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Religions

L'adoption de la charte des valeurs du Conseil des imams annoncée au CFCM : oui, mais pas tout à fait

Rédigé par | Lundi 18 Janvier 2021 à 11:45

           

Info Saphirnews. Le Conseil français du culte musulman (CFCM) a annoncé, dans la nuit du dimanche 17 janvier, que la charte des valeurs du Conseil national des imams a été adoptée par les fédérations composant l'instance. Néanmoins, l'affaire n'est pas complètement pliée car plusieurs composantes n'ont pas signé à ce jour le document en l'état actuel. Ce qui ne freine pas le processus : Emmanuel Macron, reçoit, lundi 18 janvier, les fédérations signataires du texte à l'Elysée pour acter cette avancée. Mohammed Moussaoui nous en dit plus.



L'adoption de la charte des valeurs du Conseil des imams annoncée au CFCM : oui, mais pas tout à fait
La décision de la Grande Mosquée de Paris de se retirer du projet de création du Conseil national des imams (CNI), « irrévocable » dites-vous ? Trois semaines après le communiqué cinglant du recteur Chems-Eddine Hafiz contre la composante « islamiste » du Conseil français du culte musulman (CFCM), le dirigeant de la GMP, qui occupe le fauteuil de vice-président de l'instance avec Ibrahim Alci, s'est ravisé en revenant à la table des discussions autour de la charte des valeurs qui a vocation à « encadrer l’éthique et les règles déontologiques qui devront structurer le fonctionnement » du futur CNI.

A l'issue d'une réunion en visioconférence organisée dimanche 17 janvier, les fédérations composant le CFCM ont adopté « un texte consensuel dénommé "Charte des principes" qui les engage conjointement et solidairement », a fait savoir la présidence de l'instance dans un communiqué. Un choix dicté, pour les fédérations, par « la nécessité de dépasser leurs formulations particulières afin de préserver et de consolider leur unité et leur cohésion ».

Cette annonce intervient au lendemain d'une rencontre faite samedi 16 janvier au ministère de l'Intérieur entre Gérald Darmanin, le président du CFCM, Mohammed Moussaoui et ses deux vice-présidents, durant laquelle le texte très attendu a été présenté. « Je salue le travail entamé par le culte musulman français qui condamne clairement l’islam politique. C’est une avancée très significative, voulue par Emmanuel Macron, pour tous les musulmans français et donc pour la France », avait déclaré le ministre via Twitter.

L'unanimité n'est pas actée sur la charte en l'état

L'affaire s'avère, en réalité, plus complexe que ne le fait paraître le communiqué du CFCM. Selon nos informations, l'ensemble des fédérations ont effectivement acté le principe d'une charte des valeurs pour le CNI ainsi que les grandes lignes du texte soumis à la discussion dimanche mais toutes les composantes ne sont pas prêtes à ce jour à signer le document en l'état, baptisé « charte des principes pour l’islam de France ». Mis à part le cas particulier de l'AISD (Grande mosquée – Saint-Denis de l'Ile de la Réunion),* elles sont trois dans cette situation : il s'agit du Comité de coordination des musulmans turcs de France (CCMTF), de la Confédération islamique Milli Görus (CIMG) et de Foi & Pratique.

Autrement dit, cinq autres organisations ont adopté le texte : la Grande Mosquée de Paris évidemment mais également l'Union des mosquées de France (UMF), le Rassemblement des musulmans de France (RMF) et la Fédération française des associations islamiques d'Afrique, des Comores et des Antilles (FFAICIA). Musulmans de France (ex-UOIF) a bel et bien confirmé auprès de Saphirnews son adhésion à la charte en l'état, qui va solennellement être présentée au président de la République, Emmanuel Macron, ce lundi 18 janvier à midi à l'Elysée en présence du ministre de l'Intérieur chargé des Cultes.

Pas d'objection sur les grandes lignes de la charte...

Quelles sont les grandes lignes sur lesquelles toutes les fédérations s'accordent ? Cette charte réaffirme, entre autres, « la compatibilité de la foi musulmane avec les principes de la République, dont la laïcité, et l’attachement des musulmans de France à leur citoyenneté pleine et entière » et « rejette l’instrumentalisation de l’islam à des fins politiques ainsi que l’ingérence des Etats dans l’exercice du culte musulman ».

La charte réaffirme aussi « le principe d’égalité devant la loi oblige tout citoyen dont le musulman de France à inscrire son vécu dans le cadre des lois de la République garantes de l’unité et la cohésion de notre pays », de même que « le principe d’égale dignité humaine dont découle l’égalité femme-homme, la liberté de conscience et de religion, l’attachement à la raison et au libre-arbitre, le rejet de toute les formes de discrimination et de la haine de l’Autre ».

La charte stipule par ailleurs que « les actes hostiles aux musulmans de France et aux symboles de leur foi est l’œuvre d’une minorité extrémiste qui ne saurait être confondu ni avec l’État ni avec le peuple français ». En d'autres termes, selon nos informations, les dénonciations d'un « racisme d'Etat » sont ainsi clairement rejetées dans le texte, estimant qu'elles relèvent de « la diffamation ».

...mais trois principaux éléments coincent

Mohammed Moussaoui se réjouit auprès de Saphirnews d'une adhésion sur le fond de la charte qui n'a été que « peu modifié » par rapport à la version du 15 décembre. Il confirme toutefois que « trois principaux éléments » ont coincé auprès des fédérations non signataires de la charte, à commencer par l'intitulé du document, certains préférant parler d’une charte des « principes républicains » plutôt que « pour l’islam de France ».

S'agissant de la dénonciation de « l’islam politique », des courants y sont, selon nos informations, bel et bien désignés dans le texte soumis aux fédérations comme suit : il s'agit de ceux « appelés communément salafisme (wahhabisme), le tabligh ainsi que ceux liés à la pensée des Frères musulmans et des courants nationalistes qui s’y rattachent ». Un point auquel tenait la Grande Mosquée de Paris mais qui n'a pas recueilli l'assentiment de composantes comme Foi & Pratique ou encore Milli Görus. Pour Mohammed Moussaoui, ces dernières n'ont pas à se sentir visées par cette désignation des courants, qui « n’a aucune incidence sur la qualification des composantes du CFCM. Nous considérons qu'aucun des neuf composantes du CFCM ne rentrent dans ces mouvements ».

Enfin, le dernier article de la charte dans laquelle le non-respect de la charte par des signataires peut entraîner une sanction pouvant aller jusqu'à l'exclusion « de toutes les instances représentatives de l’islam de France » n'a pas non plus fait l'unanimité au CFCM . « Cette charte n’a aucun effet sur les statuts du CFCM », veut également rassurer Mohammed Moussaoui.

La charte « peut être perfectible », indique le président du CFCM. Autrement dit, il n'exclut pas que le texte puisse être soumis à des modifications dans un second temps. « Aucun texte humain n’est immuable. Une fois la charte confrontée à la réalité locale, des retours du terrain nous seront adressés et nous aiderons à améliorer le texte si le besoin se fait sentir », déclare Mohammed Moussaoui. Pour sa part, il déclare comprendre « la demande des fédérations (non signataires) d’avoir un peu plus de temps pour consulter leurs instances et se prononcer de façon plus solennelle sur le texte ». En attendant, « nous actons une étape importante qui nous permet d’avancer » sur la constitution du CNI.

A la rencontre de Macron

A l'heure de l'examen du projet de loi séparatisme en commission à l'Assemblée nationale, Emmanuel Macron, sollicité pour une audience par le CFCM, reçoit les fédérations signataires de la charte à midi à l'Elysée pour acter l'avancée d'un dossier particulièrement suivi par la présidence.

Après l'annonce de l'adoption de la charte par les fédérations, ces dernières ont réaffirmé, des mots de la présidence du CFCM, « leur volonté unanime de mettre en place dans les meilleurs délais le CNI ». L'instance « soumettra, via ses instances, le texte de la charte ainsi que les textes fondateurs du Conseil national des imams (CNI) aux acteurs locaux, imams et responsables de mosquées, en vue d'une consultation et une adhésion les plus larges possibles », a-t-elle assuré.

*Selon nos informations, l'Association Islam Sounnate Djamatte (AISD), qui représente l'île de La Réunion au CFCM, a décidé quelques semaines plus tôt qu'elle ne participerait pas aux travaux de la charte et de l'élaboration du CNI pour ne pas perturber le fonctionnement en place dans le département d'outre-mer.

Exclusif. Charte des valeurs du Conseil national des imams : ce que proclame le texte (exclusif)

Mise à jour : Emmanuel Macron, qui a salué « un engagement net, clair et précis en faveur de la République » du CFCM, a donné à l'instance 15 jours pour obtenir la signature des trois fédérations.

Lire aussi :
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Réagissez ! A vous la parole.

1.Posté par Chrif le 19/01/2021 20:57 | Alerter
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Il aura fallu attendre 18 ans après la création par Sarkozy du Cfcm pour que les toujours mêmes membres depuis de trop nombreuses années produisent dans la précipitation un texte sans valeur juridique. Ces nouveaux « bourgeois de Calais » sont allés dans la désunion faire acte de pénitence qui n’engage que ceux qui l’ont signé et encore ! Pire, le président de la République leur a donné un nouveau délai pour faire signer les réfractaires. Les musulmans ne seraient plus libres de leur choix en France ? Les lois de la République sont suffisantes et elles s’appliquent à égalité à tous les citoyens et à tous les cultes. On ne voit toujours pas l’utilité de cette charte spécifique aux soi disant « représentants » du culte musulman dont bcp sont liés à leur consulat d’origine. Récemment, l'ambassadeur d’Algerie a affirmé que la grande mosquée de Paris construite du temps de la colonisation appartenait à son pays. Par conséquent. le prétendu « recteur » connu comme ancien pro Bouteflika mais qui n’est pas à son premier revirement et qui exerce un mandat contesté, serait au service de l’Algérie ? Comme d’habitude sur le plan de l’islam consulaire rien ne change vraiment. Conclusion de l’article :
« Emmanuel Macron, qui a salué « un engagement net, clair et précis en faveur de la République » du CFCM, a donné à l'instance 15 jours pour obtenir la signature des trois fédérations. »

2.Posté par Premier Janvier le 21/01/2021 14:46 | Alerter
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Mentionner des ingérences à quelque part une connotation raciste.
Musulman étranger égale suspect, pas conforme.
Or islam et musulman sont deux différents.
Le problème de l'islam en France est qu'il est consulaire, rattaché à l'étranger. Tout est là. Dans la confusion entre islam et musulman.
On peut être musulman Français et être une crapule et être musulman étranger et être honorable.
Mais l'on en parle comme s'ils étaient des synonymes.
Après je ne veux pas faire le malin. Je ne sais pas non plus comment on pourrait le dire sans avoir à le dire.


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