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Points de vue

La défense de la laïcité ne peut se passer du respect de la loi

Rédigé par Mohammed Moussaoui | Samedi 19 Septembre 2020 à 14:25

           


© Pixabay / Bernd Müller
© Pixabay / Bernd Müller
Ces derniers jours, deux étudiantes de confession musulmane ont été victimes d’attaques en raison de leur tenue vestimentaire, relançant l’interminable débat sur le voile en France.

La première, Imane Boun, étudiante en communication, a lancé un compte Instagram pour proposer des idées de recettes faciles pour les étudiants. Le 11 septembre 2020, une vidéo de BFM TV présentant @recettes.echelon7 de l’étudiante qui portait un foulard sur la tête a été postée sur le site Internet ainsi que sur le compte Twitter de la chaîne. Une journaliste a retweeté la vidéo en mentionnant « 11 septembre », faisant allusion à l’attentat des Tours Jumelles du World Trade Center à New York en 2001. Cet amalgame a suscité diverses réactions, certaines défendant l’étudiante, d’autres relayant le message de la journaliste qui serait depuis victime d’insultes et de menaces de mort.

La seconde, Maryam Pougetoux, est vice-présidente en charge des questions universitaires et des questions de jeunesse du syndicat étudiant UNEF. A l’occasion de son audition, le 17 septembre 2020, par une commission parlementaire d’enquête sur la crise du Covid-19, des députés invoquant le principe de laïcité ont quitté l’audition en raison du foulard que l’étudiante portait sur la tête avant même qu’elle ne prenne la parole.

Lire aussi : Des députés quittent une audition parlementaire face à la présence d'une syndicaliste voilée que rien n'interdit

Des propos inacceptables contre l'une, le non-respect de la loi contre l'autre

Dans le cas d’Imane Boun, nous pourrons invoquer un manque de lucidité et de discernement de la part d’une journaliste à l’égard d’une jeune femme qui n’aspirait qu’à rendre service à ses camarades dans la gestion de leur modeste budget. Vouloir établir un lien entre la tenue vestimentaire de la jeune étudiante et un attentat terroriste abject ayant fait plus de 3 000 victimes est inacceptable. De même, les insultes et les menaces de mort à l’encontre de la journaliste doivent être vigoureusement condamnées et leurs auteurs poursuivis.

Le cas de Maryam Pougetoux nous rappelle la réaction virulente d'un élu du Rassemblement national au Conseil Régional de Bourgogne-Franche-Comté le 11 octobre 2019, face à la présence d’une maman voilée accompagnatrice d’un groupe d’enfants de Belfort. Une situation qui avait alors obligé la présidente de la Région à faire un rappel à la loi : « La loi interdit les signes de discrimination dans le milieu scolaire. Elle n'interdit pas les signes de distinction dans l'espace public. »

Lire aussi : Interdire le voile aux accompagnatrices des sorties scolaires : défense de la laïcité ou entrave à la liberté ?

Si nous remontons un peu plus loin, cette ignorance des lois qui régissent la laïcité, souvent doublée pour certains d’une volonté de faire disparaître le voile de l’espace public, avait aussi touché Latifa Ibn Ziaten lors d’un colloque en décembre 2015 à l’Assemblée nationale. La mère de Imad Ibn Ziaten parachutiste de l’armée française assassiné en 2012 par le terroriste de Toulouse et Montauban, avait été huée puis agressée à la sortie d’une salle de conférences par des personnes aux cris de : « Vous n’êtes pas Française. (…) Vous ne pouvez pas parler de la laïcité alors que vous portez un foulard, vous faites honte à la France. » Peut-on soupçonner un seul instant Madame Ibn Ziaten de soumise ou de militante au service d’une idéologie à combattre ?

Lire aussi : Latifa Ibn Ziaten : « Aujourd'hui, je vis pour les autres et pour la mémoire de mon fils »

Dans le cas de Maryam Pougetoux, la présidente de la commission d’enquête, Sandrine Mörch, a dû rappeler, elle aussi, le droit : « Aucune règle n'interdit le port de signes religieux pour une personne auditionnée au sein d'une commission. » Avant de poursuivre : « On vous remercie de quitter la salle, on va continuer nos entretiens sans vous, ce sera plus constructif. »

Les élus doivent être tenus au devoir d'exemplarité

Au-delà des règlements des différentes institutions, la jurisprudence nationale et européenne en matière de laïcité a rappelé à maintes reprises que le principe de neutralité s’applique aux fonctionnaires qui incarnent l’État dans l’exercice de leurs fonctions et non aux usagers du service public. La limitation de la liberté individuelle n’est admissible qu’à condition d’être inscrite sur une base légale. Cette limitation doit être proportionnelle aux impératifs de l’ordre public. La représentante du syndicat étudiant n’avait donc pas enfreint la loi.

De ce point de vue, les députés qui ont quitté bruyamment la salle pourraient être poursuivis pour discrimination à l’égard d’une personne en raison de sa confession, de sa tenue vestimentaire ou de ses opinions. L’ignorance de la Loi ne saurait être une excuse valable pour des représentants de la Nation qui participent à son élaboration. Le respect de leur devoir d’exemplarité est essentiel pour notre démocratie.

Aux arguments du député Chabert qui proposait en juin 1905 une loi interdisant le port de la soutane dans l’espace public, Aristide Briand, rapporteur de la loi de décembre 1905, avait répondu :

« Au risque d’étonner l’honorable M. Chabert, je lui dirai que le silence du projet de loi (de 1905) au sujet du costume ecclésiastique qui paraît le préoccuper si fort, n’a pas été le résultat d’une omission mais bien celui d’une délibération mûrement réfléchie. Il a paru à la commission que ce serait encourir, pour un résultat plus que problématique, le reproche d’intolérance et même s’exposer à un danger plus grave encore, le ridicule que de vouloir, par une loi qui se donne pour but d’instaurer dans ce pays un régime de liberté au point de vue confessionnel, imposer aux ministres des cultes de modifier la coupe de leurs vêtements. »

Vouloir réduire l’espace de la liberté religieuse à la stricte sphère intime est contraire à la loi de 1905, renforcerait le sentiment d’exclusion et doperait les rangs des radicaux.

L’arsenal juridique pour lutter contre le prosélytisme est très complet. Il faut juste l’appliquer et faire confiance aux valeurs qui animent l’immense majorité de nos concitoyens. Il convient de rappeler que selon le Conseil d’État, le port du foulard ne constitue pas, par lui-même, en l’absence de toute autre circonstance, un acte de pression ou de prosélytisme (CE, 27 novembre 1996, n° 170209, publié au recueil Lebon).

Nous devons assurer à chacun sa liberté de croire ou de ne pas croire et de pratiquer le culte de son choix. Les femmes qui ne portent pas le voile sont libres de leurs choix. Celles qui souhaitent le porter doivent pouvoir le faire en toute liberté, sans limites autres que celles prévues par la loi de la République et les impératifs de l’ordre public.

*****
Mohammed Moussaoui, président de l’Union des mosquées de France (UMF), est président du Conseil français du culte musulman (CFCM).

Voir aussi la vidéo de La Casa del Hikma - La laïcité, un outil contre les religions en France ?

Lire aussi :
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Femmes musulmanes sous les tirs croisés
Le voile ou le choc des représentations – Comment le hijab a pris des qualités spirituelles qu’il n’a pas
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Réagissez ! A vous la parole.

1.Posté par francois.carmignola@gmx.com le 19/09/2020 16:47 | Alerter
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1) Pour qui pense que le port du voile islamique marque souvent la présence d'un entrisme de l'islam politique par ailleurs décrit par un récent rapport du Sénat, la parution d'une vidéo, même innocente un 11 Septembre peut faire l'objet d'une remarque ironique. Il est tout à fait exagéré, voire inacceptable, de qualifier cette ironie d'inacceptable, alors que les menaces de mort subies, bien que l'on souhaite les voir poursuivies n'ont pas eu cet honneur et auraient pu ou du l'avoir au minimum, en regard, ce qui rend le "de même" inapproprié.

2) Le départ de l'assemblée de députés ne souhaitant pas converser avec Myriam Puigetout acta le fait que la responsable de l'UNEF n'enfreignait pas la loi en l'état. La discussion n'a jamais porté là-dessus.
Les poursuivre pour discrimination serait intéressant juridiquement, mais apparemment cela n'aura pas lieu.

3) Le port de la soutane en 1905 concernait des ecclésiastiques, ce que n'est pas Myriam Pougetoux. La distinction est d'importance et la confusion n'est pas possible, le voile de la dame pouvant évoquer n'importe quelle conviction en rapport, depuis les obligations criminalisées iraniennes ou les obligations religieuses manipulées par les frères musulmans.
Le choix de sa personne, comme représentante du syndicat, pourrait être délibéré afin se livrer à une provocation médiatique pour capter une clientèle. C'est un choix politique, tout comme celui de ne pas lui parler.

3) Latifa Ibn Ziaten portait un foulard (il s'agissait...  

2.Posté par Ghislaine le 19/09/2020 19:52 | Alerter
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Les Fondamentalistes islamiques (Frères musulmans, Salafistes, DAECH et djihadistes de tout bord ...) obligeant les femmes musulmanes de porter le voile et en font un des symboles de leur projet d'islamisation mondiale et cette approche étant bien connue par toutes les femmes musulmanes occidentales en général et françaises en particulier je considère que ces femmes font dès lors du prosélytisme fondamentaliste inconsciemment pour certaines et sciemment pour d'autres ... et le CFCM ferait bien de les "éduquer". Sinon à quoi sert-il, quel est sa réelle mission ?

A propos, pourquoi la Reine de Jordanie ne porte t'elle pas le voile, est-elle moins croyante pour cela ?

https://www.bvoltaire.fr/la-reine-rania-de-jordanie-ne-porte-pas-le-voile-elle/

3.Posté par Abdoulaye le 20/09/2020 01:50 | Alerter
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C'est marrant, en France on nous explique que la liberté d'expression est une valeur cardinale de notre pays, on peut insulter une religion, mais les musulmans et musulmanes ne peuvent pas s'habiller comme bon leur semble ?
Un foulard ou un kamis seraient des dangers pour la République des droits de l'homme?
C'est risible... La République Française en danger par quelques bouts de tissu.!!!
En fait c'est l'intolérance des commentaires qu'on peut lire ici qui est un vrai danger pour la première de nos valeurs : la liberté.

4.Posté par francois.carmignola@gmx.com le 20/09/2020 11:53 | Alerter
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@aboudlaye Vous évoquez une "liberté" (qui n'est pas remise en cause ici) sans nuancer votre jugement malgré les arguments mis en avant: que la "liberté" en question est en fait une obligation religieuse et sociale, criminalisée dans certains pays, et que la liberté connexe qui réprouve la symbolique de la pratique peut bien s'exercer aussi.
Le résultat est que la société se clive sur la question, les responsables du clivage, tenant d'un non-souhaitable et délibérément dans la provocation, se trouvant ainsi isolés et identifiés sauf si on leur cède. Vous avez tort de soutenir leurs manoeuvres.

5.Posté par Premier Janvier le 24/09/2020 23:42 | Alerter
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Mis à part Abdoulaye, quel tissu de connerie les coms.


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