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Religions

Meccaverse : avec l’expérience du hajj en VR, la question de la validité du pèlerinage posée

Rédigé par Emir Kaplan et Lina Farelli | Jeudi 7 Juillet 2022 à 18:00

           

Et si on pouvait visiter les Lieux saints de l’islam depuis chez soi ? L’Arabie Saoudite a récemment annoncé s’être lancée dans un projet de découverte virtuelle de La Mecque et de Médine. Une initiative qui permet d’approcher un tant soit peu l’expérience du hajj et de la omra mais qui oblige d'ores et déjà des théologiens à se positionner via des fatwas.



Qui eut crût que l’on pourrait un jour approcher les lieux les plus saints de l’islam en restant assis dans son canapé. Pourtant, le président général des Affaires des deux mosquées sacrées de La Mecque et de Médine, Abdurahman bin Abdulaziz Al-Sudais, a officiellement présenté le projet « Pierre noire virtuelle » en décembre 2021.

L’initiative, mise en place par l’Agence des expositions et des musées d’Arabie Saoudite, en collaboration avec l’Université saoudienne Oum Al-Qura, permet d’approcher la pierre noire, une roche située dans l’angle est de la Kaaba autour de laquelle tournent un million de pèlerins cette année 2022. C'est à la hauteur de cet objet – que les musulmans touchent, embrassent ou saluent en passant devant elle – que commencent et finissent chacun des sept tours de la circumambulation autour de la Kaaba.

Abdurahman bin Abdulaziz Al-Sudais, mondialement reconnu pour sa récitation du Coran, a notamment déclaré vouloir étendre ce projet de découverte virtuelle aux « mosquées de La Mecque et de Médine (qui) contiennent beaucoup de patrimoines historique et islamique ». De quoi avoir un bon aperçu du vécu d’un pèlerin sur place.

A l’assaut du Web 3.0

Le lancement d’un « Meccaverse » trouve une résonnance particulière dans un monde encore marqué par la pandémie de la Covid-19, qui a entrainé une série de restrictions de voyage à travers le monde. L’Arabie Saoudite avait elle-même dû suspendre le hajj et la omra en 2020 avant de l’ouvrir progressivement depuis l’année dernière.

Dans le même temps, l’engouement pour la technologie immersive ne se dément pas, au point où Facebook a décidé en 2021 de rebaptiser la maison mère de son entreprise Meta, en référence à l’univers virtuel du metavers dans lequel les personnes peuvent interagir entre eux grâce à des casques de réalité virtuelle. Le fondateur du réseau social Mark Zuckerberg avait annoncé son intention d’investir plusieurs milliards de dollars sur le projet sur plusieurs années et avait promis de créer 10 000 emplois en Europe, voyant en Meta une nouvelle structuration mieux à même de représenter ses activités dans le futur.

La France aussi investit dans ce domaine. La Défense, le quartier d’affaires le plus riche d’Europe, accueillera en octobre 2022 la première école dédiée aux métiers du metavers, le Metaverse College, une première mondiale.

Des théologiens réagissent

Une visite virtuelle à La Mecque depuis chez soi, casque aux yeux : l’initiative plaît nombre d’internautes. Sans remplacer l’expérience du voyage, le lancement d’un « Meccaverse » viendrait rendre accessible la Kaaba à tous, et notamment à ceux et celles qui ne peuvent effectuer ce pilier de l'islam en raison de moyens physiques et/ou financiers limités.

Peut-on pour autant valider l'accomplissement d'un pèlerinage en VR ? La question semble saugrenue mais elle a été posée et des conseils de théologiens se sont d’ores et déjà positionnés dessus. La présidence turque des Affaires religieuses (Diyanet) a ainsi déclaré que la visite virtuelle ne peut être considérée comme un « vrai hajj » car la présence physique sur les lieux saints est indispensable. « Les pieds des personnes doivent toucher le sol », prévient-on.

Le Conseil des oulémas d’Indonésie s’est lui aussi prononcé en ce sens, en précisant que le metavers dot servir non pas à se divertir mais à permettre aux utilisateurs de faire l’expérience de la simulation rituelle du pèlerinage. « L’effort de numérisation consistant à introduire la Kaaba dans le metavers profitera aux futurs pèlerins du hajj et de la omra pour en savoir plus sur les zones sacrées qu’ils visiteront avant le pèlerinage », a-t-il fait remarquer. Des sociétés y travaillent assurément.

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