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Points de vue

L’insoutenable légèreté de l’Islam de Provence

Rédigé par Touré Cheikh | Jeudi 28 Juillet 2005 à 00:00

           

Le Tribunal de grande instance de Marseille a examiné, lundi 25 juillet, la requête initiée par les élus indépendants pour invalider le nouveau bureau du CRCM. Sans doute par ironie du calendrier judiciaire, le sort de Radio Gazelle, média dédié à la communauté musulmane, devait se jouer le même jour. Sous administration judiciaire depuis six mois, sa direction est contestée comme « sauvagement » élue.




« Juge des référés, juge des apparences certes ! Mais encore faut-il sauver ces apparences en les rendant acceptables du point de vue du droit ». Ce charitable plaidoyer de Maître Vincenti ne pouvait rien contre la stupeur contenue du tribunal des référés confronté aux dérives du triste islam de Marseille. Durant toute cette matinée où dieu, par une de ces conspirations des circonstances dont il détient le secret, devait crucifier à la barre les deux plus importantes institutions musulmanes de Provence : Radio Gazelle et le Conseil régional du culte musulman. Les deux associations sont citées pour les irrégularités de leur propre collège électoral. Les basses manœuvres du média précédant et aggravant les sordides litanies de la « bataille des imams » comme dit la presse locale.

« Témoignage écrit »

S’il est vrai que la radio, pour avoir meurtri jusqu’à l’inconscient collectif de sa communauté cible, avait plutôt tardé à rayer les parquets de la justice, rien ne prédestinait les imams du jour- requérants autant que requis- à la barre de ce minbar républicain-là. Ni leur vocation spirituelle : homme de Dieu oblige. Ni leur mission ou fonction auprès de leurs ouailles : exemplarité veut.

Au nom de tous les requis, Mohamed Moussaoui, président en intérim du CRCM litigieux, docteur agrégé en Mathématique fraîchement habilité à la direction de recherches universitaires, n’est jamais entré dans un palais de justice. L’autre Moussaoui convoqué, Abdelkader, est trésorier adjoint du dit CRCM. Les deux appartiennent à la liste de l’entente (proche FNMF) : «Trente deux ans en France, jamais vu d’huissier devant la maison » s’émeut le dernier.

A défaut de Abderrahmane Ghoul, nouveau président du CRCM, Ahmed Djidjili est venu donner une figure à la GMP. Le délégué régional de l’UOIF, Mohsen N’gazou, s’étant chargé de pallier l’absence de Farid Amri, trésorier du bureau requis.

Pour les requérants, Mourad Zerfaoui, docteur et chercheur en biologie qui vient de laisser passer une juteuse offre professionnelle à Londres pour servir sa communauté. Le président sortant du CRCM était accompagné de Moustapha Dali. Deux autres requérants manquaient à l’appel : Azzedine Aïnouche et Abdellatif Taef dit Ben Omar. Si le premier est en Algérie comme Abderrahmane Ghoul et Farid Amri, rien ne dit qu’ils passent les vacances ensemble. Quant à Ben Omar, il aurait signifié au président en intérim du CRCM qu’il ne fait pas partie des requérants : « il m’a dit : « je ne suis pas au courant que je t’ai assigné au tribunal ». Il m’a même proposé un témoignage écrit » rapporte Mohamed Moussaoui. Voilà qui aurait ramène le tribunal au scénario ourdi par Radio Gazelle. Pourtant ni le juge ni le barreau ne semblaient avoir remarqué que les deux affaires avaient au moins un personnage en commun. Bref, Ben Omar est bien cité parmi les organisateurs de ce défilé judiciaire d’imams qui n’est pas sans obscurcir l’image de l’islam de France et de Marseille.

Scrutin démoniaque

Hélas, ce n’était point là la seule ombre au triste tableau trouble que ce culte soumettait au jugement furtif de la République. Le rythme de la procédure choisie s’étant chargé de paumer les avocats dans les patronymes plutôt exotiques de leur clientèle. Ce déficit de familiarité avec le dossier n’a pas été épargné par une terminologie institutionnelle peu courante dans le penser associatif établi par la loi 1901 : le CRCM s’est vu souvent désigné sous l’appellation erronée de « CMCR ». La partie requérante, Maître Claudie Hubert, y laissa jusqu’à ses conclusions, et dut se résoudre à anticiper les effets éventuels d’une plaidoirie adverse découverte la veille : « un dimanche, à 21heures et quart ». Instruit de l’effet des plaidoiries sur un auditoire perdu, l’avocat des requis ne pouvait que parier l’audace : risquer le fonds devant le juge des formes. Et sa défense de se limiter à l’accablante attaque : « il s’agit de la force de l’imagination lorsqu’elle veut avoir le pouvoir » intime-t-il d’entrée pour donner le coup de grâce à une salle abasourdie par l’insoutenable légèreté du feuilleton islamique du jour.

Pourtant le fonds et la forme, si distincts pour la justice humaine, sont inséparables dans le scrutin cultuel soumis à son examen. Les faits : bien que victorieux des élections du 19 juin, les élus indépendants sont là pour « condamner » un plébiscite dont ils se sont d’abord réjouis. Car une coalition de tous leurs concurrentes est venue leur enlever toute chance de présider le nouveau conseil. C’est Abderrahmane Ghoul(GMP) qui, le 4 juillet dernier, s’empare de cet honneur à l’unanimité des élus du bureau, hormis les dits « requérants ». C’est son élection qui vaut aux sept membres de son bureau leur baptême judiciaire.

Ne pouvant rien contre la fermeté mathématique de l’addition des voix dissidentes, les élus indépendants ont tout misé sur les irrégularités intervenues au cours du scrutin. Celles qu’ils dénoncent, si elles étaient prises en compte, leur permettent de réduire à dix membres l’effectif du bureau du CRCM. C’est la liste de l’entente( proche FNMF) qui perdrait ainsi un représentant. Par la magie d’un scrutin démoniaque, la liste indépendante retrouverait alors un collège qui lui paraît digne de sa large victoire : cinq élus. Avec l’espoir de cette voix supplémentaire qui, dans une situation d’égalité des suffrages, aurait donné l’avantage de la présidence à la liste arrivée en tête du scrutin.

C’est dire que le jeu pouvait en valoir la chandelle si la forme de procès choisie n’avait pas finalement desservi son fond. Que dire donc des apparences si tous ces imams continuent d’oublier que, selon les statuts de leur confrérie républicaine, « un membre du bureau ou d’une autre instance du CRCM, dont le comportement est jugé attentatoire à la réputation d’un autre membre du bureau ou à l’image de l’islam peut être exclu du CRCM . Article 4-2 » ? Où trouver, dans l’actualité judiciaire de leur profession ( de foi), la moindre circonstance atténuante ?

Pour l’heure, le délibéré de ce référé de genre est différé au 7 septembre prochain. Ce jour-là, justice de César pourrait bien renvoyer la smala devant le verdict et les méthodes de son Dieu. Pour qui garde, après cela, un goût pour les animations en série de Radio-Gazelle : sous la menace d’une assemblée générale imminente et suspectée de « sauvagerie », le tribunal n’a pu s’accorder qu’un bref répit. Rien qu’une quarantaine d’heures pour aviser un assaillant cortège d’avocats. C’est d’abord « par téléphone »…arabe que le tribunal dira si Maître Vincenti a pu sauver les « apparences » de l’islam de France.





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