Société

Voile intégral : une polémique bien contagieuse

Rédigé par Leïla Belghiti | Jeudi 22 Juillet 2010 à 00:36

Le tintamarre autour du voile intégral, dont le coup d'envoi a été donné par la France il y a bientôt un an, commence à gagner nos voisins européens et même l'un de nos partenaire politiques et économiques musulman privilégié : la Syrie, qui a décidé d'interdire depuis dimanche le port du voile intégral dans ses universités.



Critiqué de toutes part pour son projet de loi sur l'interdiction du voile intégral dans l'espace public, notamment par le Conseil de l'Europe, l'Hexagone, fébrilement, attendait le soutien d'un quelconque ami musulman.

La Syrie s'est donc prêtée au jeu pour porter le fardeau de la légitimité française d'une telle loi, en interdisant depuis dimanche à ses étudiantes de porter la tenue intégrale au sein de ses universités. À quel prix, ça, on ne le saura pas (encore)...

Déjà en juin, 1 200 enseignantes du primaire, qui arboraient le voile intégral, avaient été mutées dans des services administratifs. Motif avancé : des plaintes de parents qui demandaient à ce que «  leurs filles soient éduquées dans des lieux dépourvus de tout extrêmisme », justifie le ministre de l'Éducation supérieure.

En 2009, alors que le débat battait son plein en France, l' université du Caire en Égypte avait voulu interdire l'accès des salles d'examens aux filles voilées intégralement, stipulant que ce vêtement pouvait favoriser la triche. Idem en Jordanie, qui tente de le faire interdire pour cause qu'il y a eu des cas où des voleurs se cachaient dessous.

Le port du voile intégral au Proche-Orient est pratiqué depuis des décennies par une minorité de femmes musulmanes. Certains constatent une recrudescence de cette forme d'extrémisme religieux.

Discorde

En Europe, les gouvernements sont divisés. En Espagne ainsi qu'en Grande-Bretagne, une proposition de loi similaire à la proposition française, au nom de la protection des droits de la femme, a été déposée.

Rejetée mercredi par le Parlement espagnol, elle le serait aussi très probablement en Angleterre, où la majorité des parlementaires y sont réticents.

Le porte-parole du Premier ministre britannique David Cameron a indiqué, lors d'un point presse, que la position de ce dernier « est que cela doit être un choix personnel ».

« Dire aux gens ce qu'ils peuvent ou ne peuvent pas porter quand ils marchent simplement dans la rue est une manière de procéder qui n'est pas britannique. Nous sommes une société tolérante, pratiquant le respect mutuel », a affirmé pour sa part le ministre de l'Immigration Damian Green.

Les musulmans peinent à se faire entendre

Bien que cette pratique marginale soit dénoncée par une majorité de musulmans européens, ils ne sont pas pour autant favorables à une loi répressive.

Les intellectuels et responsables religieux musulmans, à l'instar du CFCM, en appellent au dialogue.

« N'allez pas dans [la direction d'une loi] , parlez plus d'éducation, de psychologie, de changement de mentalités. Cela prend du temps, mais, pour moi, nous pouvons faire le travail en tant que musulmans en affirmant que la burqa et le niqab ne sont pas des exigences islamiques », avait estimé l'islamologue Tariq Ramadan depuis la prestigieuse université d'Oxford, en avril dernier. Une position qui a bien du mal à se faire entendre.