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Société

Hassen Chalghoumi, une caricature de l’islam de France appelée à démissionner

Le maire de Drancy dans la ligne de mire

Rédigé par | Jeudi 14 Juin 2012 à 00:00

           

Hassen Chalghoumi est sans doute l’imam le plus contesté de France parmi les musulmans. A la seule évocation de son nom, il suscite l'exaspération au sein de la communauté. Une pétition exigeant sa démission immédiate du poste de président de l’Association culturelle des musulmans de Drancy a été lancée la veille du premier tour des législatives, à l'attention notamment de Jean-Christophe Lagarde, maire de Drancy qui brigue un nouveau mandat de député et qui a toujours soutenu M. Chalghoumi. Appelés à réagir, les deux protagonistes visés dans la pétition ont accepté de donner leur opinion sur Saphirnews.



Hassen Claghoumi, président de l’Association culturelle des musulmans de Drancy, et Jean-Christophe Lagarde, maire de Drancy et député sortant
Hassen Claghoumi, président de l’Association culturelle des musulmans de Drancy, et Jean-Christophe Lagarde, maire de Drancy et député sortant
Hassen Chalghoumi agace au plus haut point des responsables associatifs musulmans. Surnommé « l’imam de Drancy », « l’imam des juifs » ou encore depuis peu « Charles Roumi », l’homme, âgé de 40 ans, a réussi à s’imposer dans la médiasphère comme un « représentant » de l’islam de France. Un représentant mal choisi pour ses coreligionnaires tant son niveau de français est médiocre mais qui est régulièrement invité sur les plateaux télévisés pour dénoncer les « malgames » sur les musulmans que lui-même entretient à l'occasion des débats UMPistes sur la laïcité ou le niqab (voile intégral), dont il est aujourd'hui un opposant acharné.

Au nom de l’amitié judéo-musulmane, Hassen Chalghoumi consent à ne dire mot qui fâche à l’égard du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF). Sa proximité étroite avec cette organisation, qui se réclame ouvertement pro-israélienne, et son silence quant aux exactions que subissent les Palestiniens ont parachevé l’image, pour ses détracteurs, de pantin au service de l'Etat hébreu. Un pays dans lequel il s’est rendu plusieurs fois par le passé, dernièrement du 5 au 7 juin dernier, officiellement pour participer à un forum sur la laïcité, de la démocratie et de la religion, organisé par l’ambassade de France en Israël. Et, soit dit en passant, pour « honorer le travail du CRIF », a-t-il déclaré devant des journalistes lors de son séjour.

Aux côtés de Richard Prasquier, président du CRIF.
Aux côtés de Richard Prasquier, président du CRIF.

Une campagne de pétition anti-Chalghoumi lancée

Les voix de ceux qui espèrent ne plus le voir exercer sa fonction de président de l’Association culturelle des musulmans de Drancy (ACMD), qui lui permet de bénéficier d’une certaine légitimité aux yeux des représentants politiques, du CRIF et des médias malgré son manque certain de crédibilité, sont plus audibles. A l’initiative d'un mouvement à ce jour informel qui réunit une quinzaine d'intellectuels et de militants associatifs, une pétition appelant à la démission immédiate de Hassen Chalghoumi a été lancée samedi 9 juin et fait du bruit.

Au mercredi 13 juin, plus de 750 signatures ont été récoltées. Parmi les premiers signataires figurent celles de Nabil Ennasri, président du Collectif des musulmans de France (CMF), Abdelaziz Chaambi, président de la Coordination contre le racisme et l’islamophobie (CRI), Omar AlSoumi, membre du Mouvement de la jeunesse palestinienne (PYM), Almamy Kanouté, cofondateur du mouvement Emergence ou encore Rokhaya Diallo, membre fondatrice des Indivisibles.

Déboulonner Chalghoumi, première étape pour « l’indépendance du culte musulman » en France

« M. Chalghoumi n’a eu de cesse de servir le pouvoir en place (lorsque Nicolas Sarkozy était président, ndlr) contre les intérêts légitimes de la communauté musulmane à exercer son culte de manière indépendante et paisible », lit-on dans la pétition. Ses actes « dénotent une compromission avec un pouvoir dévoyé. Ils sont totalement incompatibles avec l'exercice de responsabilités » au sein de l’ACMD, « qui a vocation à permettre l'affirmation d'un islam empreint des valeurs de dignité, d'éthique, de justice et de liberté », poursuivent les initiateurs du texte.

Pour ces derniers, qui dénoncent l’instrumentalisation de la laïcité à des fins de « domestication du culte musulman », l’éviction de Hassen Chalghoumi est une première étape dans « l’indépendance du culte musulman en France contre toutes les ingérences, qu’elles émanent du pouvoir en place, du CRIF ou de l’islam consulaire ».

Chalghoumi ne veut pas « entrer dans leur jeu »

Appelé à réagir sur cette pétition, Hassen Chalghoumi nous déclare ne pas vouloir « rentrer dans leur jeu ». « Ils (les initiateurs du texte, ndlr) font ce qu’ils veulent, cela ne me regarde pas », affirme-t-il d’emblée. « S’ils veulent faire des actions pour rassembler, oui bravo, mais de faire la zizanie et râler… c’est à cause de ça qu’on n’avance pas. Mais chacun est libre, c’est la démocratie. »

Il les accuse toutefois de « diffamation » et de « chercher la fitna », la discorde. Sur ses relations avec le CRIF, il affirme ne pas être financé par cette organisation. « Il n’y a pas un centime qui rentre dans la mosquée ou dans mon ventre du CRIF et qu’Allah en témoigne. Pour moi, le CRIF est un institut français, qu’il ait une relation avec tel ou tel, cela ne me regarde pas. Allez critiquer directement le CRIF dans ce cas-là, faites votre combat contre lui. (…) Je joue le rôle d’un homme pacifique qui s’ouvre vers les autres, basta ! ». Quant à son dernier voyage à Israël, il dit être aussi « parti en Palestine » où il a « soutenu (ses) frères » et qu’il a « fait une khutba à Akka », un sermon dans une mosquée à Saint-Jean d’Acre, pour dire que ses détracteurs ont « tort » de penser qu’il est à la solde du CRIF.

« Dans les pays arabes, ils se révoltent pour avoir leur liberté et ceux là ne connaissent pas le sens de la liberté. Un homme de foi est libre, on peut avoir des avis divergents (…) en se respectant », conclut-il.

Vivement critiqué, le député-maire de Drancy prend ses distances

Ce n’est pas un hasard si la pétition est lancée durant la période des législatives. Outre Hassen Chalghoumi, est nommément visé Jean-Christophe Lagarde, qui a pris le soin de choisir le Tunisien pour diriger la mosquée Al-Nour en 2008, dont les locaux appartiennent à la municipalité. A l’heure des législatives, cette campagne contre Hassen Chalghoumi s’est transformée en une campagne contre le maire de Drancy, qui brigue un nouveau mandat de député dans la 5e circonscription de Seine-Saint-Denis englobant Bobigny, Drancy et Le Bourget sous l’étiquette du Nouveau Centre, proche de l’UMP.

Jean-Christophe Lagarde, « centriste de droite, maintient depuis 2008 le très controversé Hassen Chalghoumi à ses côtés (…). Ce faisant, il expérimente ce que Nicolas Sarkozy préconisait au niveau national : subventionner le culte musulman pour mieux le domestiquer. Le tout dans le mépris de la loi de 1905 », expliquent les initiateurs de la pétition.

Joint par Saphirnews, Jean-Christophe Lagarde prend ses distances et ne témoigne pas – du moins publiquement – d’un soutien particulier à l’égard de Hassen Chalghoumi. « J’ai lu la pétition, elle ne me regarde en rien. Je ne suis pas chargé d’organiser les relations et les bagarres entre les musulmans qui sont incessantes, ici comme ailleurs. Je vois qu’il y a des tas de mensonges dedans d’ailleurs : M. Chalghoumi ne dépend en rien de la mairie et Drancy », nous déclare-t-il. « Je trouve choquant qu’un représentant de l’Etat ou un élu devrait avoir à se mêler de ce qui se passe au sein d’une religion », ajoute-il, récusant les accusations selon lequel il instrumentalise la laïcité pour servir ses intérêts.

A la création de l’ACMD en 2005, « ils s’entendaient tous bien. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas mais ce n’est pas mon affaire. Moi qui ne suis pas musulman, je ne vais pas me prononcer sur leurs relations entre eux. » On réclame sa démission ? Alors ce n'est pas lui qu'il faut voir : « c’est au sein de cette association qu’ils doivent régler leurs affaires. Je dirais la même chose pour une association sportive sauf que là, c’est plus délicat dans la mesure où la loi de 1905 fait que je n’ai pas à me prononcer de la vie religieuse de quelque religion que ce soit. »

Quant aux relations qu’il entretient avec Hassen Chalghoumi, il déclare qu’elles sont « les mêmes que celles avec d’autres responsables d’associations à Drancy » sans vouloir nous en dire plus. « Je refuse d’être partie prenante dans un débat qui concerne les musulmans » ni sur les divergences d’appréciation de l’imam. Autant de manières de ne pas se mouiller face à l'opinion publique à l'heure des législatives.

Aux Drancéens musulmans de se mobiliser

Alors que l’UMP a été battue à plates coutures au second tour de la présidentielle (66,4 % pour François Hollande), Jean-Christophe Lagarde, soutien de Nicolas Sarkozy, a récolté au premier tour du 10 juin 43,5 % des voix contre 20,6 % pour sa rivale socialiste Milouda Latrèche. Une victoire qui semble à portée de main pour le maire, qui nous déclare être serein : le report des voix vers le PS ne l'inquiète pas.

L’image négative dont pâtit Hassen Chalghoumi rejaillit par ricochet sur le maire et un bras de fer commence très doucement à s'engager. La campagne anti-Chalghoumi prend forme sur la Toile. Le plus difficile est encore de la voir se concrétiser sur le terrain avec les Drancéens. Si de nombreux fidèles habitant la commune ont déjà déserté la mosquée Al-Nour en raison des polémiques qui entourent son président, le lieu de culte continue d'amener du monde lors des prières du vendredi.

Pour accéder à la pétition, cliquez ici



Rédactrice en chef de Saphirnews En savoir plus sur cet auteur



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