Ramadan

Ramadan et TV : à chacun son programme

Rédigé par Mérième Alaoui | Mercredi 24 Juin 2015 à 08:05

La télévision, élément central de l’ambiance du ftour en famille, accompagne (ou pas) les jeûneurs selon les âges, les situations professionnelles et les habitudes.



Les feuilletons fleuves turcs remportent un large succès, grâce à un savant dosage entre modernité et respect des valeurs islamiques, clé du succès à l’export. Ici, la série « Dahsha » qui compte 30 épisodes. (Pohot : © D. R.)
Depuis plusieurs années, les feuilletons turcs ont inondé les chaînes maghrébines et donc la plupart des salons des familles musulmanes branchées sur le satellite. « Je les regarde déjà toute l’année mais, à chaque Ramadan, un nouveau feuilleton commence et c’est impossible de le rater », raconte Zakya, jeune grand-mère au foyer de 55 ans, à Dunkerque (Nord). Si les femmes sont souvent les plus attirées par les feuilletons, les maris ne sont pas en reste. « Ce n’est pas très courant mais mon époux retraité aime encore plus ces feuilletons que moi ! C’est comme s’il suivait les aventures de sa propre famille ou d’amis », confie Zakya.

Les mères de famille qui ne travaillent pas semblent être les plus consommatrices de télévision pendant le Ramadan. Notamment dans les moments creux de la journée. « Je regarde des émissions de cuisine qui nous donnent des idées pour le ftour du soir. Et, bien sûr, des programmes religieux avec des questions-réponses aux cheikhs », poursuit Rachida, maman de quatre enfants à Senlis (Oise). « Vraiment, il faut profiter du mois pour changer nos habitudes et ne pas perdre de temps », selon Zahia, 30 ans, fonctionnaire à Paris. Pour elle, le Ramadan est un moment avant tout religieux. Les programmes « spécial Ramadan » du Maroc, le pays de ses parents, est désuet. « Il n’y a que du folklore, des sketchs, de la musique… Mes parents y sont attachés car c’est aussi une sorte de retour aux sources. »

Avec ses longues journées de travail, la jeune femme préfère passer son temps libre à dormir, pour rattraper les très courtes nuits. Même réflexe du côté d’Aïssa, 23 ans, employé de mairie à Goussainville (Val-d’Oise). « Quand je rentre le soir avant le ftour, je dors ! Je n’ai pas du tout le temps ni l’envie de regarder la télévision », poursuit le Franco-Algérien qui assure qu’au Ramadan 2014 il n’a allumé son poste qu’à deux ou trois reprises.

L’Internet détrône la télévision

Les programmes de télévision pour Ramadan sont souvent très liés au monde arabe. Hadiatou, d’origine guinéenne, ne connaît pas du tout la culture du feuilleton ou autres émissions spéciales. « À la maison, au moment de la rupture, on regarde la chaîne saoudienne avec les prières de La Mecque en direct. Ensuite, on passe à la télévision française », poursuit la juriste de 26 ans. Pas de téléviseur non plus pour Muriel, convertie de 28 ans, d’origine antillaise. « Ma conversion n’est pas encore totalement acceptée par ma famille, donc je préfère rester discrète. De façon générale, je ne regarde plus trop la télévision, sûrement par manque de temps, alors que je suis une adepte des séries américaines », explique la jeune chargée des ressources humaines qui a choisi l’islam en 2009.

Les séries américaines en streaming, c’est justement le petit plaisir que s’accordent certains jeunes jeûneurs, en particulier ceux qui ne travaillent pas ou qui sont en vacances scolaires. « Parfois les journées sont quand même très longues… Pour ne pas trop m’ennuyer, je télécharge plusieurs épisodes d’une série et je les regarde à la chaîne sur mon ordi », raconte Walid, 19 ans, sans emploi à Amiens (Picardie).

Qu’ils travaillent ou qu’ils soient sans activité au Ramadan, la grande majorité des jeunes générations surconsomme Internet et les réseaux sociaux. « C’est vrai que je suis beaucoup plus branchée sur mon smartphone pour Facebook que le reste de l’année. Je regarde les dernières actus muslim en France et dans le monde, des vidéos… J’échange aussi des nouvelles avec des amies et la famille qui jeûnent », précise Zahia. Hadiatou est particulièrement fan des applications iPhone spécifiques, pour trouver la mosquée la plus proche par exemple. « J’utilise beaucoup WhatsApp pour communiquer en groupe avec mes copines. Cette année, je vais surveiller les nouvelles applis qui vont sortir pour Ramadan. »

Moins de télévision et davantage d’Internet. Pour les plus jeunes, la période de Ramadan semble accentuer des habitudes déjà installées.