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Les espoirs de la thérapie génique hypothéqués

Rédigé par LATRECH Nadia | Samedi 5 Octobre 2002 à 00:00

           

Plusieurs pays ont suspendu leurs essais de thérapie génique après l'accident intervenu sur un enfant de trois ans à l'hôpital Necker.
Premier et unique traitement efficace contre l'isolement des «bébés-bulles», la thérapie génique utilisée par l'équipe des professeurs Marina Cavazzana-Calvo et Alain Fischer (Inserm U 429, hôpital Necker-Enfants-Malades, Paris) est brusquement remise en cause.



Plusieurs pays ont suspendu leurs essais de thérapie génique après l'accident intervenu sur un enfant de trois ans à l'hôpital Necker.
Premier et unique traitement efficace contre l'isolement des «bébés-bulles», la thérapie génique utilisée par l'équipe des professeurs Marina Cavazzana-Calvo et Alain Fischer (Inserm U 429, hôpital Necker-Enfants-Malades, Paris) est brusquement remise en cause.

 

Le principe de la thérapie génique consiste à ajouter aux cellules de la moelle osseuse une copie normale d'un gène, le «gamma-c», défectueux chez ces enfants.

En avril 2000, la revue Science publiait le premier succès irréfutable de la thérapie génique. Sous la conduite du professeur Alain Fischer (Inserm, hôpital Necker Paris), cinq nourrissons, des « bébés-bulle » atteints d'une forme particulière et rare de déficit immunitaire combiné sévère, qui les laissaient sans défense face aux microbes, avaient retrouvé des défenses immunitaires normales. Le gène malade inactif avait été remplacé avec succès, dans leurs propres cellules de moelle osseuse, par une copie normale du gène.

 

La nouvelle venue de France tombait donc bien et redonnait de l'espoir aux associations de familles, aux enfants et aux chercheurs.

Cet espoir est soudain assombri par le chef du projet lui-même qui en était à l'origine. Le professeur Alain Fischer a en effet demandé à Philippe Duneton, le directeur de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) d'interrompre l'essai en cours.

Comprendre les mécanismes

A la fin du printemps dernier, l'équipe de l'hôpital Necker-Enfants malades a constaté chez le quatrième enfant inclus dans l'essai une augmentation de certaines cellules sanguines participant aux défenses immunitaires, les lymphocytes T. L'augmentation touchait en l'occurrence une sous-population particulière appelée lymphocytes T gamma-delta. Il se trouve que, peu de temps auparavant, l'enfant avait eu une varicelle, dont il a guéri, ce qui témoigne d'un bon fonctionnement de son système immunitaire, totalement déficient avant la thérapie génique. Cet épisode pouvait peut-être expliquer le taux élevé de lymphocytes.

Mais cette hypothèse s'est effondrée à la fin du mois d'août, lorsqu'une élévation très importante de la même sous-population lymphocytaire a été constatée par l'équipe médicale. Elle était accompagnée de signes cliniques : augmentation de la taille du foie, anémie, diminution des plaquettes sanguines... Les investigations pratiquées ont montré qu'il s'agissait bien d'une prolifération monoclonale, n'intéressant qu'une lignée cellulaire. En quelque sorte, dans le cas de cet enfant initialement privé de cellules immunitaires, l'effet de la thérapie génique serait allé bien au-delà de ce qui était désiré.

Évaluer les risques

En tout cas, un énorme travail attend les chercheurs. 'Nous avons d'ores et déjà mis en chantier, avec des collègues américains et allemands, un programme pour évaluer le risque de tels accidents', précise Alain Fischer. Les équipes vont étudier les caractéristiques des sites d'intégration des gènes de remplacement. Chaque cellule en possède un, mais il y en a en tout une cinquantaine possible. La durée de ce travail devrait se chiffrer en mois, estime le professeur Fischer. 'Si le risque apparaît d'un accident sur mille thérapies, cela pourrait être acceptable compte tenu de l'extrême gravité de la maladie, mais ce ne serait plus le cas s'il y avait 10 % de complications majeures.'

Et pour les nouvelles familles ? « Il se trouve qu'aujourd'hui le cas s'est présenté, avoue Alain Fischer. Nous leur disons qu'il y a une thérapie génique possible, mais que, dans les circonstances actuelles, des précautions ont réclamé la suspension de l'essai. Nous espérons fermement reprendre rapidement. »





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