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Economie

L'économie mondiale: du doute à la crise

Rédigé par Lamine C. | Mercredi 27 Novembre 2002 à 00:00

           

La croissance exponentielle des marchés financiers, l´explosion des gains de productivité sous l´influence des nouvelles technologies de l´information et des communications, l'insolente croissance américaine et les annonces « événementielles » sur la fin des cycles économiques et sur la « mort » de l´économie « traditionnelle » ne sont en fin de compte que du vide.....
Quels sont les scénarios envisagés pour ces prochains mois? Quels sont les alternatives envisageables ?



Que la fable ultra-médiatisée de la nouvelle économie nous paraît bien lointaine ! La croissance exponentielle des marchés financiers, l´explosion des gains de productivité sous l´influence des nouvelles technologies de l´information et des communications, l'insolente croissance américaine et les annonces « événementielles » sur la fin des cycles économiques et sur la « mort » de l´économie « traditionnelle » ne sont en fin de compte que du vide, de la poudre aux yeux. En moins de deux ans et demi, de l´état d´exubérance irrationnelle et de la suffisance, les acteurs de l´économie mondiale ont sombré dans un pessimisme maladif, au bord de la déprime.
Quels sont les facteurs de cette inversion de tendance ? Quels sont les scénarios envisagés pour ces prochains mois? Quels sont les alternatives envisageables ?


La purge de tous les excès
Après l´euphorie boursière des années 90, les cours des actions ont dégringolé. En moins de 2 ans et demi, la valeur de l´ensemble des actions cotées dans le monde a fondu de 40%. Les espoirs placés dans la nouvelle économie tels la persistance de forts gains de productivité liés aux nouvelles technologies de l´information et des communications (NTIC), les fabuleux profits qu´elle était censée produire dans le futur et l´annonce de la fin des cycles économiques traditionnels ont alimenté une bulle spéculative qui ne cesse de se dégonfler depuis fin 1999. Le rôle de cette révolution technologique (il y a encore peu de temps copieusement exaltée dans les médias) dans la croissance américaine est donc à relativiser. En fin de compte, c´est la finance qui a porté, pour l´essentiel, l´expansion US en transférant des masses colossales de capitaux des anciennes activités vers les nouvelles et du reste du monde vers les EU.
Depuis le premier semestre 2001, un autre phénomène est venu amplifier la chute des cours : le ralentissement synchronique de la croissance aux EU, en Europe et au Japon. Le monde est au bord de la crise économique.

Le 11/09 : de nouveaux risques géopolitiques
Les attentats terroristes du 11/09 se révèlent être les détonateurs d´un changement structurel de mentalité dans le monde des affaires. Désormais, les investisseurs doivent assimiler l´existence d´un risque sérieux fondamentalement non probabilisable. Face à l´impossibilité d´estimer le risque terroriste et d'évaluer monétairement l´étendue des dégâts possibles et le montant des rétributions, les compagnies d´assurance décident d´augmenter les tarifs ou de se défausser de l´assurance de certains risques.
Cette intériorisation du risque dans les comportements économiques est maintenue par les déclarations du gouvernement américain. L´invulnérabilité du territoire US s´effondrant avec les Twin Towers, la société américaine redécouvre la peur. L´émotion collectivement partagée qui fait suite aux évènements appelle au rétablissement de la sécurité, intérieure et extérieure. Une doctrine est née: « sauver la civilisation » face à ce nouvel ennemi qu´est le « terrorisme global », lui déclarer une « guerre mondiale illimitée » et « le poursuivre où qu´il soit ». Sans vouloir polémiquer du bien fondé de la géostratégie américaine, il est incontestable que les concepts employés ont altéré vigoureusement les anticipations de reprise économique et miné l´état de confiance dans le futur des investisseurs. Généraliser l´anathème du terrorisme (allégrement surconsommé dans les médias) pour en faire une menace omniprésente n´est pas un choix judicieux pour relancer une économie mondiale en mal de confiance.

L´effet ENRON : la psychologie financière mise à mal
La multiplication des scandales financiers et des procédures judiciaires aux EU a plongé le monde des affaires dans une ère nouvelle, celle du soupçon généralisé. Les directions de grandes entreprises telles ENRON et Worlcom ont joué des dissimulations comptables et multiplié les malversations pour tenir des promesses irréalistes faites aux investisseurs (les fameux 15% de retour sur fonds propres).
Actuellement, les réflexions d´analystes portent moins sur la capacité des firmes impliquées à « rebondir » que sur l´ampleur des astuces comptables. Toutes ces révélations ruinent la crédibilité de l´ensemble du business à l´américaine, dogmatiquement inspiré d´une théorie néolibérale postulant la transparence et la bonne gouvernance. Les acteurs de ce système sont remis en cause : autorité de marché, banques d´affaires, sociétés d´audits, investisseurs institutionnels, agences de notation... La confiance, le coeur du système libéral, est altérée au point que les capitalistes n´ont plus confiance dans les capitalistes. Le pessimisme tend à devenir structurel, un filtre d´interprétation des informations, une convention partagée par tous les acteurs.

A quoi devons nous nous attendre ?
Cette question est celle qui suscite le plus d'appréhension. Nous n´en savons rien. Le phénomène de purge, en réponse au surinvestissement dans les NTIC des années 90, altère vigoureusement l´envie d´investir. De plus, les nouveaux risques géopolitiques associés à la neurasthénie financière immergent le monde des affaires dans l´incertitude radicale. Traditionnellement, deux dispositifs de politique économique subsistent pour relancer la machine : d´une part la politique monétaire qui consiste à diminuer le loyer de l´argent (taux d´intérêt) pour stimuler l´investissement privé, d´autre part la politique budgétaire qui autorise les dépenses publiques à travers des programmes d´états.
Au regard du niveau extrêmement faible des taux d´intérêts pratiqués aux EU, en Europe et au Japon (pratiquement 0%), il semble que la marge de manoeuvre de cette alternative est épuisée. Toute nouvelle diminution des taux d´intérêts ne provoquerait aucun effet positif sur l´activité. Les économistes désignent ce phénomène de « trappe à la liquidité ».
Il ne reste plus que la politique budgétaire, mécanisme le plus passionnellement débattu dans le microcosme des économistes et des hommes politiques.

Dans quels secteurs d´activités devrions nous attribuer des fonds pour relancer une économie mondiale déprimée ? Les EU, pour leur part, ont décidé de financer un vaste projet de réarmement en cohérence avec leur doctrine impérialiste. La France veut renforcer sa police et sa justice. Vous comprendrez donc que l´orientation des dépenses publiques est essentiellement assujettie au positionnement sur l´échiquier politique des gouvernements au pouvoir.
Et si nous relancions l´économie mondiale par un plan « Marshall » en direction de l´Afrique? Pourquoi ne financions nous pas les besoins de développement durable en favorisant, par exemple, l´émergence de technologies éco-efficientes tel le solaire ou l´éolien. Pourquoi ne nous concentrerions nous pas à réduire le mal-développement des pays du sud et satisfaire, même très incomplètement, les besoins et doits légitimes en terme de santé, d´alimentation, et d´éducation de quelques milliards de personnes? En fin de compte, tout n´est que choix politique.





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