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Société

La flambée des actes anti-musulmans et la résurgence du racisme anti-asiatique épinglées par la CNCDH

Rédigé par Lina Farelli | Jeudi 8 Juillet 2021 à 17:00

           

La Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH) a publié, jeudi 8 juillet, son 30e rapport sur l'évolution du racisme en France. Un rapport aux conclusions contrastées qui révèlent en 2020 une forte hausse des actes antimusulmans et une résurgence du racisme anti-asiatique.



La flambée des actes anti-musulmans et la résurgence du racisme anti-asiatique épinglées par la CNCDH
Dans son rapport annuel consacré à la lutte contre le racisme et rendu public jeudi 8 juillet, la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH) dresse un état des lieux contrasté de l’évolution du racisme, de l’antisémitisme et de la xénophobie en France. Pour mener cette analyse, l'instance s’est appuyée sur les données du Service central du renseignement territorial (SCRT) rattaché à la Police nationale.

Dans un contexte marqué par la crise sanitaire, la CNCDH indique, sur la base de chiffres transmis par le ministère de l’Intérieur, que les infractions commises en raison de l’origine ou de l'ethnie d’une personne ont baissé l'année dernière. Ainsi, elle relève que leur nombre s’est élevé en 2020 à 5 511, avec une légère baisse (2 %) liée au ralentissement des délits en raison de la crise sanitaire.

Du côté des chiffres avancés par le SCRT, bien que encore largement sous-rapportés selon la CNCDH, les actes racistes et xénophobes ont chuté entre 2019 et 2020, passant de 1983 à 1461 faits durant les mois de confinement strict. En revanche, le rapport souligne que « les faits à caractère raciste montrent une hausse de 40 % à la fin de l’année 2020, essentiellement due aux faits antimusulmans ». Une augmentation de 52 % des actes visant les musulmans a ainsi été constatée durant l'année, avec 234 faits recensés en France. En nombre, les faits antisémites sont plus nombreux (339) mais baissent de moitié (-51 %) par rapport à 2019.

Une crise sanitaire révélatrice de préjugés contre les Asiatiques

L’épidémie de Covid-19 a également fait ressurgir le racisme anti-asiatique. Ainsi, « loin d’être un élément déclencheur d’une nouvelle forme de racisme, la crise sanitaire a rappelé l’ampleur des préjugés qui sont régulièrement véhiculés à l’égard des personnes asiatiques », « des stéréotypes anciens et récurrents qui (les) essentialisent les personnes d’origine asiatique ».

« Les discriminations et violences dont souffrent les personnes d’origine asiatique restent encore trop méconnues, peu analysées en France et, souvent, minimisées et occultées, y compris parfois par les personnes elles-mêmes, entraînant alors une sous-déclaration des faits. Il semble essentiel de renforcer les dispositifs ainsi que les actions de sensibilisation, à la fois en direction des communautés concernées, à l’école et auprès des forces de l’ordre », recommande la CNCDH.

Dans le même temps, l'organisation souligne que l’indice de tolérance à l'égard des minorités a progressé de 13 points entre 2013 et 2019. « L’Indice n’a pas pu être mesuré en 2020, la pandémie rendant impossible la réalisation d’une enquête en face à face comparable à celles des années précédentes, mais une évolution globale se dessine néanmoins depuis 30 ans, confortée par les résultats des deux dernières enquêtes en ligne », lit-on.

Des recommandations prioritaires faites à l'Etat

Le ministère de la Justice signifie qu'en 2019, 7 283 affaires à caractère raciste ont été orientées par les parquets mais seules 843 « infractions racistes ou commises avec la circonstance aggravante de racisme ont été sanctionnées par des condamnations », ce qui représente une hausse de 37,5 % par rapport aux années précédentes. En ce sens, la CNCDH souhaite mieux faire connaitre les moyens de porter plainte, renforcer les cellules d’écoute et d’accompagnement des victimes, améliorer l’accueil des victimes venues porter plainte, conserver et améliorer le dispositif de pré-plainte en ligne, et améliorer la formation des forces de l’ordre et des magistrats.

Plus précisément, elle appelle les pouvoirs publics à former « spécifiquement, et de façon régulière et répétée, le personnel de police ou de gendarmerie aux questions particulières liées au contentieux raciste afin que la victime puisse pleinement s’exprimer, comprendre tous les enjeux de la procédure judiciaire, et ne pas être découragée, ce qui doit lui permettre de pouvoir aller au bout de sa démarche ». Car seules 2 % des victimes de racisme osent porter plainte aujourd'hui.

Parmi les autres recommandations prioritaires émises dans son rapport, la CNCDH s’adresse à l’Etat français en lui recommandant de « se doter d’une nouvelle instance de régulation qui serait notamment chargée de prévenir les discours de haine en ligne ». Il est aussi inviter à ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, en date du 18 décembre 1990, prohibant toute discrimination en matière de droits fondamentaux à leur égard, et enfin, la Convention sur les travailleurs migrants (dispositions complémentaires) de 1974.

Enfin, elle « invite le législateur et le juge à prendre en compte le cumul et l’intersectionnalité des discriminations et à en assurer la reconnaissance » et rappelle que les médias ont « le devoir de de dénoncer les propos racistes, mais aussi de veiller à ne pas contribuer à la transmission de clichés et de stéréotypes discriminants ».

Voir aussi la vidéo de La Casa del Hikma : Contre le racisme, à chaque communauté son combat ?

Et aussi la vidéo : Rejeter toutes les exclusions, un engagement impossible ?

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