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Monde

Une communion festive à Montreuil en l'honneur de Moussa

Rédigé par Samba Doucouré et H. Ben Rhouma | Samedi 5 Mars 2016 à 21:00

           

Près de 300 personnes se sont rassemblées, vendredi 4 mars, à la mairie de Montreuil, en Seine-Saint-Denis, pour marquer une nouvelle étape dans la mobilisation autour de la libération de l'humanitaire Puemo Tchantchuing, plus connu sous le nom de Moussa Ibn Yacoub, qui a fait une apparition mémorable depuis le Bangladesh. Récit.



Le maire de Montreuil Patrice Bessac lors de la soirée de mobilisation en faveur de Moussa vendredi 4 mars.
Le maire de Montreuil Patrice Bessac lors de la soirée de mobilisation en faveur de Moussa vendredi 4 mars.
L'ambiance était légère et bon enfant en cette soirée du vendredi 4 mars, dans la salle des fêtes de la mairie de Montreuil où était organisée la soirée de soutien à Maxime Puemo Tchantchuing, alias Moussa Ibn Yacoub depuis sa conversion à l'islam en 2009.

Trois jours après l'annonce de la libération conditionnelle de l'humanitaire, la tension est redescendue d'un cran. L'atmosphère est à la détente et à la joie, comme en témoigne la mise en scène de la soirée animée par Nounours, un proche de Moussa, qui a débarqué sur scène sous la musique « Uptown Funk » de Mark Ronson et Bruno Mars.

Face à la famille Tchantchuing, Patrice Bessac, maire de Montreuil, a ouvert le défilé des interventions à la tribune en rendant hommage à ses hôtes. « C'est un élan de solidarité inédit qui a réuni des centaines et des centaines de milliers de nos concitoyens qui ont pesé d'un poids considérable dans la première issue positive que nous connaissons aujourd'hui », a-t-il lancé, remerciant au passage les 150 élus qui ont, ensemble, signé une tribune parue mardi 1er mars. Hasard du calendrier, c'est ce jour que l'annonce de la libération conditionnelle a été faite.

« La mobilisation et l'association de centaines d'élus, de maires, de parlementaires, de conseillers régionaux et municipaux de toutes les tendances ont permis de faire valoir auprès des autorités françaises et bangladaise, l'exigence de justice et de respect des droits pour Moussa », a fait valoir le maire. Il a aussi évoqué le parcours du jeune militant associatif, qui « a donné très tôt un sens concret à sa vie en plaçant son existence sous le signe de l'assistance à son prochain, un jeune homme à qui la précarité est insupportable. Un homme qui a payé et qui paye encore son engagement humanitaire ».

Un duplex avec Moussa fut possible lors de la soirée du 4 mars.
Un duplex avec Moussa fut possible lors de la soirée du 4 mars.

Un Moussa en forme face au public

Le moment le plus attendu fut sans conteste le duplex avec Moussa, qui fut rendu possible grâce à une liaison en visioconférence depuis le Bangladesh, pour la plus grande joie des 300 personnes venues assister à la soirée. En direct face à un public à son écoute, il a exprimé sa gratitude et son émotion, s'estimant « perdu » car il ne s'attendait pas à une telle mobilisation de personnes exigeant sa libération. « J'espère que demain, il y aura d'autres ''Moussa'', bien meilleurs que moi et qu'ainsi, mon message pourra aller au-delà des frontières », a déclaré le jeune homme, visiblement en forme aux côtés de son frère Kamdem.

Il est revenu plus en détail sur son incarcération ces 70 derniers jours : « Je n'y ai pas cru au départ, je pensais que cela allait vite se terminer. Au début, on m'a dit : ''Tu va sortir dans cinq jours''. Il y avait une incompréhension totale dès le départ. (…) Je n'avais aucun moyen de contacter l'extérieur, cela a été extrêmement dur et je n'avais aucun moyen de défense. À aucun moment, on ne m'a fait comprendre pourquoi j'étais en prison. » Affichant son sourire si caractéristique, Moussa préfère retenir l'aspect positif et spirituel de cette épreuve. « J'étais isolé, j'avais un seul livre c'était le Coran. Cela m'a permis de me rapprocher de mon Créateur, de faire des prières et de penser à toutes ces personnes qui me soutiennent.(...) Chaque jour, vous étiez dans mes prières », déclare-t-il.

Georges Tchantchuing, frère de Moussa, aux côtés du député de Seine-Saint-Denis Razzy Hammadi.
Georges Tchantchuing, frère de Moussa, aux côtés du député de Seine-Saint-Denis Razzy Hammadi.

Il faut respecter « le temps de la diplomatie »

De nombreux militants ont fait le déplacement pour soutenir la cause. Parmi eux, on comptait Salah Hamouri, venu rejoindre son épouse enceinte bloquée en France par Israël qui lui interdit le retour à Jérusalem. « Tout le monde sait que Moussa faisait de l'humanitaire là-bas, il était dans son bon droit. Il faut absolument que la France intervienne au plus vite pour sa libération, surtout qu'elle l'a déjà fait pour des cas de Français qui avaient commis des crimes à l'étranger même au risque de créer des crises diplomatiques », exprime-t-il au micro de Saphirnews.

Dans le cas Moussa, « la France défend un de ses fils », déclare pour sa part Razzy Hammadi, qui souligne les efforts des services diplomatiques français au Bangladesh. Interrogé avant le lancement de la soirée, le député de Seine-Saint-Denis, qui suit le dossier depuis ses débuts en décembre, rappelle l’absence du rapport policier établissant les faits avant l’arrestation de Moussa. « Dans la loi bangladaise, la police a six mois pour rendre un rapport. C'est la loi, c'est leur loi. Il faut savoir qu'il n'y a rien de pire pour aider Moussa que de donner le sentiment que nous ne respectons pas la loi du Bangladesh ou que nous souhaitons remettre en cause l'indépendance de sa justice, quoi qu'on en pense et quelque soit la révolte qui nous étreint. Je le dis parce que c'est utile pour lui d'aborder les choses comme ça. On est à ses côtés », déclare-t-il.

Celui qui appelle à respecter « le temps de la diplomatie » se montre positif pour la suite des évènements : « Aujourd'hui, il faut être serein, les choses évoluent favorablement. » Après de nombreuses interventions dont ceux des journalistes Claude Askolovitch et de Florence Aubenas, et des représentants de l'association Au cœur de la précarité (ACDLP) et de l'ONG Secours islamique France, les artistes se sont succédé sur la scène. Le rappeur Tunisiano a interprété son émouvant « Sans (re)Pères » tandis que Mokobé a ambiancé la salle avec son « Gaou à Oran ». Les rappeurs du label Din Records ont clôturé la soirée avec le morceau hommage #Free Moussa.

Parce que rien n'est encore totalement gagné pour Moussa, sa famille, qui a lancé une cagnotte en ligne pour financer les frais inhérents au dossier (voyages au Bangladesh et frais administratifs), appelle le public à rester mobilisé pour l'humanitaire jusqu'à son retour en France.






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