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Sur le vif

En Inde et au Pakistan, les juges musulmans plus cléments pendant le mois du Ramadan

Rédigé par Lionel Lemonier | Lundi 17 Avril 2023 à 13:00

           


Les juges musulmans sont-ils plus cléments pendant le mois du Ramadan ? Trois économistes se sont penchés sur la façon dont les juges s’acquittaient de leur tâche pendant le mois béni. Ils ont travaillé sur des données concernant les décisions rendues au cours du Ramadan depuis 70 ans par 917 juges pakistanais entre 1950 à 2016 et 7 668 juges indiens entre 1997 à 2018, soit environ 400 000 affaires judiciaires.

Publiés dans la revue Nature Human Behaviour le 13 mars, leurs travaux relatés dans Dialogues Economiques montrent que les juges musulmans sont plus cléments que leurs confrères pendant le Ramadan que le reste de l’année. Ils prononcent 40 % d’acquittement en plus. Par ailleurs, plus la durée du jeûne dans une journée est longue, plus ils sont cléments. Chaque heure supplémentaire par rapport à la moyenne augmente le taux d’acquittement de 10 %.

Les auteurs se sont également intéressés aux suites judiciaires puisqu'une décision de justice ne clôt pas forcément une procédure judiciaire. Or le taux d’appel et d’annulation des jugements prononcés par les juges de confession musulmane est plus faible durant le Ramadan. La longueur du jeûne influe aussi sur les chiffres, avec une baisse moyenne de 3 % pour le taux d’appel et de 5 % pour le taux d’annulation par heure supplémentaire de jeûne.

Deux explications à ce phénomène. Il y a d’abord l’influence, selon les auteurs, de « l’idée de clémence inhérente au rituel musulman ». Mais le jeûne peut avoir des effets positifs en lui-même « à travers la diminution de la graisse corporelle, du cholestérol, la stimulation de neurotransmetteurs se trouve associé à de meilleures capacités cognitives. Une amélioration de la mémoire et de la réflexion qui pourrait être bénéfiques aux juges ». Autrement dit, « ces valeurs indiquent que non seulement les juges musulmans sont plus cléments, mais aussi qu’ils prennent de meilleures décisions durant le Ramadan ». Une conclusion confortée « par un plus faible taux de récidives des individus acquittés sur cette période », selon les auteurs.

« Lors de la réalisation de l’étude, les chercheurs ont interagi avec des juges pakistanais qui avaient conscience d’être biaisés pendant le Ramadan », signale-t-on. « À leurs yeux, cet excès de clémence est même un problème. »

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