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Points de vue

Après la COP26, une occasion ratée pour la planète, faire de 2022 une année du sursaut climatique

Rédigé par Anouar Kbibech | Mercredi 29 Décembre 2021 à 11:55

           


Après la COP26, une occasion ratée pour la planète, faire de 2022 une année du sursaut climatique
Après deux semaines de négociations éprouvantes, les 200 pays réunis lors de la COP 26 à Glasgow ont fini par adopter un accord a minima pour accélérer la lutte contre le réchauffement de la planète, mais sans garantir de le contenir à 1,5°C, ni répondre aux demandes d'aide des pays pauvres.

Le texte a été adopté d'un coup de marteau du président de cette 26e Conférence mondiale pour le climat, Alok Sharma. D'une voix émue et les larmes aux yeux, il s'est dit « profondément désolé » pour des changements de dernière minute introduits sur la question des énergies fossiles à la demande de la Chine et de l'Inde.

Pourtant, quelques heures avant, il avait plus tôt estimé que l'accord « inaugure une décennie d'ambition croissante » en matière de climat. En effet, sur le point critique de la limitation des températures, alors que la planète se trouve selon l'ONU sur une trajectoire « catastrophique » de réchauffement de 2,7°C par rapport à l'ère préindustrielle, le texte appelle les Etats membres à relever leurs engagements de réduction plus régulièrement que prévu dans l'accord de Paris, et ce dès 2022. Mais avec la possibilité d'aménagements pour « circonstances nationales particulières », point qui a suscité les critiques des ONG sur les ambitions réelles du texte qui a été finalement adopté.

La sauvegarde de la planète, une cause vitale

Or, il convient de rappeler que, cinq ans plutôt, dans une déclaration historique à la veille de la COP21 à Paris, la Conférence des responsables de culte en France (CRCF) proclamait que l'Humanité s'était fourvoyée dans un rapport de domination et d’exploitation mortifère de l'environnement. Elle indiquait que nous sommes mis au défi de repenser et d'habiter autrement notre rapport à la création et à la nature. Aujourd’hui, ce plaidoyer pour la sauvegarde de la planète est plus que jamais d’actualité.

Dans la mesure où il n’y pas de deuxième planète, et donc pas de plan B, nous ne pouvons faire l’économie de revisiter nos modes de vie et de consommation, si nous voulons léguer aux générations futures une planète viable et pérenne.

En quelques années d’intervalle, dans le monde d’aujourd’hui et de demain, l’exigence écologique et environnementale n’est plus une option, elle est devenue une cause vitale !

Quel apport des musulmans à la sauvegarde de la planète ?

Dans la Déclaration islamique sur le changement climatique mondial, des savants et des dignitaires musulmans venus de plusieurs pays, réunis à Istanbul en août 2015, ont lancé un appel qui rappelle le comportement du Prophète Muhammad (paix et salut sur lui) envers l’environnement.

Il a déclaré et protégé les droits de tous les êtres vivants. Il a prohibé de tuer des êtres vivants pour le sport ou pour les loisirs. Il a appelé ses compagnons à économiser l’eau même lors des ablutions pour la prière. Il a interdit l’abattage d’arbres dans le désert. Il a établi des zones inviolables (haram) autour de La Mecque et de Médine, dans lesquelles les plantes endémiques ne pouvaient être abattues ou cueillies et les animaux sauvages ne pouvaient être chassés ou dérangés. Il a établi des aires protégées (himas) pour la conservation et l'utilisation durable des pâturages, de la couverture végétale et de la faune. Il a vécu une vie frugale, sans excès, sans déchets, et sans ostentation. Il mangeait de la nourriture simple, saine, qui ne comprenait de la viande qu’occasionnellement…

Il était, selon les mots du Coran, « une miséricorde pour tous les êtres ». Et nous, musulmans d’aujourd’hui, que faisons-nous pour la préservation de la planète ?

Plutôt que de se lamenter sur l’obscurité, allumons une bougie

Chacun de nous doit prendre conscience qu’il peut, et même qu’il doit être un acteur de la préservation de la planète. Il y a un proverbe arabe qui dit : « Au lieu de te lamenter sur l’obscurité, allume une bougie ! » Chacun d’entre nous, par son comportement individuel, peut contribuer à l’effort collectif qui doit être porté par la société toute entière.

A ce sujet, il convient de saluer l’initiative innovante de certaines mosquées qui commencent à montrer la voie par la mise en œuvre de la notion de « mosquées vertes », comme la mosquée de Massy.

Ces mosquées mettent en œuvre des concepts qui contribuent, par exemple, à la diminution de la consommation d’énergie, grâce à une coupole qui récupère de l’énergie solaire. Ces mosquées s’équipent, par exemple, exclusivement d’ampoules LED pour réduire la consommation de l’électricité. Il convient de démultiplier ce type d’expérience et de démarche. Les autres religions l’ont également compris et mettent en œuvre déjà des « églises vertes » ou des « synagogues vertes ».

De la même manière, la question de l’écologie et de la préservation de la nature devient de plus en plus un sujet d’intérêt majeur dans les pays musulmans. Par exemple, plusieurs organismes internationaux reconnaissent que le Maroc s'est fait un nom en tant que leader en matière de climat. En effet, les énergies renouvelables représentent près des 2/5e de sa capacité électrique. Certaines subventions aux combustibles fossiles sont progressivement supprimées et le pays revendique certains des plus grands projets d'énergie propre au monde. Aujourd’hui, la production locale d'énergie primaire est constituée à 96,6 % d'énergies renouvelables.

La prise de conscience est donc bien là ! Et le changement doit venir d’abord de chacun d’entre nous : « Allah ne modifie point l’état d’un peuple, tant que les gens le composant ne modifient pas ce qui est en eux-mêmes. » (Sourate Ar Ra’d, Le tonnerre, verset 11)

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Anouar Kbibech, ancien président du Conseil français du culte musulman (CFCM), est président du Rassemblement des musulmans de France (RMF).

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