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Cinéma, DVD

Avec 3000 Nuits, lumière sur le sort de femmes palestiniennes en prison

Rédigé par | Vendredi 13 Janvier 2017 à 08:00

           

Tourner une fiction autour des conditions de détention de Palestiniennes dans une prison israélienne, un challenge de taille réussi pour Mai Masri qui signe avec 3000 Nuits son premier long-métrage. Le film, à l’affiche dans les grands écrans français depuis mercredi 4 janvier, est une pépite cinématographique qui porte la voix de femmes palestiniennes que la prison change à jamais.



Layal, interprétée par Maisa Abd Elhadi, ici à l’image avec son fils né dans une prison en Israël © 3000 Nuits / JHR
Layal, interprétée par Maisa Abd Elhadi, ici à l’image avec son fils né dans une prison en Israël © 3000 Nuits / JHR
Mai Masri signe son premier long-métrage avec 3000 Nuits. Le film de la réalisatrice américano-palestinienne, résidant Beyrouth au Liban, nous plonge dans un quotidien pesant, celui d'une prison pour femmes en Israël dans laquelle sont détenues aussi bien des Palestiniennes que des Israéliennes, des prisonnières de droit commun contrairement à leurs co-détenues arabes. L’histoire, qui se déroule dans les années 1980, tourne autour de Layal, une jeune institutrice de Naplouse qui a eu la malchance de faire monter dans sa voiture un jeune Palestinien qui se trouve être recherché par l’armée d’occupation israélienne. Arrêtée, elle est suspectée d’avoir aidé l’auteur présumé d’un attentat qu’elle ne connaît pourtant pas, ce qui l’amène à être incarcérée arbitrairement pendant huit ans, soit 3000 nuits.

Apprenant en prison qu’elle est enceinte, Layal décide contre vents et marrées de garder l’enfant et donne naissance à un petit garçon derrière les barreaux. Un film qui explore les thèmes de la résistance et de l’espoir, même parcellaire, dont l’avenir se veut porteur pour les détenues à travers les joies que procure la naissance. C'est d'ailleurs Nour - « lumière » en arabe – que la jeune mère choisit comme prénom pour son fils, tout un symbole.

Ce film émouvant fait écho à une réalité : selon l'association de défense des prisonniers palestiniens Addameer, 7 000 Palestiniens dont 64 femmes et 400 mineurs sont aujourd’hui détenus dans les prisons israéliennes.

Un film bien accueilli du public

Le film, inspiré de « dizaines d’interviews menées auprès de femmes devenues mères en prison », a été tourné en Jordanie dans une prison désaffectée, racontait déjà Mai Masri lors d’une présentation en avant-première de 3000 Nuits, en mai 2016 à l’Institut du monde arabe (IMA), dans le cadre du Festival Ciné-Palestine, en présence du réalisateur Ken Loach qui en avait profité pour exprimer son soutien contre la censure du film opérée quelques semaines plus tôt en région parisienne.

En avril 2016, le film était à l’affiche d’un cinéma indépendant de la ville d’Argenteuil, dans le Val d’Oise. Mais le maire (LR) Georges Mothron avait exigé la déprogrammation de 3000 Nuits ainsi que celle du film La Sociologue et l’Ourson portant sur le mariage pour tous. Selon l’élu, « en ces temps troublés, des sujets tels que ceux-là peuvent rapidement mettre le feu aux poudres dans une ville comme Argenteuil. Dans un souci d’apaisement, (...) la ville a préféré jouer la sécurité en ne diffusant pas ces films, évitant ainsi des réactions éventuellement véhémentes de certains ». De cette interdiction a découlé un mouvement de protestation qui s’est achevé par un succès pour les organisateurs du festival puisque 3000 Nuits a finalement pu être projeté dans une MJC - pleine à craquer - de la ville.

3000 Nuits, qui a déjà fait le tour du monde, a été abondamment récompensé. Sa sortie officielle en France début 2017 a d'ailleurs été plutôt bien accueillie. S'il n'est cependant pas à l'affiche de toutes les salles, il est encore temps de le voir sans attendre.



Rédactrice en chef de Saphirnews En savoir plus sur cet auteur


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