Société

Interdiction des abayas : un lycée en grève contre une « politique islamophobe » qui voile les véritables problèmes de l'école

Rédigé par Benjamin Andria | Lundi 4 Septembre 2023 à 20:05

A Stains, un lycée a décidé de faire grève pour dénoncer, en cette rentrée scolaire, « la politique islamophobe du gouvernement », illustrée par l'interdiction des abayas et des qamis à l'école. Il exige par-dessus tout, des moyens urgents afin que les personnels éducatifs puissent faire leur travail dans de bonnes conditions.



© Lycée Maurice Utrillo de Stains
« Nous n'acceptons pas de voiler le manque de moyens, pas de rentrée au lycée (Maurice) Utrillo ! » Le personnel de cet établissement scolaire implanté à Stains, en Seine-Saint-Denis, a decidé, lundi 4 septembre, d'entamer pendant la semaine de la rentrée scolaire une grève pour dénoncer les « débats stigmatisants » autour des abayas qui voilent le « manque d'investissement » du gouvernement dans le secteur éducatif.

« Pour cette rentrée, notre établissement, pourtant inscrit en politique de la ville, perd 60h de cours, un poste de conseiller principal d'éducation », tandis que « le demi-poste de technicienne de laboratoire n'est toujours pas pourvu, tout comme celui d'infirmier-e, et que les élèves en filière professionnelle seront 30 par classe au lieu de 24 », signale le personnel dans un communiqué. Une réalité partagée « bien sûr avec de nombreux autres lycées ».

« La promesse du gouvernement de garantir le bon fonctionnement des établissements scolaires et la présence d'un enseignant par classe n'est rien de plus qu'un mensonge d'État. Dans nos établissements, le gouvernement coupe les fonds nécessaires à la réussite des élèves et compense ce manque d'investissement par des débats stigmatisants. Une double violence pour nos élèves », assure-t-on.

C'est pourquoi une grève sera entamée dès mercredi 6 septembre pour dire non à « la politique islamophobe du gouvernement » et « exiger les moyens pédagogiques et éducatifs (leur) permettant de travailler correctement ». Un rassemblement est prévu ce même jour devant le lycée pour marquer le coup.*

Des débats qui éloignent « fondamentalement » les personnels « de (leur) mission de service public »

« Au lieu d'œuvrer à la diminution (des) inégalités et au lendemain de la mort terrible du jeune Nahel — qui nous a aussi rappelé les violences quotidiennes que nos élèves peuvent vivre —, le gouvernement relance un nouveau débat autour de l'élargissement de la loi de 2004 visant l'interdiction de l'abaya et du qamis, dénonce le personnel. Les politiques qui organisent le manque de moyens, de financement et de personnel s'accompagnent de politiques racistes qui portent un regard de suspicion sur nos élèves. »

Les grévistes, qui refusent de faire « la police du vêtement », entendent ainsi « alerter sur la manière dont les principes de laïcité sont appliqués dans nos établissements et les excès qui peuvent en découler » et dénoncer des « débats incessants » pointant les jeunesses populaires « une fois encore suspectées de "tester la République" ».

Or « nous parlons ici d'adolescents et d'adolescentes et qu'on ne peut politiser toutes formes de remise en question du cadre scolaire de leur part. (...) Accentuer la pression sur ces questions ne peut que dégrader les relations avec nos élèves, briser la confiance nécessaire entre les actrices et acteurs de l'éducation, les élèves et leurs familles, mais aussi et surtout nous éloigner fondamentalement de notre mission de service public : accueillir nos élèves, toutes et tous sans discrimination, assurer leur éducation et leur construction civique pour permettre leur émancipation ».

Avant de conclure : « Nous refusons d'organiser la misère dans nos établissements : si nous n'avons pas les moyens d'accueillir nos élèves dignement, il n'y aura pas de rentrée. »

*Mise à jour jeudi 7 septembre : Le lycée Utrillo de Stains reconduit sa grève : « Nous demandons des moyens, pas des élèves discriminés »

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