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Canada : cinq ans après l'attentat à la mosquée de Québec, l’urgence d'agir contre l'islamophobie soulignée

Rédigé par Lionel Lemonier | Vendredi 28 Janvier 2022 à 17:25

A l'heure du cinquième anniversaire du massacre commis à la grande mosquée de la ville de Québec, un rapport sur l'islamophobie révèle les dégâts causés par la haine de l'autre chez les Canadiens musulmans. Islamic Relief Canada, qui le publie, appelle le gouvernement fédéral à prendre des initiatives concrètes pour combattre le mal à la racine.



Le 29 janvier est proclamé, depuis 2021, Journée nationale de commémoration de l’attentat de la mosquée de Québec et d’action contre l’islamophobie au Canada. Jeudi 27 janvier, à deux jours du cinquième anniversaire du massacre survenu au Centre culturel islamique de Québec (CCIQ), l’organisation caritative Islamic Relief Canada a dévoilé un rapport intitulé « In Their Words » (Avec leurs mots).

Constitué à partir d’interviews, le rapport jette une lumière crue sur la façon dont l’islamophobie affecte quotidiennement les Canadiens musulmans. « On entend souvent parler d’islamophobie après de violentes agressions (à l'image de l'attaque de London en juin 2021, ndlr), mais ce qui est moins connu, ce sont les incidents et les micro-agressions que les musulmans subissent régulièrement dans leur vie quotidienne et en tout lieu. Dans ce rapport, nous avons voulu partager leurs histoires et dévoiler les effets à long terme de toute cette haine », indique Reyhana Patel, responsable de la communication et des relations avec le gouvernement pour Islamic Relief Canada.

Une islamophobie particulièrement genrée

Le rapport compile des témoignages significatifs de musulmans issus de tous les milieux et de toutes les provinces canadiennes. C'est l'histoire d'une victime de l’attentat de la grande mosquée de Québec, Aymen Derbali, qui a reçu sept coups de feu et se retrouve paralysé et incapable de subvenir aux besoins de sa famille. Celle d'un sportif qui a été obligé d’arrêter de participer à des compétitions pendant un moment parce qu’il était discriminé et essuyait des propos racistes.

C'est encore celle une d'enseignante au Québec à qui on a demandé d’enlever son voile pendant la classe en vertu de la loi 21. Cette loi interdit aux fonctionnaires québécois de porter des symboles religieux. L’enseignante a refusé et a failli perdre son travail. Ou bien celle d'une habitante de l’Ontario qui, parce qu’elle porte le hijab, fut attaquée physiquement et verbalement sur un campus universitaire.

L’un des points clés de ce rapport est la démonstration que l’islamophobie n’est pas seulement systémique et normalisée, elle est également « genrée ». Proportionnellement, les femmes sont beaucoup plus nombreuses à en être victimes que les hommes.

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Le rapport met aussi l’accent sur les conséquences à court ou long terme pour les victimes. Certaines en ressortent choquées ou sont affectées de troubles physiques ou mentaux. Elles peuvent développer un état de stress permanent qui affectent leurs relations au travail comme avec leurs amis ou la famille. Islamic Relief Canada réitère en conséquence son appel aux autorités à prendre immédiatement toutes les actions nécessaires pour combattre les causes profondes de la haine antimusulmane, que ce soit sur le terrain ou à travers une législation adéquate.

Cinq ans après, des actions de solidarité nombreuses

Islamic Relief Canada fait partie, avec le CCIQ et le Conseil national des musulmans canadiens (NCCM), des organisations à l'initiative de la Campagne du Carré Vert qui a lieu durant la semaine précédant le 29 janvier pour commémorer les victimes et les survivants de l’attaque de la mosquée de Québec. Le « carré vert » représente les tapis verts de la grande mosquée de Québec sur lesquels les victimes du terroriste se tenaient pour prier. Un symbole pour dire que les défunts sont, « si Dieu le veut, dans un jardin vert, dans un meilleur endroit depuis qu’ils nous ont quitté ».

La campagne invite donc les internautes à « faire leur part » dans la lutte contre l’islamophobie, la haine et la violence au Canada. Plusieurs méthodes sont proposées, parmi lesquelles :

• Créer son propre carré vert avec un morceau de feutre vert à épingler sur ses vêtements « en solidarité avec les six veuves, les dix-sept enfants sans père, Aymen Derbali qui est paralysé à vie, et chaque personne subissant les conséquences de cet acte de violence haineux et ignoble ».
• Réaliser et publier une vidéo personnelle pour présenter les mesures à prendre pour rendre le Canada plus sûr pour tout le monde.
• Obtenir des autorités locales l’illumination en vert des institutions et des monuments dans la nuit du 29 janvier.

Des initiatives citoyennes en place

Des citoyens prennent aussi des initiatives pour compléter les grandes campagnes organisées par les ONG. C'est le cas d'Asim Hussain, écrivain, cinéaste et réalisateur canadien, qui propose aux Canadiens et au monde entier de se lever contre l’islamophobie à travers une histoire déposée sur un site dédié. « Écris une lettre digitale en souvenir des victimes de la grande mosquée de Québec » avant le 29 janvier, est-il indiqué sur le site islamophobia.io, du nom de sa campagne.

A travers cette initiative, il invite le plus grand nombre à montrer leur solidarité avec les victimes du massacre de la mosquée de Québec, en racontant une histoire personnelle. « Je voulais faire quelque chose rapidement. Une initiative qui pourrait induire des changements immédiats, dit l’artiste au site New Canadian Media. J’ai inventé cette campagne pour pousser les gens à réaliser quelque chose de concret, plutôt que de se contenter d’en entendre parler. » Son initiative permet aux musulmans de témoigner et d'honorer la mémoire des victimes, et aux autres citoyens canadiens d’apprendre des musulmans l’importance et l’intensité de l’islamophobie.

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