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Chroniques du Ramadan

Avec la sourate Fatiha, le tawhid en ligne de fond

Chroniques du Ramadan

Rédigé par | Vendredi 5 Avril 2024 à 11:00

           


Les trois premiers versets de la Fatiha sont trois phrases déclaratives pour ouvrir la sourate. Trois phrases nominales. Sans verbe ni action. Pas de mot à conjuguer à un temps pour faire du sens. Trois phrases simples, claires, aux messages éternels. Des messages affirmés avec la brutalité de l'autorité inhérente à la liberté totale.

Nous l'avons dit, mais il plaît de répéter qu'il n'y a pas de loi dans ces trois versets. Il n'y a donc pas d'islam, il y a mieux que l'islam, il y a Dieu. Rien que Dieu, évoqué sous des formes variées mais de la même manière : exclusive avec des qualificatifs dithyrambiques. La disproportion et la norme en codefatihalogie pour parler de Dieu. L'idée est qu'au-delà des normes, tout devient possible.

Les noms de Dieu sont nombreux. Ceux qui sont choisis dans la sourate Fatiha ont-ils une importance particulière ? Qu'est-ce qui explique ces sept attributs de Dieu sur 99 que l'on sait ? Y a-t-il un lien commun ou un message d'ensemble à tirer de ces sept noms, en rapport à la notion de pacte ?

En fatihalogie, la certitude est que les noms de Dieu dans la sourate Fatiha ne relèvent pas du hasard. Si le but est d'introduire Dieu, de le faire connaître, les attributs sont choisis dans ce sens. Dans le premier verset : Le Digne de Louage, Allah, Seigneur. Dans le verset 2 : le Très Miséricordieux, le Tout Miséricordieux. Puis pour finir : La Maître et le Détenteur du Jour de la Rétribution.

Un raisonnement par l'absurde pour établir l'unicité nécessaire et absolue de Dieu

Le premier verset déclare la puissance totale de Dieu par « Louange à Dieu, Seigneur des modes ». Il ne s'encombre pas de preuves pour imposer Dieu en puissance supra-cosmique absolue. Dieu est à la source d'un domaine qui dépasse les capacités d'imagination d'un esprit humain.

Comme dit René Guénon, il est Dieu du manifesté et du non-manifesté. Il est le Seigneur de tous les mondes sans exception possible. Il en est le Seigneur exclusif. Puis Dieu veille à chaque instant sur chaque objet de Sa Création alors qu'il ne dépend de nul autre. Il est Allah, l'Unique Source de vie.

Si on pose l'hypothèse qu'il existe un Dieu différent d'Allah, cet autre Dieu ne peut exister que dans la seigneurie d'Allah. Car cette Seigneurie est totale et absolue. Or, par définition, rien n'échappe à la seigneurie d'Allah, la seule issue possible est que l'hypothèse de départ est erronée. Ce raisonnement par l'absurde permet d'établir l'unicité nécessaire et absolue de Dieu sur la base de l'ampleur et l'intensité de sa puissance et de Sa force. Cette figure est celle de l'ordre, de le force et de puissance, la figure de Dieu dans Son rôle paternelle ; Dieu Le Père.

Le verset 2 est celui de l'Amour divin, verset de la miséricorde infinie. « Ar-Rahman, Ar-Rahim » est aussi une référence à la retransmission matricielle de la vie dominée par l'Amour inconditionnel. Ce verset 2 évoque la figure de Dieu dans un rôle maternel ; Dieu La Mère.

L'analyse du verset 3 montre Dieu dans un rôle particulier en un jour particulier. Il est Détenteur de tous les droits et de tous les pouvoirs sur le Jour de la Rétribution. La figure de Dieu profilée est au-dessus de la mêlée. Un Dieu de Sagesse qui est le Juge Suprême du monde.

Le triptyque Père – Mère – Sagesse pour le symbole de la Divinité

Nos trois versets forment un triangle thématique. Un sommet représente la puissance et le Pouvoir ; c'est le sommet Père du verset 1. Un autre sommet incarne l'Amour infini ; le sommet Mère qu'on a trouvé au verset 2. Puis le troisième sommet est le sommet Sagesse pour rendre Justice ; il raconte le Juge suprême qui intervient au verset 3 à propos du Jour de la Rétribution.

Dans la symbolique du triangle équilatéral, côtés sont de même longueur, angles de même mesure, le triptyque Père – Mère – Sagesse est le symbole de la Divinité. Sous un angle plus philosophique, ce triptyque devient : Intellect - Cœur – Action et il symbolise la Perfection, autre attribut de Dieu.

L'intellect est vu en termes de conceptualisation et de créativité. Le cœur est la dimension affective et l'action renvoie à la prise d'initiative pratique. Chacun est peu expressif quand on le prend seul de manière isolée. Le regard global révèle l'équilibre et la tempérance qui fonde le mystère de la sainte trinité chrétienne : le Père, le Fils, le Saint Esprit pour former un Dieu unique.

Comparer la « sainte trinité » chrétienne et les trois premiers versets du Coran est un exercice facile en soi, mais peu inutile. Son intérêt est de montrer que trois pôles d'attributs peuvent s'associer dans un triangle pour détailler la complexité de la Divinité et la rendre reconnaissable.

Trois pôles qui traversent le tawhid

Le trait commun qui traverse les trois premiers versets de la sourate Fatiha est l'unicité absolue qui est affirmée à chaque niveau sans être exprimée ouvertement. Cette unicité est le tawhid.

« Louange à Allah » par exemple s'entend par « la totalité des louanges est à Allah ». Dans ce même registre, on l'entend aussi par « l'Unique digne de louange est Allah ». De même quand on parle du « Maître du Jour de la Rétribution », l'idée d'exclusivité est apparente. Dieu n'est pas un des maîtres, il est l'Unique Maître de ce jour-là, Il en est l'unique Juge de tous les cas et son avis est irrévocable.

L'idée finale, stable et constante qui traverse ces trois versets, est le tawhid, à savoir l'unité absolue de Dieu qui fait que rien n'échappe à Dieu et tout est sous contrôle de Dieu. Le tawhid se présente ici à travers les trois pôles que nous avons détectés : la Toute-Puissance créatrice de Dieu. L'Amour infini et inconditionnel de Dieu. Et enfin Sa justice qui met en action Sa sagesse infinie.

La sourate Fatiha est un pacte dont Dieu est le premier signataire qui se présente en trois pôles indissociables. Trois pôles liés comme les sommets d'un triangle équilatéral, dont les côtés et les angles sont dans un parfait équilibre. Par ailleurs, nous verrons plus tard que chacun de ces pôles intervient dans le cadre du contrat pour fixer les thèmes avec la seconde partie, à savoir l'être humain, dans les derniers versets de la sourate. Mais en attendant, la dernière expression de la première partie est « Jour de la Rétribution » est une première ouverture vers l'humain adamique. Car seul l'humain est concerné par ce Jour-là.

D'abord Dieu, puis l'humain

Du début de la sourate à « Jour de la Rétribution », tout est exprimé à la dimension du Cosmos tant au niveau de l'Amour de Dieu, de Sa Miséricorde comme de Sa seigneurie ou son droit exclusif aux louanges. Le « Jour de la Rétribution » réduit l'ampleur de la vision pour le focaliser sur l'humain. Et c'est bien l'humain qui intervient au verset suivant, le verset 4.

Le tableau qu'offre la Fatiha, à la fin du verset 3, est celui d'un Dieu immensément puissant dont le pouvoir est illimité. Un Dieu extrêmement aimant dont l'Amour n'a pas de bornes. Puis, enfin, d'un Dieu à la sagesse exceptionnelle parce qu'Il sait tout sur tout et tout le temps.

Quelle est la meilleure attitude face à un tel être, Dieu ? Certains prendront peur, croyant être mis en danger par un tel être, Dieu. D'autres auront envie d'avoir un tel être au service de la société ou dans leurs propres listes d'amis. Ils prendront des précautions pour ne pas se faire dominer.

Une famille de gens va se mettre au service de cet être, Dieu. Ils renoncent à leurs idées et opinions pour adopter ce que Dieu attend d'eux. Ceux-là seront soumis à Dieu. Et leur choix est ce qu'on dira, dans le langage coranique, « adoration ». C'est l'idée du verset 4 dont nous parlerons prochainement. Que Dieu accepte notre jeûne. Qu'Il nous pardonne nos faiblesses, nos manquements. Que Sa grâce comble le Prophète Muhammad, sa famille et tous ceux qui l'aiment. Rendez-vous dans nos dou’as à l'heure de l'iftar.

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Diplômé d'histoire et anthropologie, Amara Bamba est enseignant de mathématiques. Passionné de... En savoir plus sur cet auteur


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