Société

Procès de Nouredine Rachedi : les agresseurs jugés, le verdict attendu

L’extrême droite sur le grill

Rédigé par | Jeudi 2 Février 2012 à 00:00

Français et musulman, que cela ne plaise ou non. Après plus de trois ans d’attente, le procès de Nouredine Rachedi s’est enfin tenu mardi 31 janvier au tribunal correctionnel de Versailles (Yvelines). Malgré la violence de son agression, le parquet n’a requis à l’issue des plaidoiries que 18 mois de prison, dont 12 avec sursis contre les deux prévenus, qui se sont entêtés à nier les faits qui leur sont reprochés devant la cour. Le verdict est attendu le 14 février prochain. Retour sur le procès.



Les procès portant sur des agressions contre des musulmans en France sont bien trop rares pour ne pas être portés sur la place publique dès lors que la justice se saisit d’une affaire.

A l’instar de ses soutiens, Nouredine Rachedi, dont le procès contre ses deux agresseurs s’est tenu mardi 31 janvier, à Versailles, avait espéré que le tribunal ait compris la gravité de son dossier afin de débanaliser l’islamophobie.

Il n’en a pas été ainsi, malgré les preuves à charge qui se sont accumulées contre les accusés, qui ont comparu pour « violence en réunion à raison de l'appartenance religieuse ».

Des militants d’extrême droite dans le coup

Leurs profils se croisent sans pour autant se ressembler. Tandis que Romain Blandin, 24 ans, étudiant en histoire, ne revendique pas une véritable appartenance politique, Kevin Lamadieu, 22 ans, ne cache pas ses convictions « nationalistes » au public et sa proximité avec l’extrême droite.

Plombier de profession, il est encarté au Groupe Union Défense (GUD), une organisation étudiante d’extrême droite créée à l’université parisienne de Panthéon-Assas en 1968, qui a disparu de la sphère dans les années 2000 avant de réapparaître en 2009. Malgré sa jeunesse, Kevin a bien un lourd passé derrière lui, puisqu’il a été condamné plusieurs fois pour des faits graves de violence, y compris lorsqu’il était mineur.

Aucun alibi à faire valoir

Les deux comparses se connaissent mais affirment ne se fréquenter qu’occasionnellement. Une chose est sûre : ils étaient ensemble à Guyancourt (Yvelines), dans la nuit du 24 au 25 juillet 2008, date à laquelle M. Rachedi s’est fait lâchement lyncher en raison de son appartenance à l’islam.

Il ne faudra pas plus de deux semaines pour M. Rachedi pour identifier Kevin sur photo correspondant à la première description qu'il en avait donnée. Comme rapporte Le Monde, les policiers ont découvert, lors d’une perquisition à son domicile, toute la panoplie « du parfait néo-nazi » nostalgique du IIIe Reich, dont un portrait d'Hitler et des ouvrages fascistes.

Pour sa défense, Kevin bredouille qu'il n'est pas « raciste, ni xénophobe, ni même antisémite » mais qu’« il aime l'Histoire » et que, quoiqu'il en soit, il n'a jamais rencontré M. Rachedi. Même affirmation pour Romain, qui ne sera identifié que huit mois après l’agression, grâce, notamment, aux relevés téléphoniques de Kevin.

Six mois de prison ferme requis, une déception palpable

Leur entêtement à nier l’évidence a de quoi agacer la victime et la partie civile. D’autant que le parquet ne semble pas avoir été en mesure de prononcer un réquisitoire exemplaire. La présidente du tribunal Anne Demortière n’a requis que 18 mois de prison, dont 12 avec sursis contre les prévenus, assortie d’une obligation de soins pour Kevin.

A l’issue du procès, M. Rachedi se dit « satisfait » de la tenue de son procès, car son parcours judicaire a été « long et pénible ». Il espère tourner cette page de son histoire très bientôt.

Toutefois, la déception est aussi palpable car les peines requises par le parquet sont « très légères » au goût de M. Rachedi. Pourtant, la présidente de la cour « donnait l’impression d’être convaincue de la culpabilité » des prévenus et de les avoir chargés, nous déclare la victime. Elle avait d'ailleurs jugé que « leur appartenance politique constitue le mobile » de l’agression.

Liberté est donnée au tribunal de prononcer une peine plus lourde, mais M. Rachedi ne se fait pas d’illussion. « J’ai le sentiment que la parole d’un musulman vaut moins que celle des autres en France », indique-t-il. Le jugement est désormais attendu pour le 14 février.




Rédactrice en chef de Saphirnews En savoir plus sur cet auteur