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Points de vue

Le pétrole des pays du Golfe

Par Nabil Ennasri*

Rédigé par Nabil Ennasri | Mardi 4 Mai 2010 à 00:52

           


C'est la compagnie d'exploitation californienne Standard Oil qui fora le premier puits de pétrole en Arabie saoudite, en 1933. L'Arabie saoudite est maintenant le premier producteur mondial de pétrole, et détient les plus grosses réserves mondiales.
C'est la compagnie d'exploitation californienne Standard Oil qui fora le premier puits de pétrole en Arabie saoudite, en 1933. L'Arabie saoudite est maintenant le premier producteur mondial de pétrole, et détient les plus grosses réserves mondiales.
Arrêtons-nous aujourd’hui sur un sujet dont les dimensions mettent en jeu l’avenir de la planète. Nous allons parler du pétrole, matière première qui a ceci de particulier que l’ensemble de l’économie mondiale repose dessus…

Élément indispensable pour le fonctionnement de tous nos moyens de transport quotidiens, le pétrole est aussi une matière première pour des milliers d’objets usuels, des cosmétiques aux disques, en passant par les matériaux de construction et jusqu’aux médicaments. Sa présence n’a jamais été aussi massive et notre dépendance à son égard révèle chaque jour son caractère stratégique.

Ce pétrole joue un rôle si éminent dans l’économie mondiale, notamment aux États-Unis, que les dirigeants américains n’ont pas hésité par le passé à utiliser le glaive pour imposer leur vue. Il est vrai qu’avec à peine 5 % de la population de la planète mais une consommation qui équivaut presque au quart de la production mondiale, on comprend aisément comment un déficit dans l’approvisionnement de pétrole mettrait en péril la première économie du monde. Il faut donc s’assurer qu’un pétrole bon marché puisse continuellement couler à flots et, pour ce faire, on jettera aux oubliettes protocole de Kyoto, droits de l’homme et souveraineté des États. Et pour ceux qui ne seraient pas d’accord, l’invasion de l’Irak est encore là pour le leur rappeler…

Dans ces conditions, la région du Golfe demeure l’un des espaces géostratégiques qui suscitent le plus d’intérêt et de convoitises auprès des grandes puissances. Les réserves des différents pays de cette région représentent plus des deux tiers des réserves mondiales. Dans la compétition acharnée qui s’annonce entre les États-Unis et la Chine, l’omniprésence des premiers dans cet espace est un atout majeur, dont la sauvegarde est une priorité absolue pour toute administration américaine. Les monarchies du Golfe l’ont bien compris, elles dont l’histoire récente nous enseigne que leur évolution est due non pas seulement à des dynamiques internes, mais plutôt au rôle que joue leur pétrole dans l’économie étasunienne.

En dehors de cette souveraineté limitée, les pays du Golfe possèdent, du fait de leur rente, des moyens financiers considérables. Les recettes tirées de l’exploitation de leur pétrole génèrent des surplus qui alimentent à leur tour des fonds souverains, dont les montants donnent le vertige.

Le plus grand d’entre eux, l’Abu Dhabi Investment Authority (ADIA), gèrerait la coquette somme de 900 milliards de dollars US. Si on veut vendre des Rafales et autres centrales nucléaires, on sait vers qui se tourner. D’ailleurs, à part le Brésil, les seuls pays intéressés par ce joyau de l’industrie militaire française que presque aucun pays du monde ne veut acheter sont les Émirats arabes unis et le Koweït.

Pourtant, l’argent ne règle pas tout. Les pays du Golfe vont devoir faire face à des enjeux cruciaux qui pourraient mettre en péril l’équilibre de leur société. Un débat qui suscite bien des interrogations a récemment été lancé et illustre parfaitement cette problématique : quelle identité donner pour des sociétés dont parfois plus de 80 % des habitants sont des étrangers ?

Malgré la ségrégation institutionnalisée, condamnée par diverses associations de défense de droits comme Amnesty International, et dont – fait suffisamment rare dans cette région pour être souligné – certains médias comme la chaîne Al Jazeera ont largement fait écho, comment parvenir à une articulation qui ne bousculerait pas trop l’équilibre des sociétés transformées par plusieurs décennies de développement tous azimuts ? Pourtant, le roi Faysal d’Arabie Saoudite les avait prévenus : « En une génération, nous sommes passés du chameau à la Cadillac. Mais à voir notre façon de gaspiller l’argent aujourd’hui, je crains fort que la prochaine génération ne revienne au chameau… »


* Diplômé de l’Institut d’études politiques d’Aix-en-Provence, Nabil Ennasri étudie actuellement la théologie musulmane à l’Institut européen des sciences humaines de Château-Chinon (IESH) ; il est membre du Collectif des musulmans de France (CMF).






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