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Bagdad à feu et à sang

| Vendredi 24 Novembre 2006 à 12:20

           

Six voitures piégées ont explosée jeudi à Bagdad, dans le quartier de Sadr City, à majorité chiite, faisant plus de 200 morts et 257 blessés. L’un des attentats les plus meurtrier depuis le début de l’intervention américaine en 2003 a poussé les autorités à décréter un couvre-feu illimité dans la capitale. Des obus de mortiers ont été lancés sur des quartiers sunnites dans la soirée. Ce jeudi marquait le septième anniversaire de l'assassinat du père de l’imam radical Moqtada al Sadr, par les agents de Saddam Hussein.



Bagdad à feu et à sang
Ce jeudi fut une journée particulièrement sanglante en Irak. Bagdad fut le théâtre, ce jeudi, de nombreux attentats à la voiture piégée causant ainsi plus de 200 morts et 257 blessés. Une des explosions a touché un marché d’un quartier peuplé d’environ 2,5 millions de personnes. Suite à ces violences, un couvre-feu à durée indéterminée interdisant toute circulation dans la capitale irakienne est entré en vigueur jeudi à 20H00 locales (17H00 GMT).

D’autre part, certains responsables du mouvement chiite radical de Moqtada al Sadr ont accusé les soldats Américains d'avoir ouvert le feu sur un minibus transportant des civils allant à leur travail, tuant quatre personnes et en blessant huit, dont deux femmes. « A 6h du matin, les Américains ont tiré de sang froid sur un bus transportant des travailleurs dans la rue Al-Falah, à Sadr City, provoquant un certain de nombre de morts », affirme l'imam Abdul Zahra Al-Zuwaidi, un responsable du courant de Sadr. « Ces actes font des victimes quotidiennement. Je demande au peuple américain de manifester contre ces agissements », a-il ajouté.

« Quatre personnes ont été tuées. Huit personnes dont deux femmes sont blessées. Certains des blessés sont dans un état critique », affirme une source médicale. Selon une source sécuritaire, l'incident s'est produit vers 06h00, heure de fin du couvre-feu nocturne (21H00-06h00) imposé à la capitale. Les passagers se rendaient à leur travail à Jamila, un des grands marchés de Bagdad. Selon un communiqué de la Force multinationale, les « Forces spéciales irakiennes, avec des conseillers de la coalition » ont conduit un raid contre « le leader d'une cellule responsable d'un enlèvement » et ont « tiré sur un véhicule (...) au comportement hostile qui a été identifié comme une menace. » Les « forces spéciales » auraient arrêté cinq membres d'une cellule dans le cadre d'une opération pour obtenir des informations sur le soldat américain d'origine irakienne Ahmed Kousy Altaie enlevé le 23 octobre.

Les récentes attaques dans ces quartiers sont perçues comme une déclaration de guerre par les milices, accusées par ailleurs de nombreuses exactions. Notant que jeudi marque, dans le calendrier musulman, le septième anniversaire de l'assassinat du père de Sadr par les agents de Saddam Hussein. Fattah al Cheikh, un allié de Moqtada al Sadr, a mis en cause « les groupes terroristes et les 'saddamistes' » ainsi que l'occupant américain. Sami al Askari, un autre leader chiite, a demandé de son côté l'arrestation du chef de file des sunnites au parlement, Adnan al Doulaimi, qu'il a accusé d'incitation à la violence.

Le ministère de la santé attaqué

Une trentaine d'hommes armés ont attaqué jeudi le ministère de la Santé dans le centre de Bagdad. « D'importants affrontements se déroulent (…) entre les hommes armés et les gardes du ministère qui sont soutenus par l'armée », a affirmé une source dans les services de sécurité. Des activistes ont tiré sur le bâtiment au mortier, au lance-grenades et à la mitrailleuse, l'une des attaques les plus audacieuses menées par les insurgés depuis l'invasion de l'Irak par les forces américaines en 2003. L'arrivée d'hélicoptères de combat et de soldats américains a permis de disperser les assaillants, selon des employés du ministère. Cinq personnes ont été blessées au ministère de la Santé. Peu après cette attaque, une dizaine d'obus de mortier se sont abattus sur Adhamiya, une enclave sunnite située dans l'est de Bagdad, majoritairement chiite. 10 personnes ont été blessées.

Hakim al-Zamili, un vice-ministre de la santé a échappé lundi à un attentat à Bagdad qui a coûté la vie à deux de ses gardes, au lendemain de l'enlèvement de Ammar Al-Saffar, un autre vice-ministre de ce ministère dont on est toujours sans nouvelle. Le ministre de la santé Ali Al-Chemmari est partisan du dirigeant chiite radical Moqtada Sadr.


Appel au calme

Les leaders des différentes communautés irakiennes, dont le Premier ministre chiite Nouri al Maliki et le vice-président sunnite Tarik al Hachemi, ont lancé à la télévision un appel au calme. « Nous appelons tout le monde à se montrer responsable et à s'unir pour calmer la situation », ont-ils déclaré dans un communiqué commun. Une telle initiative a été prise pour la dernière fois en février dernier après des attentats contre un sanctuaire chiite marquant le début d'une vague de violence qui n'est pas retombée depuis.

« Je suis attristée d'entendre parler de nouveaux actes barbares du terrorisme à Bagdad », a réagi la ministre britannique des Affaires étrangères, Margaret Beckett, condamnant ces « attaques horribles ».

Le Premier ministre irakien Nouri al Maliki, qui doit rencontrer la semaine prochaine en Jordanie le président américain George Bush, a promis de démanteler les milices obéissant à des responsables chiites tels que Sadr, une figure incontournable du paysage politique irakien, mais il n'a pas accédé à la demande de Washington d'accélérer le processus.

Des centaines de personnes sont victimes chaque semaine à Bagdad d'escadrons de la mort. A ce propos, la police irakienne a découvert 30 dépouilles à Bagdad, a-t-on appris jeudi du ministère de l'Intérieur. « Notre patrouille a découvert jusqu'à 30 corps dans différents endroits de Bagdad ces dernières 24 heures », a fait savoir un responsable du ministère sous couvert d'anonymat. Ces dépouilles, criblées de balles, ont été retrouvées ligotées avec les yeux bandés, laissant voir des traces de tortures, a révélé ce responsable, ajoutant que la police avait transporté tous les corps à la morgue.

Pour le seul mois d'octobre, plus de 3 700 civils irakiens ont trouvé la mort, soit un bilan record depuis l'invasion américaine en mars 2003, selon un dernier rapport de la Mission d'assistance de l'ONU pour l'Irak. Selon une enquête de la revue scientifique britannique, The Lancet, menées pas des experts américains et irakiens auprès de la population irakienne, plus de 650 000 civils, soit 2,5 % de la population irakienne est morte en raison d'un conflit destiné, selon le président américain George W. Bush, à pacifier l'Irak.

Aux Etats-Unis, un sondage réalisé auprès de plus d’un millier d’américains, par l'Opinion Research Corporation révèle que pour 58% des personnes interrogées, la guerre en Irak est devenue une situation similaire à celle que les Etats- Unis ont connu au Vietnam. 63% des américains se déclarent désormais opposés à cette guerre. De son côté, le président américain George W. Bush a déclaré plus tôt dans la semaine, lors d'une visite au Vietnam, que la leçon qu'il tirait de cette guerre était que son pays devait rester en Irak et "gagner" cette fois-ci.







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