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Points de vue

Réponse sur la supposée pédophilie du Prophète de l’islam

Rédigé par | Mardi 9 Juin 2020 à 11:30

           


Réponse sur la supposée pédophilie du Prophète de l’islam
Il ne se passe pas une semaine sans que des écrits n’émergent pour accuser le Prophète de l’islam de divers maux. Une des accusations graves portées à son endroit est sa supposée pédophilie en raison de son mariage avec Aïcha. Il s’agit de dire que le Prophète de l’islam s’est marié à l'âge de 52 ans avec une fillette âgée de 6 ans. C’est oublier la divergence fondamentale existante entre les sources, les savants et même les historiens renommés sur le sujet.

La question de l'âge d'Aïcha lors de son mariage avec le Prophète prend naissance dans plusieurs sources qui divergent. Le Coran n’indiquant rien sur le sujet, il a fallu se reporter aux traditions et aux dires (hadiths) du Prophète. Plusieurs contradictions peuvent alors être lues. D'abord, dans des recueils de hadiths comme le célèbre Sahih Al-Bukhari, l'âge rapporté d'Aïcha est de 6 ou 9 ans.

Il convient d'emblée d'affirmer que les hadiths ne sont pas toutes authentiques quand bien même elles sont référencées dans un recueil canonique. Des savants et des chercheurs ont, par ailleurs, déduit, par des raisonnements déductifs, que l'âge d'Aïcha lors de son mariage ne pouvait pas être de moins de 14 ans, voire de 16 ans, comme l’explique Qasim Rashid, écrivain et auteur du livre Extremist dans un article (ici
en anglais).

Aussi, en réalité, comme le rappelle Sir William Muir dans sa biographie sur le Prophète de l'islam, l'âge des femmes en Arabie ne correspondait pas à leur degré de maturité. Dans une société difficile, les femmes devaient s'adapter très vite et devenaient très promptement mâtures. Pour William Muir, Aïcha était non seulement mâture pour son âge mais également particulièrement vive d'esprit.

Une réflexion dénuée d’historicité et de contenu intellectuel

Mettons ensuite en perspective l'âge d'Aïcha avec les exigences sociétales européennes, plus particulièrement françaises avant 1974. Il convient en effet de rappeler que la question de l'âge minimum est une question sociétale qui a fait l'objet d'une évolution en fonction des mœurs de notre société. Dix-huit ans n'a pas toujours été l'âge minimum en deçà duquel deux personnes souhaitant se marier ne le peuvent pas. En réalité, en France, l'âge nubile a souffert de nombreuses évolutions.

La loi du 20 septembre 1792 a d'abord fixé le mariage avec l'autorisation parentale à 13 ans pour les filles et 15 ans pour les garçons. Le Code civil de 1804 a par la suite relevé quelque peu l'âge nubile puisque les filles ne pouvaient pas se marier avant l'âge de 15 ans alors que les garçons ne le pouvaient pas avant l'âge de 18 ans. L'objectif était d'éviter les mariages sur un coup de tête. Avec la loi du 21 juin 1907, la majorité matrimoniale est fixée à 21 ans. Puis, la loi du 5 juillet 1974 ramène la majorité civique et matrimoniale à 18 ans. Nous parlons, dans le cas du Prophète, du VIIe siècle après Jésus-Christ, si l'on devait reprendre le calendrier grégorien.

Plusieurs choses peuvent être déduites de ces évolutions législatives. D'abord, les femmes ont toujours eu le droit de se marier plus tôt : on le remarque notamment du passage de 13 à 15 ans, contrairement aux hommes. Par ailleurs, l'évolution a eu lieu dans un sens (vers une diminution) comme dans l'autre (vers une augmentation), ce qui dénote qu'il n'y a pas d'âge précis pour se marier et qu'il n'est pas possible de dire qu'à partir de tel ou tel âge une personne est apte à se marier. L'âge est nécessairement dépendant de l'évolution sociale.

Dans l'Etat de Californie, aujourd’hui, il n'y a aucun âge minimum afin de prononcer le mariage d'un homme et d'une femme à compter de l'instant où les parents y consentent. Or, nous savons de source sûre que les parents d'Aïcha avaient consenti à cette union. Cette question de l'âge minimum étant résolue, il faut désormais se consacrer à l'étude de l'âge réel d'Aïcha au moment de son mariage avec le Prophète de l'islam.

Un arrêt de la CEDH très clair

N’oublions pas non plus que la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) a déjà rendu un arrêt sur, précisément, des propos similaires qu’avait tenu une enseignante autrichienne qui se revendiquait spécialiste de l’islam. Au cours d’un de ses séminaires, elle a fait référence à Aïcha en estimant que le Prophète de l’islam s’était marié avec une fille de 6 ans.

La CEDH avait jugé, dans un arrêt E.S. c. Autriche en date du 25 octobre 2018, que les propos d’une autrichienne qui avait estimé que le Prophète de l’islam était un « pédophile » pour son mariage avec une fille de 6 ans ne relevaient pas de la protection de liberté d’expression et qu’ils en outrepassaient les limites que l’article 10 avait prescrites.

Les détracteurs du Prophète de l’islam n’ont qu’à bien se tenir et arrêter de clamer haut et fort qu’ils sont imprégnés de l’onction de la liberté d’expression pour insulter les Prophètes. Car leurs propos décortiqués, il n’en reste ni finitions, ni connaissance. Juste des pétards mouillés.


Asif Arif
Asif Arif est avocat au Barreau de Paris, auteur de plusieurs ouvrages sur l’islam, le terrorisme... En savoir plus sur cet auteur



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