Connectez-vous S'inscrire

Points de vue

Le Mawlid pour renouveler son pacte avec le Prophète Muhammad

Rédigé par Participation et Spiritualités Musulmanes (PSM) | Vendredi 29 Septembre 2023 à 08:00

           


© CC BY-NC-SA 2.0
© CC BY-NC-SA 2.0
Renouveler notre pacte avec notre Messager est le souci capital de ce texte. Un pacte usé par l’écart creusé à travers le temps. La vision devient floue et fragmentée, et la relation terne et affaiblie.

Les textes s’interposent aujourd’hui entre les musulmans et la personne de cet auguste homme qu’est le Prophète Muhammad (paix et salut sur lui). Ces précieuses sources écrites sont propices et suffisantes pour nouer un lien rationnel qui consiste à référencer des sources et en tirer des déductions logiques. Une relation rationnelle, donc profane.

En réduisant l’islam à sa composante rationnelle, on retient de la personnalité du Prophète les signes intellectuellement perceptibles d’un leader surdoué, d’un homme dévoué et d’un militant déterminé. On parle alors d’un modèle islamique qui prône un engagement militant au service d’une idée qui aboutit à la solution. Le cœur et le spirituel, écartés dans ce genre de construction, restent un sous-entendu, un tabou, une affaire privée.

Le Mawlid, la Naissance, signifierait dans ce cas l’avènement d’une nouvelle philosophie mieux adaptée qui répond aux besoins d’une raison de plus en plus active, destinée à jouer un rôle inédit dans l’histoire de l’humanité.

Les liens du cœur

Ma relation avec le Messager, puisse Dieu le saluer, doit-elle être une relation essentiellement intellectuelle où j’apprécierais sa ligne de pensée et la littérature de ses récits ? Ou une relation communautaire puisque j’appartiens à sa grande communauté ? Ou une relation politique car j’adhère à une solution islamique qui opte pour la concertation comme principe de gouvernement ? Ou une relation juridique car je souhaite appliquer le droit musulman ?

Les premiers fidèles se sont joints au Prophète, car il fut la source de la guidée qui leur venait de Dieu ; il fut celui que Dieu leur envoya. Ils recherchaient Dieu. Muhammad était Son messager. Ils n’appliquaient pas des textes en l’absence d’un modèle, mais aimaient, suivaient et obéissaient à cet illustre être élu de Dieu envoyé comme miséricorde pour toute l’humanité de la part du Tout-Puissant et Compatissant.

Un homme rapporte qu'Aicha, l’épouse du Prophète, vint voir le Messager de Dieu et dit : « Tu es plus aimé de moi que ma famille et tous mes biens. Chez moi je me souviens de toi et je ne puis me retenir de venir et de te regarder. Mais j’ai pensé à ma mort et à ta mort et j’ai réalisé que lorsque tu rentreras au Paradis tu seras élevé en compagnie des prophètes et que si j’y entre, je ne pourrai plus te voir. » Dieu révéla alors : « Celui qui obéit à Dieu et Son Messager sera avec ceux comblés du bienfait de Dieu dont les prophètes, les véridiques, les martyrs et les pieux. Et quelle excellente compagnie ! » (Rapporté par Abou Bakr al-Haïthamî dans Majma’ az-zouâ-id)

Dois-je alors avoir une relation de cœur avec le Messager de Dieu ? Oui ! Et c’est l’amour d’abord.

Amour et joie du cœur

Aimer le Messager plus que tout, plus que soi est un signe du parachèvement de la foi. C’est ce qui fait goûter à la douceur de la foi. Quelle joie que de passer d’une « foi » que l’on récite à une foi que l’on goûte ! Pour cela, le cœur doit prendre sa place dans notre perception du Message et du Messager. Conjuguer le cœur et la raison. Le rationnel et le spirituel. Borgne sera notre perception si ne ressentant aucune joie dans nos cœurs suscitée par cet heureux événement, nous nous posons la question légitime : « Est-il permis de célébrer la naissance du Prophète ? »

Certains raisonnements abusifs, dissuasifs et totalitaires avancés et propagés tentent aujourd’hui d’étouffer, sous peine d’innovation conduisant en Enfer, toute manifestation de joie, pieuse ou non, liée à la naissance du messager de Dieu. S’il est compréhensible que certains fervents légalistes restent sur leur garde, il n’y a pas de raison d’étendre la phobie à toute la communauté.

Loin de diviniser le Messager, le libre cours à l’amour et au respect doit rester un fleuve qui irrigue les cœurs joyeux de la guidée de leur Seigneur.

Abou Lahab, l’oncle du Prophète promis à l’Enfer dans le Coran, bénéficie d’un allégement tous les lundis, jour de naissance de son neveu où il montra une telle joie qu’il affranchit la servante Thouwaïbah qui vint lui annoncer la nouvelle. Le Prophète célébrait le lundi, jour de sa naissance en le jeûnant. Il a célébré aussi le jour de salut de son frère, le Prophète Moïse, dixième jour du mois lunaire de Muharram, que la communauté juive de Médine célébrait aussi. S’appuyant sur ces arguments, des savants tels que Ibn Hajar al-Asqalani auteur de Fath al-Bari, As-Suyuti éminent savant du IXe siècle de l’Hégire, Abu Chamah maître de l’illustre Nawawi, As-Sakhawi et autres se sont prononcés sur la légitimité juridique de célébrer cette naissance par des actes pieux d’adoration et de bienfaisance.

Les compagnons, sachant que les actions seules ne pouvaient les élever au degré du Prophète bien-aimé pour l’accompagner au Paradis - nous, de même - étaient heureux de savoir que la voie de l’amour assurait cette précieuse compagnie. Un homme demanda au Prophète : « Quand l’heure ? » « Qu’as tu préparé pour elle, dit le Prophète ? » « Rien, dit l’homme, sauf que j’aime Dieu et Son messager. » Le Prophète de répondre : « Tu es avec celui que tu aimes. » En rapportant ce hadith, Anas le compagnon (que Dieu l’agrée) ajoute : « Nous n’avons jamais été autant heureux que lorsque le prophète a dit : "Tu es avec celui que tu aimes." Et moi j’aime le Prophète, Abou Bakr et Omar et j’espère être avec eux de par mon amour pour eux bien que je n’aie pas œuvré autant qu’eux. » (Hadith rapporté par Al-Boukhari et Muslim)

La naissance du Prophète est un geste d’attention particulier, de la part d’un Seigneur Patient et Indulgent, exprimé envers des humains qui ont oublié leur raison d’être, leur identité originale et leur prime nature. Les gens, distraits et insouciants, savent que la vie sur terre a une fin mais se laissent entraîner dans l’oubli, puis, interrogés par les anges dans la tombe, ils subissent la surprise, les remords.

Par ailleurs, la naissance du Prophète est une occasion pour l’élection divine parmi les humains. Les hommes et les femmes choisis par Dieu pour être compagnons de Son Prophète ne pouvaient pas l’être sans cette opportunité.

Pour nous aujourd’hui, plusieurs siècles plus tard, cette naissance n’est pas moins prometteuse, car l’élection divine se fera pour toujours. « Parmi ceux qui m’aiment le plus dans ma communauté, annonce le Prophète, il y a des gens qui viendront après moi. Pour me voir, ils seront prêts à abandonner leurs familles et leurs biens » (rapporté par Muslim selon Abou Houraïra). Ces gens sont dits frères du Prophète dans d’autres hadiths (rapportés notamment par At-Tabarani, Ahmad, Abou Ya’la), et ils rejoignent les compagnons dans l’agrément que Dieu leur accorde. Dieu dit : « Les précurseurs parmi les Immigrés et les Auxiliaires ainsi que ceux qui les ont suivis sur la voie de l’excellence sont agréés de Dieu et ils L’agréent. » (Coran : 9/100)

La prétention de l’amour du Prophète fleurit chez les paresseux et les pervers. Nous devons accomplir vis-à-vis du Prophète un pacte à double volet : aimer et suivre.

Les vrais fidèles aiment le Prophète, le suivent et lui obéissent. C’est le signe du vrai amour, car Dieu dit : « Dis, si vous aimez Dieu suivez-moi. Dieu vous aimera et vous pardonnera vos péchés. » (Coran : 3/31)

Renouveler son pacte

Renouveler notre pacte avec notre Messager est le souci capital de ce texte. Un pacte usé par l’écart creusé à travers le temps. Renouveler ce pacte mal nourri par la simple référence aux textes et l’alignement juridique bon gré mal gré sur les limites de Dieu, nécessite un modèle humain. Un avantage que les compagnons avaient en présence du Prophète.

Pour les fervents chercheurs de la foi, le Prophète annonce des rénovateurs pour la communauté tous les siècles et recommande à chacun selon un hadith rapporté par Ahmad et At-Tabarani, de renouveler sa foi par la bonne parole « Il n’y a de Dieu que Dieu ».

Louange à Dieu d’abord et à la fin, et que Ses salutations aillent vers le Prophète Muhammad, sa famille, ses compagnons et ses frères.

*****
Première parution sur le site de Participation et Spiritualité Musulmanes (PSM).

Lire aussi :
L’institution du Mawlid et la louange du Prophète Muhammad par ses noms
Mawlid – La Burda, pour l’amour du Prophète Muhammad
Un Mawlid à l’heure turque à Paris, le Diyanet et Maher Zain au rendez-vous
Réponse à ceux et celles qui disent que Mawlid est une innovation blâmable, bid’a




SOUTENEZ UNE PRESSE INDÉPENDANTE PAR UN DON DÉFISCALISÉ !