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A Antony, la résidence universitaire n'a plus de mosquée

Rédigé par Assmaâ Rakho Mom | Dimanche 6 Janvier 2008 à 16:36

           

Ils étaient prévenus. Pourtant, les gestionnaires de la salle de prière située au rez-de-chaussée du bâtiment G de la résidence universitaire Jean Zay d’Antony, dans les Hauts-de-Seine (92), ont été fortement surpris en voyant débarquer une vingtaine de policiers mercredi dernier 2 janvier au matin pour la fermeture de leur mosquée. Du côté du Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) de Versailles, ce sont des raisons de "sécurité incendie" et d'"électricité" qui sont évoquées.



'Elle n'a aucune légalité'

"Nous avons reçu un courrier qui nous précisait que ces travaux devaient être engagés en janvier sans plus de détails. Nous avons écrit en retour au Crous pour qu'il nous précise la nature des travaux et surtout les points de non-conformité de la salle ainsi que la réglementation qui s'y rapporte. Nous étions dans l'attente d'une réponse. On ne s'attendait pas à une intervention au lendemain des fêtes, quand la plupart des résidants sont encore en vacances", raconte Abdellatif Belkadi, un des gestionnaires de la salle de prière de la résidence universitaire.

Mercredi matin 2 janvier, des personnels du Crous et de la résidence universitaire Jean Zay, a Antony dans les Hauts-de-Seine, protégés par un cordon de CRS, sont intervenus au rez-de-chaussée du bâtiment G de la résidence, dans une salle servant depuis plus de trente années de lieu de prière pour les étudiants musulmans résidents. La salle ainsi que les bibliothèques qui s'y trouvaient ont été vidées de leur contenu, et l'opération s'est déroulée dans le calme. "Dix policiers et deux commissaires sont intervenus pour assister un huissier chargé de l'inventaire", selon la préfecture des Hauts-de-Seine.

Pour Françoise Bir, la directrice du Crous, présente sur les lieux ce jour-là, "cette salle devait fermer aujourd'hui, conformément à ce que préconisait la commission de sécurité. Je suis chef d'établissement et responsable de la sécurité. Il n'y a pas à avoir de lieu de culte dans la cité. C'est interdit dans un établissement public. Cette salle n'a fait l'objet d'aucune convention, elle n'a aucune légalité."

'Un prétexte'

Abdellatif Belkadi lui, se dit "très surpris et très choqué". "On invoque des raisons de sécurité, mais c'est un prétexte pour fermer ce lieu de prière qui existe depuis trente ans. De plus, le règlement intérieur permet la pratique religieuse", ajoute-t-il. Le lieu de prière accueillait, selon M. Belkadi, "en moyenne par 70 personnes par jour et 150 lors de la prière du vendredi", que ce soit des étudiants ou des musulmans venus des environs. "Ce n’est pas à nous de vérifier l’origine des personnes. Le Crous peut mettre des portes à badge magnétique s’il veut", souligne Abdellatif Belkadi, pour qui les étudiants musulmans de la résidence universitaire Jean Zay font "face à un intégrisme laïque incroyable".

Pour Jean-François Homassel, conseiller municipal du parti Citoyens d'Antony Verts à la mairie UMP d'Antony, "on agite le chiffon rouge en vue des municipales". Et de dénoncer une "décision sans concertation. Tout ce que l'on fait c'est supprimer un lieu qui crée du lien social, avec le risque de faciliter un islam des caves".

Selon les gestionnaires de la salle de prière, une autre salle, plus petite celle-là, aurait initialement été proposée, située elle dans le bâtiment H de la résidence. Mais, toujours selon les gestionnaires, elle ne répondait pas plus aux normes de sécurité.

'Quelqu'un s'en était déjà plaint ?'

"Cette salle existait depuis 30 ans, est-ce que quelqu'un s'en était déjà plaint ? Jamais !", lançait vendredi dernier 4 janvier Abdellatif Belkadi lors du prêche du vendredi face à près de 200 personnes qui, à cette occasion, s'est tenue sur la pelouse faisant face au bâtiment G de la résidence universitaire où des bâches en plastique sur lesquels étaient déposés les tapis de prière avaient été installés.

Le règlement intérieur de la résidence universitaire prévoit que sont garanties les "libertés religieuse, de réunion et d'association" quand elles "s'exercent dans le respect des libertés individuelles des autres étudiants" et qu'il n'y a pas de "manifestation à caractère prosélyte".

Précisons par ailleurs que la résidence universitaire Jean Zay, à Antony, est la plus grande de France et l'une des plus grande d'Europe, avec, selon les chiffres du Crous, "1562 chambres individuelles (dont 11 pour handicapés), 31 logements pour deux étudiants célibataires, et 446 logements deux pièces". En outre, des personnalités célèbres y ont séjourné durant leur cursus universitaire. Ainsi, Lionel Jospin y a occupé une chambre entre 1956 et 1959, Claude Allègre en 1957, ou encore Claude Erignac, le Préfet de Corse assassiné, en 1956.

Ajoutons enfin qu'immédiatement après la fermeture du lieu de prière par les autorités policières et du Crous, un Collectif des résidents de la RUA Jean Zay s'est créé afin de se mobiliser contre la fermeture de la salle de prière du bâtiment G, et qu'actuellement les résidents musulmans effectuent leurs prières quotidiennes dans les couloirs du bâtiment G.





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