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Services publics: un projet de charte de la laïcité

| Mardi 30 Janvier 2007 à 10:17

           

Hier, le Haut conseil à l'intégration a remis au Premier ministre Dominique de Villepin un projet de charte de la laïcité dans les services publics. Pour Isabelle Lévy, spécialiste des questions de religion à l'hôpital, cette charte, telle qu’elle est proposée, "ne servira à rien, ce sera juste un document de plus".



11 articles

Les usagers "ne peuvent, à raison de leurs convictions, récuser un agent public ou d'autres usagers, ni exiger une adaptation du fonctionnement du service public ou d'un équipement public", dit notamment ce projet de charte de 11 articles.

Cette charte, sans valeur juridique contraignante, devrait prendre la forme d'un guide qui serait remis en certaines occasions: remise de la carte d'électeur, formation initiale des agents du service public, rentrée des classes, accueil des migrants ou acquisition de la nationalité.

Elle devrait être affichée autant dans les services publics fermés (services publics hospitalier, pénitentiaire et armées) que dans les services d'accueil ponctuel (Caisse d'allocations familiales, etc.).

Dominique de Villepin
Dominique de Villepin

Ces phénomènes sont encore résiduels

En 2003, le rapport Stasi, qui avait servi de base à la loi sur l'interdiction des signes religieux à l'école, s'était fait l'écho des entorses à la laïcité dans d'autres services publics: hôpitaux, prisons, palais de justice, équipements publics.

Saisi le 15 mars 2006 par Dominique de Villepin sur ce sujet, le Haut conseil à l'intégration note que ces phénomènes sont "encore résiduels" mais ont "un caractère particulièrement marquant pour celles et ceux qui y étaient confrontés". "C'est pourquoi, dans un contexte de revendications identitaires de toute nature, il apparaît hautement souhaitable, sans attendre la multiplication de débordements, de veiller à rappeler la 'règle républicaine'", écrit le HCI.

Deux parties

Le Haut conseil a rédigé une charte bâtie autour d'un préambule renvoyant aux grands principes constitutionnels de liberté de conscience et de laïcité, et de deux parties.

La première partie vise les agents publics. Le devoir de "stricte neutralité", de "traitement égal de tous les individus" et de "respect de la liberté de conscience" est rappelé par l'article premier. "Le fait pour un agent public de manifester ses convictions religieuses dans l'exercice de ses fonctions constitue un manquement à ses obligations", stipule l'article 2. L'article 4 reconnaît le droit des agents à s'absenter pour participer à des cérémonies religieuses "dans des conditions compatibles avec les nécessités du fonctionnement normal du service public".

Les sept autres articles sont consacrés aux usagers. "Les usagers des services publics ont le droit d'exprimer leurs convictions religieuses, dans les limites du respect de la neutralité du service public et du bon fonctionnement de celui-ci", dit ainsi l'article 6. Les malades hospitalisés ou les détenus "doivent voir leurs croyances respectées et être mis en mesure de participer à l'exercice de leur culte, en particulier à l'occasion de la naissance, des fêtes religieuses et du décès", selon l'article 10.

Mais les usagers des services publics "doivent s'abstenir de toute forme de prosélytisme, notamment à l'occasion des cérémonies d'entrée dans la citoyenneté française" (article 7). Et ils ne peuvent récuser un agent public du fait de leurs convictions.

Ca servira à rien, ce sera juste un document de plus

L'hôpital Antoine-Béclère à Clamart (Hauts-de-Seine), a "mis en place une consultation d'éthique qui permet aux couples qui ont des questions morales de venir s'exprimer", explique le Pr René Frydman, chef du service obstétrique. "Il y a une mobilisation vis-à-vis du personnel, pour leur rappeler que l'hôpital n'est pas un lieu d'expression des croyances des uns et des autres, et vis-à-vis des patients afin de faire respecter le mode de fonctionnement de l'hôpital".

"Le plus important", souligne Igor Popovic, gynécologue-obstétricien à l'hôpital Bichat, "c'est de pouvoir expliquer tout cela aux patients, et quand on prend le temps de discuter, de leur expliquer qu'en cas d'urgence, ce sera peut-être un médecin homme qui sera là, ça passe toujours".

Pour Isabelle Lévy, spécialiste des questions de religion à l'hôpital, une charte, telle que celle proposée lundi par le Haut conseil à l'intégration, "ne servira à rien, ce sera juste un document de plus. Ce qu'il faut, c'est plus de moyens en personnels, et plus de moyens en formation, pour permettre aux soignants de savoir quoi répondre aux demandes des patients".





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