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Société

'Cachan n'est qu'un révélateur d'une crise beaucoup plus large du logement'

Rédigé par Propos recueillis par la rédaction | Jeudi 24 Août 2006 à 15:40

           

Jean-Baptiste Eyraud est le président de l'association Droit au Logement. Il a suivi de près l'affaire des familles de Cachan, évacuées de force par la police après leur squat d'un immeuble. Pour mieux comprendre cette affaire, il nous explique les raisons du blocage actuel et les moyens d'en sortir.



Jean-Baptiste Eyraud est le président de Droit au Logement
Jean-Baptiste Eyraud est le président de Droit au Logement

Saphirnews.com : Quelle était la situation des familles de Cachan avant leur évacuation forcée ?

Jean-Baptiste Eyraud : Ces familles squattaient un immeuble qui appartenait à un loueur de logements à des étudiants du CROUS, une structure semi-publique. L’immeuble était promis à la démolition et comptait 400 chambres. Depuis quatre ans ces familles vivaient là dans des conditions assez précaires.

Des discussions ont été engagées pendant plusieurs mois avec la préfecture. Elles ont bloquées sur deux points. D’une part, la régularisation des sans-papiers ou la mise en place d’un processus de régularisation pour une partie d’entre eux sans fermer la porte aux autres. D’autre part, le relogement de tout le monde. Cette situation est classique avec des gens pauvres qui travaillent mais gagnent peu, ont besoin d’un logement social et, parmi eux, des sans-papiers.

La Préfecture a refusé et a enterré la discussion par une position assez dure qui a abouti à l’expulsion qui, pour nous, est venu bien à propos pour confirmer les propos du ministre de l’intérieur, tenus 48 h avant.

Dans quelles conditions ont-elles été évacuées ?

J-B E : Une cinquante de personnes de personnes ont été interpellées et placées dans des centres de rétention. La répression a été assez dure. La police a donné l’assaut, a chargé. Il y a eu des violences, des blessés. Des plaintes vont être déposées par les personnes qui ont été malmenées. Ce n’est pas normal. La police n’a pas le droit d’user de la violence si elle n’est pas nécessaire et là, en l’occurrence, elle n’était pas nécessaire. Il y a eu excès de violence.

Après les brutalités policières, il a eu une petite pause. Les autorités se sont rendues compte qu’elles ont été un peu trop loin. A partir de là, le maire de Cachan a proposé d’accueillir les familles dans un gymnase.

Les familles ont refusées les propositions de placement en hôtels que la préfecture et la mairie leurs ont faites. Pourquoi ?

J-B E : Parce que les hôtels sont éloignés les uns des autres. Les familles sont à la merci d’une rafle, d’un contrôle. D’ailleurs, celles qui ont acceptées d’être hébergées en hôtels, sont l’objet de harcèlements policiers. D’autre part, la vie de famille en hôtel est très difficile. On ne peut pas faire à manger. Il faut avoir de quoi acheter de la nourriture pas trop chère, autour. C’est très exigu, surpeuplement, ce n’est pas adapté à la vie de famille.

De plus, il y a un problème de précarité, de coût. Le jour où les chambres ne sont plus payées, les familles se retrouvent à nouveau dehors. C’est alors qu’un campement de deux cent personnes ont dormis dehors et le lendemain soir, la police a chargé.

Face à l’impasse actuelle, qu’envisagez-vous de faire ?

J-B E : Le comité de soutien auquel nous participons et qui regroupe de nombreuses autres associations, va organiser des manifestations, dont une importante ce samedi 26 août. Pour le reste, nous n’avons pas encore défini de marche à suivre. Ce que nous souhaitons, outre la régularisation et le relogement, c’est la scolarisation des enfants. La rentrée scolaire est proche et rien n’est prévu dans ce sens.

Cette affaire de Cachan n’est qu’un révélateur d’une crise beaucoup plus large du logement, qui profite aux marchands de sommeil. Ces personnes sont obligées d’aller vivre dans des squats car elles n’ont pas les moyens de vivre dans des logements de plus en plus chers.
Il faut que le gouvernement prenne des mesures efficaces en commençant par appliquer la loi de réquisition et arrêter d’expulser les familles par centaines. Il faut tout simplement que le droit au logement s’impose comme un droit fondamental. C’est ce que fait l’Ecosse depuis 2003, en mettant en place progressivement les conditions d’un droit au logement.





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