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Economie

L'Euro met le voile sur la croissance

Rédigé par Bouchene Salem | Mardi 6 Janvier 2004 à 00:00

           

Depuis deux ans maintenant, date de lancement de la monnaie fiduciaire, la monnaie européenne n’a cessé de se surenchérir par rapport au dollar. De 0,9 euro pour un dollar en début d’année 2002 la cotation de l’euro a dépassé le seuil des 1,20 puisqu’il valait vendredi 1,26 dollars. Autrement dit, la monnaie européenne a gagné près de 40% de sa valeur en l’espace de deux années. Cependant ce constat n’est pas le corollaire du dynamisme de la zone euro. Bien au contraire, alors que la reprise mondiale s’amorce, l’Europe semble avoir loupé le train



Depuis deux ans maintenant, date de lancement de la monnaie fiduciaire, la monnaie européenne n’a cessé de se surenchérir  par rapport au dollar. De 0,9 euro pour un dollar en début d’année 2002  la cotation de l’euro a dépassé le seuil des 1,20 puisqu’il valait vendredi 1,26 dollars. Autrement dit, la monnaie européenne a gagné près de 40% de sa valeur en l’espace de deux années. Cependant ce constat n’est pas le corollaire du dynamisme de la zone euro. Bien au contraire, alors que la reprise mondiale s’amorce, l’Europe semble avoir loupé le train.

 

Avec une augmentation de 22% de sa valeur, 2003 aura été l’année de la plus forte hausse de l’euro depuis sa création en 1999. L’économie européenne est pourtant fatiguée avec une croissance de 0,5% en 2003 alors que les autres zones retrouvent le chemin de la reprise malgré un contexte international difficile (2,7% de croissance au Japon, 6,3 en Russie, 8,4% en Chine et 2,9% aux Etats-Unis).   Ceci étant, plusieurs questions viennent à l’esprit. D’une part comment expliquer  le surenchérissement soudain de la monnaie européenne et quelles en ont été les conséquences. D’autre part, cette hausse risque t-elle de freiner la croissance européenne ?

 

Le déficit budgétaire et le déficit commercial américains inquiétent

Le déficit extérieur américain s’est élevé en 2003 à plus de 550 milliards de dollars. Il est jusqu’ici principalement financé par les investissements étrangers  qui ont une meilleure confiance dans l’économie et la monnaie américaine.

La reprise américaine s’est effectivement amorcée mais pour pouvoir y parvenir le gouvernement de W.Bush a dû mener une politique budgétaire très active. Celle-ci s’est traduite notamment par le soutien de la demande par le biais d’une augmentation des commandes publiques en matière d’armement et par le soutien à la consommation des ménages grâce aux baisses d’impôts et des taux d’intérêts. Mais le déficit budgétaire américain frôle les 5% du produit intérieur brut et il est maintenant difficile de jouer sur une telle politique.

Or ce sont les déficits, budgétaire et commercial, qui conduisent aujourd’hui les investisseurs à parier sur la baisse du dollar car ils deviennent inquiétants. D’où le surenchérissement de l’euro.

 

Conséquences sur l’activité

Dans un contexte de stagnation, l’augmentation de l’euro a pénalisé la croissance européenne puisqu’elle a dégradé la compétitivité des entreprises exportatrices dont les produits sont devenus plus chers. Afin de maintenir leur compétitivité, ces entreprises sont obligées de baisser leurs coûts et leurs marges. Dans ces conditions elles embauchent plus difficilement.

 

Cependant un euro fort a aussi ses atouts. Ainsi la baisse du dollars a permis de comprimer le prix du carburant à la pompe. Avec une augmentation de 30% du prix du baril par rapport au début de l’année 2003 (il est aujourd’hui à 30 dollars), l’augmentation de l’euro a permis de freiner la progression du prix des carburants.

Il en est de même pour les autres produits importés, même si les consommateurs n’en profitent pas toujours puisque les prix finaux sont très peu flexibles à la baisse. Dans ce cas, se sont les industriels qui en profitent grâce à l’augmentation de leur marge.

 

L’augmentation de l’euro risque-t-elle de freiner la croissance ?

Dépourvue d’une véritable politique économique autonome, c’est en réalité la croissance mondiale et la demande extérieure qui ont permis à l’Europe d’éviter la récession. Cependant, l’augmentation du change pèse sur la croissance. Ainsi l’OCDE estime qu’une appréciation dans la zone euro de 10% du change- ce qui correspond à peu près à celle enregistrée en 2002-  enlève 0,8 point à la croissance pour l’année correspondante, puis 0,9 point l’année suivante. L’appréciation de l’euro a donc coûté au moins un point de croissance en 2003*.

 

La dégradation du déficit américain risque d’entraîner de nouvelles hausses de la monnaie européenne et certains économistes n’excluent pas qu’elle puisse atteindre 1,30 voir 1,35 dollars. Une nouvelle hausse de l’euro risque fort bien de nuire à la croissance européenne.

Mais la croissance mondiale est repartie et celle-ci peut permettre de compenser cette hausse par l’intermédiaire d’une augmentation de la demande qui s’adresse à l’Europe.

 

En attendant, la croissance européenne a du mal à redémarrer. Le taux de chômage de la zone est de 8,8% il devrait atteindre les 9% en 2004 et ne commencer à baisser qu’à zla fin de l'année..

 

En 2003, le Président Jacques Chirac avait exprimé le vœux de faire de cette année celle du troisième âge. L'expérience de la canicule de cet été pose question. L'on se souvient que, dans son discours du 31 décembre, le Président s’est engagé à faire de l’année 2004 celle de l’emploi. Il y a certainement lieu de s'inquiéter.

 


*Alternatives économiques n°22 janvier 2004- Le train de la reprise part sans l’Europe- page 31

 

 





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