportables concernés. « Grâce aux témoignages collectés auprès des industriels », la certification halal ne serait finalement qu’« un simple coup de tampon, un jeu d'écritures qui permet de certifier des produits bien au-delà, d’ailleurs, de ce qui nous viendrait spontanément à l’esprit en pensant au halal », selon L’Opinion, qui cite, entre autres produits, « des yaourts, des produits laitiers, des biscuits, du chocolat, de l’huile ». Rappelons, à toutes fins utiles, que le caractère halal des produits, au-delà des produits carnés, se mesure aussi à l’absence d’alcool ou encore de tout ingrédient non licite selon des normes religieuses bien définies et qui dépendent des écoles juridiques.
Le système interroge bien évidemment, il va sans dire. Pour la GMP, accusée d’être devenu un « bureau des douanes » pour Alger, il sert au fonctionnement du culte musulman en France, dans un contexte où l’exécutif n’a eu de cesse ces dernières années de mettre la pression sur les lieux de culte musulmans pour qu’ils trouvent des sources de financement autres que ceux provenant de pays étrangers. Néanmoins, et alors que l’activité rapporte des millions d’euros dans les caisses de la GMP, à raison de 0,02 € à 0,10 € par kilo selon les produits – pas moins de cinq millions selon L’Opinion –, le défaut présumé de transparence fait polémique. La société qui se charge de la certification ne compte que trois salariés, « des personnels administratifs, pas de contrôleurs », avec Chems-Eddine Hafiz à sa tête. S'il n’est pas rendu clair jusqu’à présent sur la façon dont la manne financière est précisément gérée, le recteur dément tout enrichissement personnel, martelant que son institution religieuse « opère en parfaite conformité avec les droits français, algérien et européen, y compris en matière de droits de la concurrence ».
En outre donc, la GMP est accusée de ne pas réaliser un travail de contrôle sérieux sur les produits exportables concernés. « Grâce aux témoignages collectés auprès des industriels », la certification halal ne serait finalement qu’« un simple coup de tampon, un jeu d'écritures qui permet de certifier des produits bien au-delà, d’ailleurs, de ce qui nous viendrait spontanément à l’esprit en pensant au halal », selon L’Opinion, qui cite, entre autres produits, « des yaourts, des produits laitiers, des biscuits, du chocolat, de l’huile ». Rappelons, à toutes fins utiles, que le caractère halal des produits, au-delà des produits carnés, se mesure aussi à l’absence d’alcool ou encore de tout ingrédient non licite selon des normes religieuses bien définies et qui dépendent des écoles juridiques.
La GMP contre-attaque face à une campagne « sans précédent »
Les contrôles ne sont donc pas inutiles dans l’absolu… dans la mesure où elles sont bien réalisées, ce qu’assure faire la GMP qui a dénoncé, jeudi 23 janvier, « une cabale scandaleuse et infondée » à son encontre. Son recteur s’est offusqué des attaques « extrêmement virulentes, totalement mensongères » provenant « des détracteurs et des convoiteurs habituels, des procureurs de l’ombre et des milieux hostiles à l’apaisement des relations entre la France et l’Algérie ».
« La société commerciale créée pour gérer cette certification ne possède qu’un seul actionnaire : l’association Société des Habous et des Lieux Saints de l’Islam, fondatrice, propriétaire et gestionnaire de la Grande Mosquée de Paris, et le directeur général (Mohammed Louanoughi, ndlr) et moi-même ne sommes que des représentants physiques de cette entité morale », a affirmé alors Chems-Eddine Hafiz. Et d’ajouter que « les contrôles sur le terrain, la délivrance des certificats et le suivi comptable sont solides : tout est tracé, maîtrisé, déclaré. L’ensemble des dividendes sert à financer l’exercice du culte musulman, comme les statuts de la nouvelle société commerciale le prévoient Les fonds générés devraient être considérés comme une aubaine pour le culte musulman en France, qui a tant de mal à se financer ».
« La Grande Mosquée de Paris a traversé bien des tempêtes, et des pires encore. (…) Ce qui est en jeu, vous le savez, est une part de son histoire : l’Algérie. J’ai toujours dit, à qui veut le comprendre, mon souhait (…) d’ériger des passerelles vertueuses entre la France et l’Algérie. Quel mal peut-on voir dans cette intention ? Quelle contradiction ? Aucune. (…) Personne ne pourra prendre à défaut l’engagement républicain de la Grande Mosquée de Paris, son attachement aux valeurs de notre société, son désir de voir nos concitoyens musulmans épanouis en France », a-t-il signifié.
Lire aussi : N'en déplaise à certains, nous sommes les enfants de la République : Chems-Eddine Hafiz remet des points sur les i
Avant que l’affaire de la certification halal ne prenne la proportion actuelle, des critiques avaient été émises par Valdis Dombrovskis, commissaire européen au Commerce, en septembre 2024, quant à la décision algérienne de se servir de la GMP comme de son vaisseau amiral pour permettre ou non l’entrée des produits sur le sol algérien. Il craignait alors une « entrave pour le commerce avec l’UE de manière significative », ce qui avait poussé la GMP à fait valoir son « étonnement » et son « incompréhension » par voie de communiqué.
« Le 26 février 2024, une réunion s’est tenue à Alger sous la présidence du secrétaire général du ministère algérien du Commerce, en présence de plusieurs conseillers ministériels ainsi que des conseillers économiques des ambassades des États membres de l’Union européenne en Algérie. Cette réunion très importante, durant laquelle aucune réserve n’a été formulée, a montré la convergence d’opinion entre les différentes parties », a raconté le recteur Chems-Eddine Hafiz. « Par conséquent, la Grande Mosquée de Paris conteste pleinement les déclarations de Monsieur le commissaire européen au Commerce, et souhaite continuer à échanger de manière constructive et transparente avec la Commission européenne. »
Depuis, une réunion avec les représentants de la Commission européenne a eu lieu en décembre 2024 sur les prix, les délais de certification et la réalité des contrôles, relaye L'Opinion, qui rapporte également qu'une procédure de règlement des différends a été engagée par l'organe exécutif de l'UE à la demande de la direction générale du Trésor en France. L'affaire risque de connaître bien des épisodes plus ou moins tumultueux en 2025.
Lire aussi :
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Depuis, une réunion avec les représentants de la Commission européenne a eu lieu en décembre 2024 sur les prix, les délais de certification et la réalité des contrôles, relaye L'Opinion, qui rapporte également qu'une procédure de règlement des différends a été engagée par l'organe exécutif de l'UE à la demande de la direction générale du Trésor en France. L'affaire risque de connaître bien des épisodes plus ou moins tumultueux en 2025.
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