Religions

Covid-19, climat, paix : à l'heure du G20, une meilleure collaboration entre leaders politiques et religieux prônée

Rédigé par Myriam Attaf et Lina Farelli | Samedi 21 Novembre 2020 à 08:00

A l'heure où les dirigeants du G20 sont amenés à se réunir lors d'un sommet organisé les 21 et 22 novembre, le Forum interreligieux du G20 a adressé une série de recommandations aux décideurs politiques les encourageant à collaborer davantage avec les institutions religieuses en faveur d’un monde plus juste et écologique à l’aune de la crise sanitaire liée au coronavirus.



© Pixabay / John Hain
« Jamais auparavant, nous n'avons constaté un besoin aussi urgent pour les communautés religieuses de travailler avec les dirigeants politiques afin de relever les défis sans précédent et interdépendants auxquels le monde est confronté aujourd'hui. Si elles sont mises en œuvre, les recommandations de collaboration fournies aux dirigeants du sommet du G20 nous aideront à donner du pouvoir aux gens, à sauvegarder la planète et à façonner de nouvelles frontières. » Tels sont les mots du professeur Cole Durham, président de l'Association du Forum interconfessionnelle du G20, pour faire valoir auprès des décideurs politiques les conclusions du rapport rendu par son organisation.

Le Forum interreligieux du G20 est une plateforme dans laquelle un réseau d'institutions liées aux religions s'engage sur des agendas mondiaux du Groupe des 20,* qui se réunit samedi 21 et dimanche 22 novembre à Riyad, en Arabie Saoudite, sous un format virtuel à l'heure de la crise mondiale du Covid-19. Quelque 2 000 représentants de cultes issus de 90 nations se sont associés ces derniers mois autour de l’élaboration d’un rapport qui rassemble des recommandations visant à répondre aux défis et aux enjeux économiques, sanitaires, économiques, climatiques et culturels actuels rencontrés à l’échelle internationale.

Focus sur la crise sanitaire et ses conséquences

L’un des premiers chevaux de bataille du Forum est naturellement la lutte contre la pandémie et ses effets. Le Forum interreligieux du G20, avec le concours de l'Alliance des civilisations des Nations unies (UNAOC), du Centre international pour le dialogue international et interculturel (KAICIID), et du Comité saoudien pour le dialogue interconfessionnel et interculturel (NCIRD), invite les dirigeants à œuvrer conjointement avec les communautés religieuses pour mener des campagnes de prévention et de vaccination efficaces, les leaders religieux ayant un pouvoir significatif de sensibiliser les communautés « auxquelles ils ont un accès inégalé ».

« Étant donné que la mise en œuvre réussie de la vaccination est cruciale pour contrôler la pandémie, le Sommet du G20 peut et doit impliquer les acteurs religieux dans les questions critiques liées au développement (y compris les tests), à la production et à la distribution équitable et éthique des vaccins. Les acteurs religieux devraient être délibérément inclus dans les mécanismes de responsabilisation », fait part le Forum, qui plaide aussi pour l'engagement des leaders religieux dans la lutte contre la désinformation.

« La diffusion d'informations (erronées) est une préoccupation importante en temps de Covid-19 et d'autres pandémies. Cela inclut une mauvaise interprétation des messages de santé, la propagation délibérée de rumeurs et le soutien à des pratiques contraires aux conseils de santé publique. Les chefs religieux ont les capacités et la responsabilité de soutenir la lutte contre la désinformation et de faire face aux aberrations dans les communautés diffusant de fausses informations, en particulier lorsqu'elles sont dangereuses », lit-on dans le rapport.

Par ailleurs, « la discrimination croissante à l'égard de certains groupes, notamment des communautés religieuses identifiées avec des pratiques perçues comme liées à la propagation de la maladie, est particulièrement préoccupante. Un leadership religieux positif peut s'attaquer à l'"infodémie" de manière significative, d’autant que la négligence ou les hostilités peuvent aggraver la situation ».

Le rôle des religieux est « parfois mais pas toujours reconnu ». « Les leçons pertinentes tirées des pandémies précédentes (VIH/SIDA, Ebola) ainsi que des premiers stades du Covid-19 sur l'importance des rôles du religieux plaident en faveur d'une prise en compte et d'une action proactives qui peuvent renforcer la réponse à la pandémie », lit-on dans le rapport.

Le dérèglement climatique, une urgence à ne plus ignorer

Le Forum interreligieux rappelle également l’urgence que représente le dérèglement climatique, réaffirme le besoin de respecter les Accords de Paris adoptés en décembre 2015 à l’occasion de la COP 21.

Il encourage également les dirigeants à mener des actions de lutte contre la déforestation et, en particulier, celle de la forêt tropicale. « Garder la forêt tropicale intacte et restaurer les terres dégradées est essentiel à la réduction sur le long terme des dommages causés par la déforestation. La destruction de ces forêts entraîne l'apparition de milliards de tonnes de dioxyde de carbone chaque année, exacerbe les effets du changement climatique, menace les moyens de subsistance des communautés indigènes, et contribue à la propagation des maladies infectieuses d'origine animale tels que le Covid-19 », alerte le Forum.

La protection des populations indigènes présentes sur ces terres doit aussi figurer parmi les priorités. Aussi, le Forum rappelle l’absolue nécessité de leur « préserver leurs terres ancestrales » et de veiller « à ce que la voix des indigènes soit prise en compte » dans l'élaboration des différentes stratégies politiques.

Oeuvrer pour sauvegarder la paix

Le rapport évoque aussi les injustices sociales qui minent les pays à travers le monde. Et ce sont notamment les discriminations et les discours de haine que le Forum souhaite voir contrecarrer. « La mauvaise utilisation des médias traditionnels et sociaux est un facteur énorme dans la diffusion des discours de haine. S'il est important de respecter les engagements en matière de liberté des médias tout en luttant contre les "contenus néfastes", les plateformes de médias traditionnels et sociaux doivent devenir des espaces plus créatifs qui favorisent la tolérance et la diversité plutôt que la haine et les conflits », affirme-on dans le rapport, qui invite là encore les dirigeants à travailler avec les cultes pour combattre la haine.

Le Forum interreligieux du G20 évoque également l’importance pour les décideurs politiques de soutenir les initiatives favorisant la paix comme celles résultant de la Déclaration sur la fraternité humaine signée en février 2019, ou encore d'œuvrer pour une politique migratoire plus favorable aux réfugiés et aux demandeurs d’asile. Sur ce point, les décideurs politiques sont invités à s’engager avec les organisations religieuses en vue de mener une politique migratoire plus humaine.

Enfin, « les membres du G20 devraient collaborer avec les communautés religieuses pour faire avancer un cessez-le-feu mondial recommandé par le Secrétaire général des Nations unies. Ils devraient poursuivre avec énergie des actions de rétablissement de la paix. Le G20, aux côtés d'autres organisations transnationales, doit reconnaître de manière plus délibérée le rôle des religions dans le travail de consolidation de la paix, et renforcer la coopération et la solidarité internationales en favorisant la participation des communautés de foi et des institutions religieuses dans les conflits régionaux et locaux ».

*Les membres du G20 sont l'Afrique du Sud, l'Allemagne, l'Arabie Saoudite, l'Argentine, l'Australie, le Brésil, le Canada, la Chine, la Corée du Sud, les Etats-Unis, la France, l'Inde, l'Indonésie, l'Italie, le Japon, le Mexique, le Royaume-Uni, la Russie, la Turquie et l'Union européenne.

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