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Points de vue

« La Marche pour l'Egalité » : Quelles perspectives 20 ans après ?

Rédigé par Aissaoui Dr. ali | Samedi 29 Novembre 2003 à 00:00

           

En 1983, un élan citoyen de jeunes issus de la banlieue lyonnaise lance une marche à travers le territoire français qui finira à Paris avec le rassemblement de plus d’une centaine de milliers de personnes. Cette marche avait pour objectif de dénoncer le racisme à l’encontre des jeunes maghrébins ou français d’origine maghrébine et de réclamer l’égalité en matière de citoyenneté. C’était la marche de toute une génération formée dans le souvenir des cités de transit, dans la contemplation de parents qui travaillent mais ne votent pas, qui réclamait davantage de droits civiques et politiques.



En 1983, un élan citoyen de jeunes issus de la banlieue lyonnaise lance une marche à travers le territoire français qui finira à Paris avec le rassemblement de plus d’une centaine de milliers de personnes. Cette marche avait pour objectif de dénoncer le racisme à l’encontre des jeunes maghrébins ou français d’origine maghrébine et de réclamer l’égalité en matière de citoyenneté. C’était la marche de toute une génération formée dans le souvenir des cités de transit, dans la contemplation de parents qui travaillent mais ne votent pas, qui réclamait davantage de droits civiques et politiques.

A l’heure où l’occupation de l’Irak et le pillage de ses richesses ont été approuvé par une résolution de l’assemblée générale des Nations Unis, signant sa mort politique, où la Feuille de route est allégrement foulée du pied par Israël, commanditaire d’assassinats »ciblés », et l’accord de Genève,  décrié avec violence par les tenants du statu quo et de la confrontation armée, deux événements socio- politiques viennent de se dérouler dans le paysage français qui méritent que l’on s’y arrête.

De l’imposture à la posture.

La mise en liquidation judiciaire de SOS Racisme, à la veille du 20éme anniversaire de la Marche des Beurs et la création du conseil du culte des musulmans de France.

Il faut se remémorer l’irruption de SOS racisme dans le champ médiatique français en 1985, à la suite des différentes marches pour les droits civiques, l'égalité, de 1983 jusqu'à celle de Convergence de décembre 1984.

Cette association para politique a en partie phagocyté et détourné toutes les attentes et les espérances d’une génération qui revendiquait une place à la table de la République et le début d’une insertion politique dans le paysage français des années 80.

Cette association, partisane, a d'une certaine façon brisé l'élan vital d'un mouvement « Beur », qui portait au coeur du débat public, la ségrégation, les discriminations,  la violence, qui sont le quotidien d’une bonne partie des minorités, en particulier la composante franco maghrébine .

Ce laboratoire d’idées et d’actions né dans les banlieux lyonnaises du début des années 1980 et qui rayonnait au-delà, apportant par son travail de fond et sa (re)connaissance dans les banlieux, quelques réponses au malaise identitaire, politique, économique et social de la périphérie de nos villes, s'appuyait sur le respect

Républicain des droits de tous, tournant le dos à la discrimination positive et refusant tout communautarisme.

La récupération de ce combat par SOS Racisme , son instrumentalisation par le pouvoir politique de l'époque, l’affichage de la philosophie politique du différentialiste, droit à la différence à tous prix, ethnicisant, ghettoîsant, assurant le recyclage dans la sphère du social d’une partie des leaders des marches et dans l'assistanat une partie de la population, alors que l'aspiration fondamentale était éminemment politique, sont pain béni pour le FN et lui permet de passer de l'ombre à la lumière.

Quel est le bilan sur le terrain de l'immigration et de l'intégration plus de 20 ans après ?

Au vu des problèmes de discriminations dans de nombreux domaines, de fragilité sociale et identitaire, de suspicion généralisée que connaît une partie de la société et en particulier les maghrébins, français ou non, « Touche pas à mon Pote «  apparaît pour ce qu'il a été : un slogan creux, et le combat de l’antiracisme, détourné, au service d'ambitions personnelles.

Le discours de Malek Bouthi, aujourd’hui, et qui fût celui de tous  ces prédécesseurs, n’apporte que le flou là ou la simplification est criminelle et ne fait que renforcer la ségrégation et le regard de suspicion que l’on porte à toute cette population fragilisée. Cette parole est dangereuse car elle ne fait que surfer sur une lepénisation rampante des esprits, prête à rassurer, à moindre frais et à utiliser les mêmes méthodes que le FN, celui de la désignation d’un bouc émissaire, responsable de la crise identitaire et structurelle des institutions de notre pays. Il nous faut récuser ce discours simpliste et contre productif.

 

Brisons le miroir et ayons le courage de regarder de l’autre coté : ce concept d’intégration ne sert qu’à mettre entre parenthèses les réelles questions que sont les conditions faites aux français d’origine étrangère, aux immigrés et autre sans papiers en France : discrimination dans la société, discrimination institutionnelle, conditions d’accueil et de séjour des étrangers, droit d’asile etc.

 

A l’heure où le conseil constitutionnel supprime certaines dispositions de la loi sur l’immigration et le droit d’asile, ressentie  comme par trop répressive et contre productive, ou le débat, amplifié par la loupe médiatique, porte  sur le foulard et  la soi disante  nécessité d’une loi spécifique relative à ce foulard, que l’on agite comme un chiffon rouge devant le citoyen, où le thème piégé de « La discrimination positive » fait de nouveau  irruption dans le champ médiatique , que d’ écrans de fumée pour de nouveau écarter les questions de fond, celles de la discrimination sociale, économique, géographique de cette population à jamais assignée à résidence, pour motif d’appartenance à une ethnie, à une sphère cultuelle et culturelle qui serait étrangère à l’histoire du vieux continent et à sa philosophie…

 

C'est dans ce contexte post 11 septembre et 21 avril, de racisme anti-arabe et anti-musulman rampant, voir les éléments du dernier rapport de la Commission nationale consultative des droits de l'homme (Le Monde 24 11 03) qui met en lumière un racisme spécifique anti-musulman,  de radicalisation de l’Intifada, d’occupation et de chaos de l’Irak, de déficit de participation à la vie démocratique d'une partie de la population, de contexte socio -économique difficile, que le 20 décembre 2002 est signé l'accord fondant le Conseil français du Culte musulman (C.F.C.M)

Si des critiques pertinentes et nécessaires sont recevables quant à l'organisation, aux nomination, aux choix et au mode d’élection de ses représentants, il n'en demeure pas moins que cet accord s'inscrit dans la tradition gallicane de la France et permet de désigner des interlocuteurs aux pouvoirs publics,

et cela est essentiel pour la pacification des rapports entre l'islam et le la société française dans son ensemble.

À partir du moment, bien sûr ou ce Conseil respecte ses attributions et n'en sorte pas : d'aucune façon il ne peut représenter la réelle diversité, politique, social, culturelle, des musulmans et des franco- maghrébins en particuliers.

Le débat doit porter non pas sur un hypothétique contrôle des musulmans de France par les pouvoirs publics, mais sur les questions fondamentales de la formation des Imans et par corollaire,

l’idée d’un Institut Théologique, l'indépendance vis à vis des tutelles, l'introduction de l'étude des religions à l'école et le financement des écoles privées musulmanes.

Pour tous ceux qui observent, ceux qui analysent au-delà des schémas de pensées communs,   lorsque est établi de façon définitive que l’islam dans ses dimensions cultuel et  culturel est une réalité concrète dans le paysage français et européen, alors il faut l’inscrire  dans le cadre de la république de façon volontaire.

Personne ne peut nier le réel travail de socialisation que réalisent ces petites mosquées au travers de nos quartiers et le rôle de «  corps intermédiaires » que ces associations remplissent.

L’islam n’est pas à dissoudre dans la république, n’en déplaise à certains,  mais rien dans ses fondements ne l’empêche de s’intégrer dans la république.

C'est une action qui va dans le sens de cette sécularisation des rapports entre islam et république, nécessaire à une réelle cohésion sociale.

Au delà des critiques que peut susciter cette appellation de communauté elle nous semble au contraire nécessaire à l'ouverture à l'autre pour éviter les dégâts de l'acculturation.

Elle nous semble, à la différence du communautarisme, contribuer à la structuration identitaire, historique, sociale et citoyenne, elle permet de vaincre le regard de l'autre, de construire la France d'aujourd'hui et de demain dans l'unité de la République.

Nous restons persuadés que ce n’est pas  dans  la » discrimination positive » chère à M. Sarkozy, mais dans le respect du principe, républicain par excellence, d’ Egalité, que le combat se situe.

Il faut remettre à égalité de droit toute une importante frange de la population française et elle n’est pas que d’origine étrangère. Une partie de nos concitoyens vit dans des conditions sociales, économiques déplorables et c’est à tous ceux là que devrait profiter, non pas la discrimination positive, mais la refondation républicaine et la rénovation de la démocratie.

 

La recomposition du paysage politique français avec l’introduction du quiquenat, la bipolarisation en cours avec la création à droite de l'UMP et une gauche qui tente de recoller les morceaux, nous impose d'être les acteurs de notre propre devenir dans ce pays.

Le débat sur le foulard et le centenaire de la loi de 1905, nous impose de nous investir dans celui-ci de façon évidente, ne pas laisser la parole au tenant d’un intégrisme laïque autant qu’aux thuriféraires d’un ordre religieux et d’un communautarisme dont les arguments sont contraire à la philosophie du texte et à son cadre constitutionnel et légal.


Rencontre- débat :

 

« La Marche pour l’Egalité » : Quelles perspectives 20 ans après?

 

LE MERCREDI 3 DECEMBRE 2003 à 17h30

SALLE VICTOR HUGO

101, rue de l’université-75007 PARIS

 

Citoyenneté & Démocratie

Le Conseil des Démocrates Musulmans

UNIR





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