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Société

Oubliés de la République : attendre et espérer ?

Mémoire vive

Rédigé par Leila Belghiti | Jeudi 21 Mai 2009 à 02:26

           

Seconde Guerre mondiale. 350 000 « indigènes » sont appelés au front. Venue remplir les rangs de la Résistance, la participation des troupes coloniales est un véritable secours pour la métropole. Tirailleurs, zouaves, spahis ou goumiers, ils occupèrent sur le front un rôle de premier plan. Des milliers y laissèrent leur vie.



Réalisé par Rachid Bouchareb en 2006, « Indigènes » a redonné une place dans la mémoire collective aux combattants issus des colonies françaises. Le film est diffusé ce jeudi 21 mai sur France 3.
Réalisé par Rachid Bouchareb en 2006, « Indigènes » a redonné une place dans la mémoire collective aux combattants issus des colonies françaises. Le film est diffusé ce jeudi 21 mai sur France 3.

Ils sont aujourd’hui 80 000 survivants. Plus de cinquante ans après la guerre, c’est un profond sentiment d’injustice qui les habite. Et pour cause, une inégalité de traitement frappante de la part du gouvernement : quand un ancien combattant français perçoit une pension de 600 euros par mois, un « indigène » sénégalais n’en touche que 160, contre 80 pour un Maghrébin.

« Le sang versé pour la patrie d’alors vaudrait-il plus cher selon que l’on est aujourd’hui Français, Marocain ou Sénégalais ? », s’interroge Alain Rousset, du collectif Les Oubliés de la République et député PS de la Gironde, dans un appel lancé au président de la République le 4 mai dernier.
Un appel soutenu par bien des personnalités, telles que l’ancien corédacteur de la Déclaration universelle des droits de l’homme Stéphane Hessel, l’ex-footballeur Lilian Thuram, ou encore les députés Élisabeth Guigou et Noël Mamère.

Discriminations

« Une discrimination que nous ne pouvons plus tolérer », déplore le collectif. « Malgré la bravoure dont ils ont fait preuve, ils (les combattants indigènes, ndlr) continuent à vivre ou plutôt à survivre dans l’ombre d’une histoire à laquelle ils ont pourtant contribué », poursuit le collectif.

Les Oubliés de la République, qui rassemble sous sa bannière plusieurs associations, a manifesté vendredi 8 mai, à Paris, pour demander réparation. Une proposition de loi réclamant une revalorisation des pensions des « indigènes » a été déposée au Parlement, par le député PS de la Gironde.

Politique de l’émotionnel : ça marche, mais pas assez

Tout le monde se souvient de la vive émotion qu’avait suscitée le film Indigènes, en 2006, de Rachid Bouchareb. La présidence même en fut touchée : Jacques Chirac promit une revalorisation de la pension des indigènes durant son mandat. Une promesse tenue, certes, mais très en deçà des réclamations.

En effet, cette réévaluation n’a concerné que les retraites et les pensions d’invalidité. La plus importante, la pension civile et militaire, n’a pour sa part nullement été revue à la hausse. Elle représenterait selon le collectif 500 millions d’euros, soit « le prix du bouclier fiscal voté en 2007 ».

Dans une interview accordée au JDD, Naïma Charai, vice-présidente PS de la Région Aquitaine, dénonce la passivité « cynique » du gouvernement sur la question : « Il faut savoir que d’ici à dix ans, en moyenne, le dernier "Indigène" aura expiré. » « Le gouvernement joue la montre, tout simplement... » Quant à savoir si la proposition de loi déposée par Alain Rousset verra une suite favorable, elle déclare ne pas y croire. « Mais, poursuit-elle, je l’espère. »

D’aucuns s’interrogent si un film Indigènes II serait une solution... Affaire à suivre.



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