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Economie

Les musulmans de France, un marché pour la filière ovine... et de futurs exploitants agricoles ?

Rédigé par Pauline Compan | Mercredi 2 Mars 2011 à 11:36

           

Les consommateurs musulmans sont-ils l'avenir de la filière ovine française ? Pour répondre à cette question, Saphirnews est allé à la rencontre de la FNO (Fédération nationale ovine) sur leur stand du Salon de l'agriculture 2011, qui s'est tenu du 19 au 27 février dernier, à Paris. L'occasion de parler d'une filière en pleine mutation et des perspectives d'avenir.



©SaphirNews / Pauline Compan
©SaphirNews / Pauline Compan
Avec 6 millions de brebis et 45 000 éleveurs, le secteur ovin français ne fournit pourtant que 35 % des besoins de la population française. En cause, selon la Fédération nationale ovine (FNO) ? Le secteur ovin serait resté pendant longtemps le « parent pauvre » de l’agriculture et le grand oublié de la PAC (la politique agricole commune de l’Europe).

Les éleveurs ont fait valoir leurs arguments auprès de l’ancien ministre de l’Agriculture, Michel Barnier. La filière joue désormais à égalité avec la production bovine concernant les aides de Bruxelles. Des avancées possibles grâce aux perspectives d’avenir sur le secteur : la consommation de viande ovine devrait connaître une accélération et les consommateurs de culture musulmane n’y sont pas pour rien.

Les consommateurs musulmans tirent la demande vers le haut

Si les éleveurs ovins ont pu revaloriser le secteur, c’est bien aussi grâce à une poussée de la demande. Ils ont désormais conscience de l’enjeu économique que représente pour eux les consommateurs français de culture musulmane.

« Nous constatons une augmentation de la population musulmane à l’échelle mondiale et donc une augmentation de la demande de viande ovine », explique à Saphirnews Serge Préveraud, le président de la FNO. « On travaille déjà beaucoup lors des fêtes religieuses (Aïd...), mais cela ne suffit pas. Il nous faudrait nous imprégner plus efficacement des besoins et des habitudes de ces consommateurs », nous confie-t-il. Et d'ajouter : « Il y a là un véritable travail à faire. »

Exemple de pic de production lié à cette cible de consommateurs : l’abattoir de Poitou-Charentes, dans lequel M. Préveraud est actionnaire, sort 5 000 agneaux au moment de l’Aïd. Une belle accélération de la production lors de cette fête, pour un abattoir qui abat, en moyenne, 1 800 têtes de bétail par jour.

Les musulmans, grands consommateurs de produits carnés... et futurs entrepreneurs agricoles ?

Les consommateurs de culture musulmane achètent déjà 70 kilogrammes de volaille par personne et par an (source : Office national interprofessionnel de l'élevage). C’est trois fois plus que la moyenne nationale.

Le mouton – symbole du sacrifice du prophète Abraham – est bien évidemment une viande très prisée par les musulmans, sans oublier que le marché halal représente 10 % du marché total de la viande hors viande de porc.

Demande croissante de viande d'agneau et de mouton de qualité, augmentation du pouvoir d'achat, embellie du secteur halal... autant de facteurs qui sauraient réjouir les professionnels de la filière ovine.

Pour pouvoir satisfaire la demande, les éleveurs ovins vont avoir besoin de bras. Aujourd’hui, plus de 50 % des éleveurs ovins ont plus de 50 ans, des bergers vieillissants qui attendent la relève. Michèle Boudoin, éleveuse en Auvergne et secrétaire générale à la FNO, s’enthousiasme d’ailleurs dès que l’on parle de nouvelles installations : « Nous avons besoin de bras ! Et des personnes issues de la communauté musulmane pourraient installer leurs exploitations », explique-t-elle.

Des changements au niveau européen

Si l'enthousiasme est de mise, il faut rappeler que la production ovine française subit de plein fouet la concurrence de pays comme la Nouvelle-Zélande ou l’Australie. Ces pays pratiquent l’élevage extensif et disposent d’importants cheptels à des prix très concurrentiels. Pour se démarquer, les éleveurs français mettent donc en avant les exigences qualitatives de la production hexagonale.

Michèle Boudoin le confirme : « Le prix du mouton français est plus élevé car nous pratiquons l’identification à la naissance de l’agneau et la traçabilité tout au long de sa vie. »

En 2009, le ministre de l’Agriculture Michel Barnier s’était intéressé au devenir de la filière. Le bilan de santé de la PAC avait fait apparaiîre des inégalités de traitements entre les productions. Aujourd’hui, les aides ont été revalorisées à hauteur de 135 millions d’euros (sur le 1 milliard attribué par Bruxelles) pour la filière ovine, soit autant que la filière bovine.

La viande ovine commence tout juste à être appréciée à sa juste valeur et les consommateurs de culture musulmane participent, semble-t-il, pleinement à cette revalorisation.









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