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Cinéma, DVD

Le Repenti : quelle paix après les années noires d'Algérie ?

Rédigé par | Mardi 20 Août 2013 à 06:00

           


Le Repenti, de Merzak Allouache (Photo :  © Sophie Dulac Distribution)
Le Repenti, de Merzak Allouache (Photo : © Sophie Dulac Distribution)
« Allahû Akbar ! » C’est avec cet ôde à la grandeur de Dieu que les islamistes crient leur victoire, après avoir tué leurs ennemis de l’intérieur : ceux qui n’ont pas la même vision du monde durant les années noires de l’Algérie.

Meurtres, enlèvements… on a souvent accusé l’armée régulière d’avoir « manipulé » les islamistes. Puis vint la loi de la concordance civile, entrée en vigueur en 2000, dont l’objectif fut de mettre un terme à la « décennie noire », dont on a déploré quelque 200 000 victimes. Ceux qui se réclamaient de l’islamisme quittèrent les maquis où ils se terraient et déposèrent leurs armes, pour 80 % d'entre eux. On les appelle les « repentis ».

Le réalisateur Merzak Allouache nous fait suivre Rachid, un jeune maquisard qui descend de la montagne et rejoint sa famille au village. Mais il n’est pas le bienvenu : un voisin l’a vu faire partie d’un groupe qui a massacré sa famille. « Ce n’est pas moi qui ai tué ! » Mais comment pardonner à un « repenti » quand on a perdu son père, son frère, et vu sa femme et ses enfants tués ?

Pour sauver sa peau, Rachid s’enfuit à la ville et dépose sa déclaration de repentir au commissariat. Le commissaire lui trouve un travail de cafetier, en échange duquel il lui demande un « service » dont on ne sait les tenants et aboutissants mais qu’on soupçonne de devoir espionner ou dénoncer.

Rachid, ancien fermier avant d’avoir été maquisard, est un jeune homme simple, dont on voit bien qu’il n’est pas pétri de grande idéologie islamiste. Il sait pourtant que les islamistes ne sont pas des anges et ont du sang sur leurs mains.

En ville, il retrouve Lakhdar, un pharmacien sans cesse en rupture d’approvisionnement de médicaments afin de pourvoir aux besoins des habitants du quartier.

Lentement se noue l’intrigue. Qu’est-ce que Rachid a à dévoiler à Lakhdar ? Pourquoi Lakhdar téléphone-t-il à Djamila, partie voilà 5 ans du foyer conjugal ?

La tragédie monte en tension. Le spectateur est emmené par l’intrigue, dont il découd les nœuds et les fils peu à peu.

« Le Repenti » s’achèvera par un « Allahû Akbar », non pas pour sanctifier la grandeur de Dieu, mais pour signifier, au contraire, que la paix est loin d’advenir, malgré la loi de concordance civile.

Aucune violence physique, aucune scène de crime, aucune effusion de sang dans le film saisissant de Merzak Allouache. Mais la violence qui a émaillé les années noires d’Algérie remonte dans l’âme des protagonistes. Et les notions de pardon et de culpabilité ne sont pas abordées.

Le Repenti a reçu les prix de la meilleure actrice (Adila Bendimerad) et du meilleur acteur (Nabil Asli) au festival d’Angoulême 2012. Son scénario avait été rejeté par la commission de lecture du ministère de la Culture algérien ; le film a cependant récolté de nombreux prix, notamment au Qatar, en Egypte, au Kosovo et aux Etats-Unis.


Le Repenti (El Taaib), de Merzak Allouache, avec Nabil Asli, Adila Bendimerad, Khaled Benaissa.
Sortie en salles le 10 avril 2013 et en DVD le 20 août 2013.


Journaliste à Saphirnews.com ; rédactrice en chef de Salamnews En savoir plus sur cet auteur



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