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Points de vue

Le gigantisme des mosquées met à mal notre pratique de l’islam

Par Fatima Adamou*

Rédigé par Fatima Adamou | Mercredi 4 Septembre 2013 à 15:55

           


22 millions d'euros, c'est le budget prévisionnel de la Grande Mosquée de Marseille : mais verra-t-elle le jour ?
22 millions d'euros, c'est le budget prévisionnel de la Grande Mosquée de Marseille : mais verra-t-elle le jour ?
Le mois de Ramadan est loin mais une certitude subsiste : c’est désormais le mois du profit pour tout le monde : des commerçants de produits agroalimentaires aux concessionnaires de voitures, des musulmans aux non-musulmans. Le mois de Ramadan rapporte de l’argent. Pour les musulmans, les bénéfices ne sont plus uniquement spirituels mais financiers.

Les dites nuits impairs, et en particulier la nuit du 26 au 27 ramadhân, sont devenues celles où les dirigeants de mosquée doivent faire du chiffre. Elles sont les occasions de récolter de grosses sommes d’argent pour financer des lieux de culte.

Depuis quelques années en France, on voit se profiler cette nouvelle tendance à l’occasion des prières du tarawih. Les responsables des mosquées invitent ou mobilisent des personnes afin d’animer une soirée de sollicitations aux dons afin de financer les constructions de mosquées, davantage spacieuses pour des fidèles de plus en plus nombreux durant les grands rendez-vous du mois de Ramadan ou la prière du vendredi.

En Angleterre, ce même phénomène se produit et s’étend sur les chaînes télévisées musulmanes. Les soirées durant ce mois sont consacrées aux appels aux dons.

Mosquées et chaînes télévisées appliquent les mêmes systèmes : les invités ou les guest stars commencent par rappeler l’importance du don en islam et ses bienfaits. Ils racontent de nombreux hadiths de façon à illustrer leurs paroles ; viennent ensuite les appels aux dons.

Dans les mosquées, les généreux donateurs ne restent pas dans l’anonymat : les animateurs n’hésitent pas à révéler leurs noms et à s’éterniser sur leurs éloges improvisés. Dans certains cas, seuls ces donateurs ont droit aux prières des fidèles présents pour récompenser leurs importantes donations.

À ce rythme, les mosquées durant le mois de Ramadan seront évitées par certains fidèles qui n’ont pas les moyens ou simplement parce qu’elles ne remplissent plus leurs fonctions principales : accueillir les prières en commun.

Durant ces nuits de Ramadan, des fidèles quittent la mosquée avant d’avoir pu prier tarawih, pire certains avant d’avoir accompli la dernière prière obligatoire isha en congrégation tant la collecte d’argent dure.

Les raisons de ces collectes – nobles soient-elles – ne devraient pas devenir centrales lors de ces nuits très spéciales.
Elles sont censées être celles durant lesquelles nos dévotions au Divin, nos demandes de pardon sont multipliées ; et ces collectes réduisent nos temps de prière même si certains imams tentent de rassurer, entre deux promesses de dons, que cela reste une forme de dévotion.

Mais cette marque de dévotion ne devrait pas nous pousser à commettre de fautes, des fautes ou des mauvaises inclinations que nous essayons de corriger durant ce mois de Ramadan.

Ces appels aux dons aux techniques quasi commerciales vont à l’encontre des recommandations de la discrétion dans le don. Ils mettent mal à l’aise ceux et celles qui ne sont pas en mesure de donner. Ils suscitent l’envie, la jalousie et poussent certains par orgueil à faire des promesses de dons qu’ils sont incapables d’honorer.

Ces dérives bien amorcées sont le signal d’alarme pour réfléchir à d’autres moyens de collecte de fonds et aux dimensions des mosquées : le gigantisme de certains projets demande des moyens colossaux.

Il faut vite réfléchir avant que ces nuits de prières ne se transforment en big show et opérations marketing dignes de grandes enseignes.

Finalement, en toile de fond de ces techniques agressives est la volonté de rester indépendant : ne recevoir d’argent ni de l’État ni de riche donateurs étrangers avec les risques d’ingérences que cela comporte.

Chaque musulman-e doit prendre part à la réflexion, chaque idée est importante. Les situations diffèrent toujours d’une région à l’autre, d’une commune à l’autre : les solutions sont parmi les fidèles.

Nous avons jusqu’au mois prochain de Ramadan pour y réfléchir. Ensuite pourrons-nous prier durant ces nuits spéciales pour le succès de ces projets.

* Tutrice de français en Grande-Bretagne, Fatima Adamou est également researcher bénévole à l'association Christian Muslim Forum.





Réagissez ! A vous la parole.

1.Posté par oum souleymene le 05/09/2013 11:13 | Alerter
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salem alaykoum chère sœur Fatima, c'est un important rappel que tu as fait. c'est compliqué et on réalise que ces méthodes sont surtout dues au manque de constance et de régularité de notre communauté : nous faisons des dons ponctuels et surtout durant le mois de ramadan, comme si les sadaquas n'étaient pas importantes durant les autres mois !nous sommes nombreux et pouvons donner tous les mois de petites sommes pour plusieurs projets d'ailleurs ! j'ai été très touchée cette année par ce problème et les dons annoncés de cette façon m'ont toujours gênée nous bravons des interdits ou en tous cas dépassons beaucoup de limites : le risque d'ostentation et donc que nos dons ne soient pas agréés par Allah, la colère des fidèles envers les organisateurs car ils n'ont pas pu prier à l'heure ou faire le quiyam durant les nuits du destin...bref, tu as raison il faudrait presque un moratoire où chaque fidèle se prononcerait et apporterait des idées pour que la collecte se fasse en douceur et soit davantage efficace. Le soucis est que les organisateurs ne sont pas toujours prêts à entendre les critiques qu'ils voient plus comme des ralentisseurs du projets cque comme une aide omme si ce projet était entre les mains oubliant ainsi que c'est Allah qui ouvrent les portes.
Kheyr inchallah, qu'ALLAH nous guide et nous aide à trouver des solutions avant le prochain mois de Ramadan !
Fraternellement.

2.Posté par Barry le 05/09/2013 23:54 | Alerter
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Très bon article, En 10ans l'ambiance dans les mosquées ont bien changées. Une cours à la plus grande et plus belle mosquée, Tanti que les coeurs et les comportements ne sont pas à la auteurs des principes de l'islam. On encourage les musulmans de toutes les nationalités pour la construction et ensuite la mosquée devient une mosquée consulaire.


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