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Brexit : quelles conséquences pour l'économie et les minorités britanniques ?

Rédigé par Linda Lefebvre | Vendredi 31 Janvier 2020 à 12:30

           

Le Royaume-Uni, sous la direction de Boris Johnson, sera officiellement le premier pays à quitter l’Union européenne (UE) dès vendredi 31 janvier à 23h. Plus de trois ans après le référendum sur le Brexit, des conséquences immédiates sont attendues. Mais de nombreuses incertitudes, notamment sociales, demeurent.



Brexit : quelles conséquences pour l'économie et les minorités britanniques ?
Après 47 années d’un mariage chaotique et plus de trois ans de débats et de tractations houleuses qui ont coûté la place à deux Premiers ministres, le Royaume-Uni, qui a adhéré à la Communauté économique européenne (CEE) en 1973, se sépare définitivement de l’Union européenne (UE). Les experts s’accordent à dire qu’il est difficile d’établir un pronostic exact et exhaustif des conséquences de cette rupture. Une période de transition est instaurée jusqu’au 31 décembre 2020 afin que Londres et Bruxelles négocient le départ des différents accords et traités qui les lient.

Une période de transition pour négocier la sortie

Dans l’immédiat, c’est l’impact économique et financier qui est le plus mis en avant, avec une incertitude sur les marchés financiers. Le rayonnement européen qu’offrait Londres comme capitale de l’UE pour de grands investisseurs étrangers pourrait bien disparaître. Ainsi, de grandes entreprises chinoises ou encore américaines, qui avaient installé leur siège à Londres, seront alors amenés à déménager.

Quitter l’UE peut aussi impliquer de rompre avec tout le système de partenariats commerciaux conclus au niveau intracommunautaires et avec les partenaires de l’UE. Durant la période de transition, qui durera jusqu'à fin 2020, aucun changement n'est à prévoir : le Royaume-Uni conservera les avantages négociés avec l'UE. Il aura un an pour choisir de rester aligné sur les règles européennes ou de reconstruire son propre système d’accords commerciaux internationaux.

Le Royaume-Uni risque tout de même de perdre de son attractivité commerciale en raison d’une augmentation des taxes douanières. Selon l’Organisation mondiale du commerce (OMC), les exportations britanniques coûteront 7,2 milliards d’euros par an de droit de douanes supplémentaires, ce qui risque de faire fuir des investisseurs.

Un impact économique négatif à relativiser

Côté français, le Brexit aura des conséquences économiques et commerciales mitigées selon la société d’assurance-crédit Euler Hermes, qui a publié une étude en octobre 2019. Si celle-ci s'est inquiétée des éventuelles pertes à l'export des entreprises françaises, ces dernières ont finalement augmenté leurs gains à l'export vers le voisin britannique en 2019. A plus long terme, Paris pourrait attirer davantage de touristes que Londres et capter des investissements initialement tentés par le Royaume-Uni tandis que des emplois britanniques pourraient être relocalisés dans l’Hexagone.

Malgré les prévisions économiques négatives attendues suite au Brexit, le Fond monétaire international (FMI) a publié le 20 janvier son estimation de la croissance mondiale pour les deux années à venir. Le Royaume-Uni devrait avoir une croissance supérieure à celle de l’UE, avec 1,4 % du PIB, contre 1,3 % pour la zone euro en 2020.

Selon Nicolas Goetzmann, expert en macroéconomie interrogé par Le Figaro, « les prévisions apocalyptiques concernant le Brexit relevaient plus de l’argumentaire politique que des réalités économiques. (…) Le Royaume Uni vient de publier ses dernières statistiques concernant le chômage, 3.8 % soit environ la moitié de ce que nous avons dans la zone euro. Le taux d’emploi atteint 76.3 %, qui est un plus haut historique dans le pays. » « Le scénario tant redouté par les Européens, celui d’un Brexit qui tourne à l’avantage du Royaume-Uni est désormais probable », poursuit l’expert.

Il faudra véritablement attendre la fin de période de transition pour voir les effets concrets du Brexit en matière économique, commerciale, douanière ou encore de libre circulation. Sur ce dernier point, et pendant l'année 2020, rien ne change pour les voyageurs et les citoyens européens expatriés au Royaume-Uni en ce qui concerne leurs conditions. Ces derniers devront tout de même s'activer pour effectuer les démarches visant à obtenir un statut de résident afin de voir leurs droits protégés en 2021.

Des minorités fragilisées par le Brexit

Une autre conséquence qu'il importe de souligner est la montée des discriminations touchant les minorités ethniques depuis quatre ans. « Les minorités ethniques en Grande-Bretagne sont confrontées à un racisme croissant et de plus en plus manifeste, avec des niveaux de discrimination et d'abus qui continuent d'augmenter après le référendum sur le Brexit », soulignait un sondage publié dans The Guardian en 2018.

Ce constat a été effectué très tôt après le vote en 2016 par la Commission sur l’égalité et les droits de l’homme, une instance gouvernementale britannique, auteure d’un rapport sur l’augmentation des agressions racistes dans lequel elle a réclamé que des « mesures urgentes » soient prises.

L’universitaire britannique Salman Al-Azami estimait aussi dès 2016 que les Britanniques de confession musulmane, majoritairement contre la sortie de leur pays de l'UE, seront négativement impactés par le Brexit. La campagne référendaire avait été menée, tambours battantes, par les partisans de la sortie de l’UE, emmenés par l’extrême droite, sur fond de racisme, d’islamophobie et de xénophobie. En 2018, une étude de l’Université de Cambridge dévoilait qu’un tiers des pro-Brexit pensaient que l’immigration dite musulmane étaient un complot pour islamiser le Royaume-Uni, démontrant que les théories du complot, notamment celle du « grand remplacement », sont florissantes parmi les partisans du Brexit.

L'unité du Royaume-Uni en jeu

Avec le Brexit, une autre inquiétude a émergé : le Royaume-Uni, s'il choisit de se retirer de la Convention européenne des droits de l'homme, ne sera plus membre de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), réputée pour remplir le rôle de garde de fou en matière de protection des droits de l'homme et des minorités.

Dans un contexte d’incertitude sur les conséquences économiques du Brexit, les minorités ethniques sont les plus exposées à une dégradation de leurs conditions de vie. Le Brexit met véritablement à l'épreuve l'unité du Royaume-Uni, tant entre les communautés qu'entre les territoires. Les débats autour de l'indépendance de l'Ecosse et de la réunification des deux Irlande n'ont, en effet, jamais été autant discutés que depuis le Brexit, faisant planer la menace d'une dislocation du Royaume-Uni que Londres veut éviter à tout prix.

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