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Société

L’Etat face au racisme en Corse

Rédigé par Arif Kamar | Lundi 10 Janvier 2005 à 00:00

           

La tension est vive en Corse. Depuis plusieurs mois, les étrangers, et notamment les maghrébins installés dans la région vivent dans un pesant climat xénophobe. Ils sont face à des violences racistes répétées. Le préfet de Corse, Pierre-René Lemas, a dénombré une quarantaine d’actes racistes visant la communauté maghrébine, commis durant l’année 2004.



La tension est vive en Corse. Depuis plusieurs mois, les étrangers, et notamment les maghrébins installés dans la région vivent dans un pesant climat xénophobe. Ils sont face à des violences racistes répétées. Le préfet de Corse, Pierre-René Lemas, a dénombré une quarantaine d’actes racistes visant la communauté maghrébine, commis durant l’année 2004. 

Sur une population d’environ 260 000 habitants, l’île compte environ 40 000 étrangers, dont une forte population maghrébine et principalement marocaine (25 000). Ces derniers ont toujours eu bonne réputation. Ils sont considérés comme des travailleurs ' sans histoires '. Seulement, depuis un peu plus d’un an, la croissance du nombre d’agressions anti-arabes ternit l’image traditionnelle d’accueil de la Corse. La mention ' Arabi fora ' (' Les Arabes dehors ') fait désormais partie du paysage. Elle défigure l’île dite ' de Beauté '.

Une dérive nationaliste 

L’identité des auteurs de ces agressions pose question. Le champ des investigations est large. Des Corses nationalistes à l’extrême droite locale en passant par des mouvements extrémistes chrétiens. Il est sûr que la dérive nationaliste laisse place à des discours identitaires. Le mouvement Unita Naziunale défend ainsi l’idée du ' peuple corse, seule communauté de droit sur la terre de Corse '. Le groupe Clandestini Corsi (auteur de sept attentats anti-arabes et démantelés le 23 novembre par les enquêteurs), justifie son action par la lutte contre le trafic de drogue. Ainsi, sous couvert de lutte indépendantiste, certains mouvements voudraient structurer un véritable mouvement d’extrême droite.

La population se mobilise

Face à cette ascension xénophobe, la grande majorité des insulaires se montrent indignés et choqués. La population se mobilise pour participer aux manifestations de soutien aux victimes. Ce fut le cas à Calvi le 27 novembre, puis le 4 décembre à Sartène après l’attentat contre Mohamed El-Atrache, imam de village.

Mais jusqu’alors les pouvoirs publics n’avaient pas réagi de manière particulière à la dégradation de la situation sur l’île. La préfecture a organisé une ' Semaine de la Fraternité ' (du 13 au 18 décembre 2004) dans le but de sensibiliser les habitants à la tolérance et au respect. Cette initiative, quoique symbolique, constitue certainement une première étape dans la prise de conscience de la crise raciste qui secoue la Corse.

Les associations en appellent à l’Etat

La Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) a qualifié la Corse de région ' la plus touchée ' par le racisme dès le 15 mars 2000. Le malaise est encore plus grand face à l’absence de réactions des pouvoirs publics confrontés à ce problème. Comme le MRAP l’avait souligné en mai 2003, la manifestation du racisme risque de se trouver légitimée de fait par le défaut de sanctions à l’encontre des racistes.

La Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra) et SOS Racisme en appellent à l’Etat pour mettre en place des mesures efficaces. Fouad Alaoui, vice-président du Conseil français du culte musulman (CFCM) a demandé une ' protection de proximité des lieux de culte musulman en Corse '. Reste à savoir si l’Etat saura se montrer assez ferme pour faire comprendre que le racisme constitue un manquement grave aux valeurs de la République.





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