Chroniques du Ramadan

« Guide-nous sur le Chemin-droit » : le verset 5 de la sourate Fatiha analysé

Chroniques du Ramadan

Rédigé par | Mardi 9 Avril 2024 à 12:30



« Guide-nous sur le Chemin-droit », dit le Coran, la Parole de Dieu. Le littéralisme primaire ne peut expliquer que cette parole soit divine. Notre analyse situe ces mots divins dans le cadre contractuel avec Dieu dans le rôle du Rédacteur. Réciter la sourate Fatiha, c'est signer le pacte divin.

Dans mon enfance, « Guide-nous sur le Chemin-droit » m'est présenté comme un enseignement où Dieu explique à l'humanité la meilleure manière de s'adresser à Lui. Chaque humain a des besoins à lui. Dieu nous montre « la meilleure prière qui synthétise tous les besoins du croyant », dit le maître.

Hors de ce discours pédagogique, « Guide-nous sur le Chemin-droit », sous la plume divine, devient une clause du pacte de la Fatiha. Une clause soumise par le Rédacteur à « la partie adverse ». Donc une promesse du Rédacteur, un engagement divin à guider l'humain. C'est ainsi que la guidance est « un droit que Dieu offre au croyant sur Dieu ».

A l'ouverture de la sourate 2, le Coran se présente : « Voici le Livre ! Il ne contient aucun doute, une guidance pour ceux qui craignent Dieu. » Pour l'exégèse, la promesse du verset 5 de la Fatiha est en partie satisfaite ici ; en partie seulement car la guidance ne vaut que pour les pieux ; celles et ceux qui ont la crainte de Dieu. Celles et ceux qui ont foi au ghaïb, le monde non sensoriel.

Si cette promesse est explicite dans le pacte de la Fatiha, elle est soumise à condition : elle ne vaut que pour celui qui en fait la demande. C'est pourquoi la dou’a est une pratique chevillée au cœur de la pratique islamique. Toute action qui commence par « bismillah » est une action qui s'inscrit dans le cadre de la promesse divine du verset 5 du pacte. Cette action reçoit l'onction divine, la barakat.

Ce verset 5 de la Fatiha fait de « bismillah » une prière au sens chrétien du terme ; une présentation de doléance. Et avec la promesse divine, cette doléance est acceptée d'avance. « Dieu entend toutes les requêtes du prieur repentant et Dieu promet d'y répondre » selon le verset 5 de la Fatiha. Et Sa réponse est la guidance. Car, en vérité, Dieu n'est pas un distributeur automatique de grâces, plutôt un Distributeur automatique de guidance ; Il est Ar-Rabb comme nous l'avons déjà expliqué !

Savoir demander à Dieu est une étape de l'éducation spirituelle

De tout temps, certains humains ont reçu des grâces à distribuer au nom de Dieu. Ils sont prophètes, ils sont les saints que l'on dit wali. Ces figures de la tradition sont les « proches de Dieu ». Proches au sens de la proximité avec un ami qui nous connaît et que l'on connaît. On sait quoi lui demander et comment lui demander ; il ne nous refuse pas son aide.

Les dou’as des prophètes et des wali sont toujours exhaussées. Mais Dieu n'étant pas un humain, Ses réponses à nos doléances ne suivent pas notre logique humaine. La guidance divine ne correspond pas à nos fantasmes, elle n'obéit pas à nos désirs ou même à nos besoins identifiés. Car un humain peut désirer du Coca-cola et la guidance divine lui proposer du sucre. Les amateurs le comprennent !

Savoir demander à Dieu est une étape de l'éducation spirituelle. Le préalable est de s'intéresser à soi afin de se connaître. Un humain peut être pieux, puissant, fort et savant en étant très ignorant de lui-même. C'est alors qu'il peut faire des choix sincères mais contraires à ses intérêts ou à l'intérêt du collectif humain. C'est ainsi que l'on s'engage à toute forme d'aberration.

La guerre est un exemple populaire de ces choix autodestructeurs que même le règne animal n'envie pas à notre espèce. S'il y a un mérite à la guerre, c'est d'exposer le degré de la cruauté qui sommeille en l'humain. Car, sans la guidance divine, l'être humain devient l'animal le plus dangereux sur terre.

Un groupe d'humains s'organise pour collaborer par Amour du service et du partage. En français, ce groupe est qualifié d'utopie. En ce XXIe siècle, l'espèce humaine investit des énergies colossales pour visiter la Lune ou la planète Mars, etc. Pendant ce temps, ces mêmes humains construisent des murs en béton et cernés de barbelés électrifiés pour se couper de leurs voisins dans le besoin. Ces contradictions ne sont pas des faits isolés à mettre au compte de peuplades attardées. Elles sont des choix de « sociétés évoluées ». Et quand le monde se réunit à Paris, en 1948, l'Assemblée générale de l'ONU adopte la Déclaration universelle des droits humains. Des signataires sont des pays colons. Des pays qui pillent, tuent et volent leurs semblables tenus en esclavage sur leurs propres terres.

En bref, l'être humain n'est pas encore accompli, « on est à un stade de chimpanzés mutants », dit le Français Christophe Allain, auteur de la série Journal d'un éveil du 3e œil. Pour lui comme pour l'immense majorité des maîtres spirituels, l'être humain vit dans la peur. Il évolue vers un état d'être plus lumineux, loin de la peur. La question est : comment sortir de la peur ?

Comment partir de l'état actuel à l'état de félicité humaine ? Ou tout simplement comment permettre à l'humain d'exprimer son plein potentiel ? Les réponses sont multiples depuis les monastères isolés en haute montagne jusqu'aux laboratoires sécurisés pour expérimenter des clonages humains. Entre ces extrêmes, se situent les idéologies politiques, les religions, les sectes, de tout bord.

Guider l'être humain, c'est guider un être qui dispose du libre arbitre

L'islam n'est pas en reste de ce tableau. Le modèle islamique est du Prophète qui incarne le Coran. L'évolution islamique suit l'exemple du Prophète. Sa langue, ses préférences alimentaires, son style vestimentaire, sa tombe, sa ville de naissance. Tout ce qui concerne le Prophète porte une onction de sacré au point de sombrer dans la singerie du Prophète comme les mouvements salafistes.

La guidance divine s'exerce dans toutes les directions, dit le Coran. Pas une feuille ne se détache de sa branche en plein forêt, sans l'aide de Dieu. Pas une goutte de pluie ne tombe sur un rocher sans Son accord. Pas un rayon de soleil ne nous parvient sans l'agrément de Ar-Rabb, le Seigneur unique.

Le bon comportement, l'attitude éthique, le choix qui fait le plus grand bien au plus grand nombre le plus longtemps possible ; l'être humain en est incapable. Dieu nous envoie des Prophètes pour nous ouvrir la voie. Le Prophète reçoit la guidance divine, il la transmet avec fidélité. Le pacte de la sourate Fatiha, la promesse divine, relève de cette guidance mais une guidance à un niveau spirituelle.

Guider l'être humain, c'est guider un être qui dispose du libre arbitre. Il peut accepter ce qu'il veut. Il peut faire n'importe quel choix à n'importe quel moment. Il peut même refuser de croire en Dieu et renoncer à Sa guidance. Il peut aussi, en toute sincérité, manquer de données, d'informations, pour se retrouver à faire des choix d'ignorants, contraires à ses intérêts sous le coup de ses passions.

Demander la guidance de Dieu est une chose à faire souvent et de préférence régulièrement. Un des objets de la salat en islam. Cinq fois par jour, le fidèle qui célèbre la salat récite la Fatiha à chaque unité de sa prière. Et l'unique demande positive formulée est : « Guide-nous sur le Chemin-droit », au verset 5. Une synthèse parfaite de tous les besoins du croyant. Car, en vérité, celui qui est guidé par Dieu se met à l'abri des turpitudes et il n'a rien à craindre en ce bas monde.

Il reste à identifier ce « Chemin-droit » vers lequel ou sur lequel Dieu a promis de nous guider. C'est l'objet d’une autre réflexion. Que Dieu accepte notre jeûne. Que Sa guidance comble notre ignorance et nous oriente vers ce qu'il y a de mieux pour nous. Que Sa paix et Sa miséricorde recouvre Ses Envoyés, leurs successeurs et ceux qui les aiment. Rendez-vous dans nos dou’as à l'heure de l'iftar.

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Diplômé d'histoire et anthropologie, Amara Bamba est enseignant de mathématiques. Passionné de… En savoir plus sur cet auteur