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Religions

A Voté !

Rédigé par Lazrak Jihen | Lundi 14 Avril 2003 à 00:00

           

Ce dimanche 13 avril, les musulmans n’ont pas participé à la messe dominicale mais à une grande messe électorale, afin d’élire le conseil français du culte musulman. Première du genre pour les musulmans de France. Journée organisée par le CORELEC, chargé des bureaux de vote des 25 régions de France. En Ile-de-France « Centre » , qui regroupe les départements du 94, 75, 93, …, un bureau de vote était à la disposition des votants ou grands électeurs, le gymnase Michel Le comte dans le troisième arrondissement de Paris.



Ce dimanche 13 avril, les musulmans n’ont pas participé à la messe dominicale mais à une grande messe électorale, afin d’élire le conseil français du culte musulman. Première du genre pour les musulmans de France. Journée organisée par le CORELEC, chargé des bureaux de vote des 25 régions de France. En Ile-de-France « Centre », qui regroupe les départements du 94, 75, 93, …, un bureau de vote était à la disposition des votants ou grands électeurs, le gymnase Michel Le comte dans le troisième arrondissement de Paris.

 

A 8h30, le président du bureau de vote de Paris, rapporteur du CORELEC, pour la région « Ile-de-France centre », est sur le pied de guerre. Distribution des postes, réalisée selon l’appartenance à telle ou telle fédération. Le président du bureau représente la FNMF (Fédération Nationale des Musulmans de France), la vice-présidence est attribuée à la mosquée de Paris, le secrétaire est membre de l’UOIF ( Union des Organisations Islamiques de France) et le secrétaire adjoint appartient à la FFAIACA ( Fédération Françaises des Associations Islamiques d’Afrique, des Antilles et des Comores). Equité mesurée pour une entente cordiale. Deux tables qui se font face et deux isoloirs pour une journée qui se veut être citoyenne. Des assesseurs, les fameuses listes et enveloppes qui vous donnent le droit d’entrer vers l’incontournable isoloir, avant de triomphalement déposer l’enveloppe dans l’urne et d’entendre le traditionnel 'A voté'.

A la grande surprise du président du bureau de Paris, les électeurs sont arrivés tôt le matin, « avant 10h ». Cette arrivée matinale a provoqué une certaine file d’attente. La patience était donc de mise. Le gymnase grouille de monde, votants, représentants du bureau de vote, représentants de certaines fédérations, et journalistes de tous bords. Langue arabe et française se mélangent allégrement. On se salue d’un « salam alaikoum », et la discussion continue dans la langue de Molière ou dans le dialecte du pays. C’est au choix. Choix qui se retrouve au moment de la vérification de votre identité. En effet, la nationalité française n’est pas obligatoire, une simple carte de résident ou de séjour suffit pour pouvoir participer à cette élection.

Ces grands électeurs d’un jour sont venus en groupe. Délégués d’une même association ou mosquée arrivent ensemble, ce qui n’indique pas particulièrement une concertation sur le vote. Bien au contraire, chacun vote en son âme et conscience.

 

Ces grands électeurs

Ils viennent de toute l’ Ile-de-France « Centre » ou plus précisément des départements du 75, 93,94… Ils sont membres d’une association cultuelle, l’association qui représente leur mosquée, ou culturelle pour certains. Le nombre de délégués varie selon la superficie de la mosquée.

Jeunes et Femmes  représentent la minorité aujourd’hui. En effet, la moyenne d’âge est assez élevée. Abdelghani, un de ces jeunes, président de l’association AVEC au Pré-St-Gervais  (Association Vivre Ensemble notre Culture) nous explique ce manque : « Cela reflète peut-être l’équipe dirigeante (des mosquées) qui sont en général d’un certain âge, en général assez âgés, ce qui explique aujourd’hui qu’il y ait pas beaucoup de jeunes car ceux qui viennent voter sont les responsables des mosquées ». Une réponse identique pourrait être fourni en ce qui concerne le peu de femmes votantes.

Abdelghani considère ces élections comme « un petit pas de fourni ». Il attend du conseil français du culte musulman « d’être entendu par le pouvoir politique sur tous les points de la vie sociale car l’Islam englobe tout, à la fois l’abattage, le culte… » Son choix s’est porté sur celui qui représente le mieux l’Islam aujourd’hui. « Il y a trois grands groupes qui se présentent  et chaque musulman qui est investit dans sa communauté sait ce que vaut chacune de ces organisations… » 

L’association AVEC dont il est président, est membre de l’UAM 93 (Union des Associations Musulmanes du 93), organisation qui a prôné le boycott des élections. Remarque qui tend à expliquer une certaine diversité au sein d’un même groupe.

Diversité aussi représentée par un panel d’origines des musulmans assez vaste, visible aujourd’hui au bureau de vote. C’est cette diversité d’ethnies qui a amené Mohand, un des 3 délégués de l’association « Islam pour tous »de Bondy, à voter pour la liste du rassemblement. « La liste du rassemblement est une liste ‘‘multi-ethnique’’,  il y a les turcs du miliguruch, l’UOIF… ils sont proches des fondements de l’Islam. » Mais Mohand, 27 ans, est venu voter à contre-cœur,  car au moment de son inscription en tant que délégué, le bureau n’avait pas été désigné. Il y voit aujourd’hui, un « semblant de colonialisme ». Sa principale attente envers ce CFCM est une prise de position sur des sujets importants : « l’accès à l’enseignement des filles voilées, l’Aid-el-Adha ( abattage rituel)… et même les sujets de géopolitique. »

 

Les « notables »

Les « notables » de la consultation étaient présents et le plus attendu Dalil  Boubakeur, président désigné du bureau du CFCM est arrivé vers 13 heures, accompagné de certains membres de la mosquée de Paris. En ce qui concerne le manque de jeunes et de femmes dans cette consultation, le recteur de la mosquée de Paris explique qu'ils ont tous leur place dans le CFCM et qu’il est possible d’élargir les sensibilités par le processus de la cooptation. Méthode utilisée pour la désignation des membres de la consultation et reprise dernièrement afin de remplacer Madame Lambiotte qui avait démissionné de la consultation, par Dounia Bouzar, sociologue.

Dalil Boubakeur s’exprime et donne son avis sur certains sujets sensibles. Il envisage que ce soit le CFCM qui soit chargé du contrôle de la viande Halal. Spectre d’une  remise en route d’une taxe de la viande Halal jadis offerte aux trois grandes mosquées : Evry, Paris et Lyon par Charles Pasqua.

Le «voile», épineux problème remis au goût du jour par Jean-Pierre Raffarin, faisant une annonce tonitruante dans l’émission France Europe Express, d’interdire le voile à l’école. Dalil Boubakeur se positionne. « Chaque personne est libre de son engagement…je ne dirai pas mettez le voile sauf à la mosquée…je les défend les filles qui portent le voile. Et comme toutes les organisations, j’obtempérerai à la loi française.... »

Mohammed Béchari et Lhaj Thami Breze, respectivement président de la FNMF et président de l’UOIF, ont participé aux élections. Mohammed Bechari est venu en tant que responsable nationale de la FNMF, pour soutenir « ses frères » de la région Ile-de-France « centre » et non pas en qualité de votant. Il éspère un taux de participation très fort et réfute l’idée d’un scrutin à caractère politique. Il assume avec force les liens qui peuvent exister entre la FNMF et le Maroc tout comme Dalil Boubakeur banalise sa qualité de diplomate algérien. Mohammed Béchari parle de « liens naturels régient par des conventions bilatérales entre le pays d’accueil et le pays d’origine » et cite en exemple les évêques de France nommés par un pays étranger: le Vatican.

Les ambassades et autres pays d’origines sont donc affichés sans détour.

 

14 heures, le gymnase est plus calme. La journée électorale se terminera sans encombre à 17h à Paris. Le vote laisse place au dépouillement.

 

 





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