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Politique

Présidentielle 2012 : les organisations musulmanes réagissent à la victoire de Hollande

Rédigé par | Mardi 8 Mai 2012 à 01:44

           

Au lendemain de la victoire de François Hollande, Saphirnews a souhaité faire réagir les responsables d’organisations musulmanes en France. A la différence notoire du Conseil français du culte musulman (CFCM) et de la Grande Mosquée de Paris, qui continuent de rester discrets, plusieurs organisations musulmanes de France ont déjà délivré leurs premières impressions. Toutes appellent de leurs vœux à une égalité réelle entre les citoyens et espèrent vivement que la nouvelle présidence se focalise, enfin, non pas sur la présence musulmane en France, mais sur les réelles préoccupations économiques et sociales de la population.



Les organisations musulmanes réagissent à la victoire de François Hollande à la présidentielle.
Les organisations musulmanes réagissent à la victoire de François Hollande à la présidentielle.
« Sarkozy, c’est fini ! » C’est un « ouf » de soulagement que pousse Samy Debah, président du Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF) au lendemain de l’élection présidentielle. La défaite de Nicolas Sarkozy désormais actée, il a « l’espoir de voir s’arrêter les discours qui ont divisé les Français pendant cinq ans et cette mise au pilori de la communauté musulmane, remettant en cause presque quotidiennement la présence musulmane dans notre pays ».

Du côté du Collectif des musulmans de France (CMF), c’est également avec « grand soulagement » de voir la période Sarkozy prendre fin « parce qu’elle a vraiment été marquée par l’arrogance, le mépris des classes populaires. » Quant à la xénophobie, « Sarkozy a été beaucoup trop loin (…) dans le traitement des étrangers, de l’islam », ajoute Nabil Ennasri, président du CMF, fustigeant « la dérive ultradroitière qu’il a donnée à son quinquennat et à sa campagne ».

François Hollande, une présidence « à surveiller »

Cependant, le CCIF comme le CMF restent sur leurs gardes. « Autant la présidence de Nicolas Sarkozy est à oublier, autant celle de François Hollande est à surveiller. Il faut être extrêmement vigilant vis-à-vis de cette nouvelle page de l’Histoire de France et sur les possibles dérives de cette présidence », affirme M. Ennasri, citant Manuel Valls, directeur de communication du candidat socialiste. La présence dans le futur gouvernement du député-maire d’Evry n'est pas souhaitée par M. Debah, en raison de « sa réelle hostilité vis-à-vis de la pratique des musulmans de France ». « Il est de ceux qui instrumentalisent la laïcité pour diaboliser la communauté musulmane », affirme le président du CMF.

« Ma crainte est que cet espoir ne soit en réalité qu’illusion et que la politique initiée par les gouvernements de droite ne devienne que le prolongement, sous une autre forme, de celle du gouvernement socialiste », ajoute le CCIF. Non seulement la présence de Manuel Valls l’inquiète mais il craint aussi que le projet de loi « anti-nounous voilées » soit remis à l’ordre du jour ainsi que d’autres projets « visant à restreindre davantage la visibilité des musulmans sur le champ politique ». « Ce sera aussi sur ces deux points qu’on va juger le réel changement dont souhaite se prévaloir le candidat Hollande », indique M. Debah.

L’UOIF et la Grande Mosquée de Lyon félicitent le choix démocratique

Du côté des fédérations musulmanes, on est plus soft. « La France est une démocratie et on ne peut que se féliciter du choix final du peuple, qu’il soit le résultat d’un vote d’adhésion ou de rejet de M. Sarkozy », souligne Ahmed Jaballah, président de l’Union des organisations islamiques de France (UOIF). « Nous espérons pour le nouveau président élu qu’il saura faire face aux défis et aux enjeux économiques et sociaux car la tâche n’est pas facile. Le pays connaît de grandes difficultés, nous lui souhaitons toute la réussite possible. »

Pour Kamel Kabtane, recteur de la Grande Mosquée de Lyon, rien n’est encore joué pour le PS, soulignant que l’écart entre les deux candidats est assez faible (51,6 % contre 48,4 %). « La France est divisée, cela va être très difficile à gérer compte tenu que la majeure partie des Français n’adhère pas à ses idées ». Tout dépendra « des résultats des législatives, si les socialistes vont avoir une majorité relative au Parlement qui puisse l’aider à réaliser ses promesses », ajoute-t-il. Le temps du rassemblement est venu.

Les musulmans plus mobilisés qu’hier

Le recteur de la Grande Mosquée de Lyon souligne aussi le dynamisme de la communauté musulmane lors de ces élections. De son expérience acquise sur le terrain, « l’abstention a été faible, cela prouve que lorsque la communauté musulmane se mobilise, elle peut faire pencher la balance, d’où la nécessité aujourd’hui d’appeler les musulmans à remplir leur devoir citoyen ».

Même constat pour M. Ennasri : « On est dans un élan politique, dynamique et prometteur, qui fait qu’élections après élections on est de plus en plus de musulmans à nous inscrire sur les listes électorales (…), soucieux de prend part au vote et d’avoir voix au chapitre. »

« On n’a jamais connu autant de stigmatisations que ces dernières années, (…) des moments où il a fallu montrer patte blanche en permanence, nous expliquer sur nos pratiques. Les musulmans ont été mis à rude épreuve, nous espérons que le nouveau candidat va nous étonner, apporter une contribution positive au pays et tenir ses engagements », poursuit le recteur de Lyon.

Oui à la laïcité et à l’égalité de traitement

L’UOIF, qui a été au cœur de polémiques à la suite de l’affaire Merah, ne devrait sans doute pas pleurer le départ de Sarkozy. « Nous avons déploré l’attitude politique du gouvernement dans le dossier de l’islam, qui n’a pas su toujours garder une certaine distance contrairement à ce qui a prévalu à l'égard des autres religions », finit par déclarer M. Jaballah.

« Que la laïcité soit respectée. On a entendu (de Hollande, ndlr) un discours qui affirme que tous les citoyens sont égaux et qu’ils doivent se sentir Français loin de toutes divisions : on espère que les actes suivront ce discours, que tout le monde partage », conclut-il. Oui au respect de ce principe, mais il ne devra pas être dévoyé à « des fins purement politiciennes pour attiser des peurs au sein de notre société et diaboliser une communauté », précise M. Ennasri.

UOIF, GML, CMF, CCIF... Tous leurs responsables attendent du nouveau président de la République que les musulmans soient respectés comme des citoyens à part entière au nom de l’égalité, qu’ils puissent pratiquer leur culte sans avoir à être montrés du doigt et participer à la construction du pays. Surtout ils l'appellent à s'atteler aux véritables problèmes des Français que sont le chômage, la crise économique ou encore les discriminations, dont fait partie intégrante l'islamophobie. François Hollande ne manquera pas de boulot.



Rédactrice en chef de Saphirnews En savoir plus sur cet auteur



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