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Société

Don d’organes : pourquoi les familles sont appelées à se positionner dès le 1er janvier 2017

Rédigé par Imane Youssfi | Vendredi 30 Décembre 2016 à 12:05

           

Les besoins en termes de don d’organes ont doublé en France cette dernière décennie. Dans un milieu où l’offre reste encore largement inférieure à la demande, le gouvernement s’est alors décidé à amender la loi relative au don d'organes et de tissus post-mortem. Le changement, qui entre en vigueur le 1er janvier 2017, devra pousser les foyers à se positionner sur cette question sensible. Une mise au point s’impose.



Don d’organes : pourquoi les familles sont appelées à se positionner dès le 1er janvier 2017
En France, seulement 7 % de la population connaît la législation relative au don d’organes. C’est peu, d’autant qu’un nouvel amendement a été introduit à la loi Cavaillet de 1976. La loi stipule aujourd'hui que tout Français est un donneur d’organes et de tissus présumé sauf si un refus a été exprimé. A partir de janvier 2017, la loi précise et durcit les modalités de refus ainsi que le rôle des proches. En d’autres termes, si le refus n’a pas été explicitement exprimé par écrit par le défunt de son vivant, les médecins pourront procéder à un prélèvement d'organes. Les proches pourront s’opposer à cette décision à condition de prouver explicitement que le défunt s’opposait à un don.

Pour informer et sensibiliser la population, l’Agence de la biomédecine a lancé une campagne de communication du 19 novembre au 4 décembre 2016. Affiches dans la presse écrite, spots dans les radios nationales et locales et le Web afin de cibler les 15-25 ans avec une vidéo. Le message est clair et direct : « Nous sommes tous des donneurs, sauf si nous faisons savoir que nous ne voulons pas être donneur. »

Désormais, un autre moyen s’ajoute au simple courrier à envoyer à l’Agence de la biomédecine pour exprimer son refus. Il suffit de remplir un simple formulaire en ligne au registre national du refus.

La personne pourra préciser quel organe elle souhaite ou non donner après sa mort. L’inscription sur le registre n’est pas définitive et peut être modifiée à tout moment. « Il sera demandé de retranscrire par écrit les circonstances précises de l’expression de ce refus et au proche qui l’a fait connaître de signer cette retranscription », précise l’Agence de la biomédecine.

Affiches de l'Agence de biomédecine dans le cadre de la campagne nationale sur le don d'organes.
Affiches de l'Agence de biomédecine dans le cadre de la campagne nationale sur le don d'organes.

Plus de 21 000 patients en attente de greffe en 2015

Les besoins en termes de greffe augmentent chaque année. Le nombre de demandeurs a presque doublé en dix ans dans l’Hexagone : ils étaient 12 474 en 2006 et sont passés à 21 464 en 2015. Même si les donneurs sont plus nombreux, il reste toujours insuffisants par rapport à la demande. En 2015, 533 patients sont morts alors qu’ils attendaient une greffe. La modification de la loi Cavaillet permettrait de mieux gérer les refus et les dons et, espère l'Agence de biomédecine, d’augmenter les greffes.

Cette hausse de dons permettra alors de réduire les dépenses de santé. C’est le cas de la prise en charge de l'insuffisance rénale chronique terminale (IRTC). Les coûts atteindraient les 5 milliards d'euros d'ici à 2025 avec le vieillissement de la population. Le rein étant l’organe le plus demandé (près de 16 000 patients en attente en 2015), le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie préconisait en novembre 2016 d’encourager les dons d’organes. Moins coûteux, il assurerait une espérance de vie plus longue pour les personnes atteintes d’IRTC. « Par rapport à la dialyse, la transplantation rénale est associée à de meilleurs résultats en termes de durée de vie et de qualité de vie pour un moindre coût », explique l’institution.

Seul problème, près de 32,5 % de personnes, des proches du défunt, ont exprimé leur refus de dons l’an dernier, parfois sans connaître réellement le souhait de la personne décédée. A partir de janvier 2017, ils pourront toujours s’y opposer uniquement s’ils ont la certitude du refus du défunt.

Réticence du personnel hospitalier

Le nouvel amendement met mal à l’aise le personnel en milieu hospitalier. « Les familles arrivent dans nos services dans des circonstances dramatiques. Elles sont parfois là durant des jours et des jours. Pour un accident cérébral, par exemple. Il y a d’abord un déni de la famille. Si les proches se sont positionnés sur le "non", cela me paraît difficile de leur demander de l’écrire », raconte Christine Marcoux, infirmière coordinatrice à l’hôpital Manchester de Charleville-Mézières (Ardennes), au site Infirmiers.com. Bruno Suan, également infirmier dans le même établissement, abonde dans son sens : « Allez faire écrire (à la famille) un refus comme s’il s’agit d’une reconnaissance de dettes me met mal à l’aise. »

Comment le personnel médical pourra contrer le refus des proches, même si un refus n’a pas été signalé ? Prendront-ils les organes du défunt sans accord ? C’est en tout cas le nouveau sens de la loi Cavaillet. L’Ordre des médecins et la Fédération des associations pour le don d’organes et de tissus humains (ADOT) craignent d’affronter une « méfiance des familles » et, paradoxalement, une remise en cause de la volonté d’être donneur imputable au changement législatif. Celui-ci a cependant le mérite d’impulser le débat au sein des familles françaises appelées à se positionner clairement sur cette question.

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