Société

Lutte contre l’islamophobie : Karim Achoui sous les feux de la rampe

La LDJM officiellement lancée

Rédigé par | Mardi 17 Septembre 2013 à 03:46

La Ligue de défense judiciaire musulmane (LDJM) à l’offensive. A la manœuvre, l’ex-avocat au passé sulfureux Karim Achoui qui fait le buzz depuis des semaines avec cette initiative, inaugurée lundi 16 septembre à Paris. Mais que vaudra la LDJM sur le terrain ?



Karim Achoui, à la tête de la Ligue de défense judiciaire musulmane (LDJM) inaugurée le 16 septembre à Paris.
Le grand jour est arrivé pour Karim Achoui. L’ex-avocat, reconverti en défenseur des victimes de l’islamophobie, était très attendu sur le toit de la cité la mode, à Paris, pour la présentation de la Ligue de défense judiciaire musulmane (LDJM) dont il est le président. Cette structure, qui fait parler d’elle depuis plusieurs semaines dans les réseaux sociaux, est née pour faire de la lutte contre l’islamophobie en France son combat essentiel, n’en déplaise au ministre de l'Intérieur Manuel Valls, qui refuse d’employer ce terme.

Si cette association fait grand bruit, c’est aussi en raison de la personnalité de Karim Achoui, un ancien avocat du milieu réputé pour avoir défendu plusieurs figures du grand banditisme, dont Antonio Ferrara. Radié depuis 2011 à vie du barreau de Paris, c’est en tant que président de la LDJM – fondée avec son ami et financier Farid Belkacemi – qu’il revient sur le devant de la scène, redorant au passage une image qui le renvoie sans cesse à son passé tumultueux. Quelque 500 personnes se sont d’ailleurs déplacées au Moon Roof pour le voir.

Une ligue d’avocats contre l’islamophobie

A ce jour, près de 120 avocats et juristes ont rejoint l’association. L’ancien ministre et président du Conseil constitutionnel Roland Dumas en fait notamment partie, comme Jean-Marc Florand, présent à la soirée. L’avocat de Patrick Dils – innocenté pour le meurtre de deux enfants après 15 ans de prison – a jugé la création de la LDJM « utile et nécessaire » et qui, en bon « catholique pratiquant », est « à l'opposé d'une application idiote de la loi de séparation de l'Eglise et de l'Etat ». Comme Karim Achoui, son associé de longue date, il martèle son opposition à l’interdiction du voile intégral dans les lieux publics.

Pour Karim Achoui, interrogé par Saphirnews, la LDJM n’est pas un groupe de pression ni « un club de réflexion mais c'est un club de défense à vocation exclusivement judiciaire et offensive. Il ne s’agit pas de militer ». Ce faisant, il souhaite se démarquer du Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF), qui, depuis 10 ans, est sur le terrain et dont le service juridique, plus modeste mais bien encadré, est très sollicité.

La LDJM entend ainsi combler un quasi vide juridique indéniable pour la défense des musulmans, ravis globalement de l’initiative. « On est littéralement envahi de demandes de défense », nous a indiqué M. Achoui.

Une présence du CRIF qui refroidit

Une annonce a cependant agité la salle, lundi 16 septembre, et refroidi des esprits : la présence de Habib Meyer, député de la 8e circonscription des Français établis à l’étranger, présenté par Farid Belkacemi comme son « meilleur ami du CRIF », le Conseil représentatif des institutions juives de France. Face aux réactions offusquées d'une partie du public venu assister au lancement de la LDJM, il explique qu’il s’agit d’un signe que les juifs sont les bienvenus pour soutenir la LDJM, car « l'union fait la force »..., faisant (à l’insu de son plein gré) l’amalgame entre juifs et CRIF, organe de soutien à la politique d’Israël en France.

Le genre de (mauvaise) surprise qui peut affecter longtemps le public musulman et, de fait, l'image de la LDJM... Du moins potentiellement.* Car les applaudissements d'encouragement pour la LDJM ont été nombreux. Elle multiplie les annonces en vue de dépôts de plainte. Prochainement, c'est Charlie Hebdo qui est dans le viseur pour sa une titrée « Le Coran, c’est de la merde » en juillet. En outre, le service juridique est totalement gratuit, nous martèle M. Achoui : les avocats sont engagés à défendre les cas « à titre gracieux ».

Karim Achoui, au centre de l’actualité

La soirée d’inauguration de la LDJM s’est tenue la veille d’un procès très attendu à la cour d’assises, qui s’ouvre ce mardi 17 septembre : celui de six hommes comparaissant pour la tentative d’assassinat de l’ex-avocat en juin 2007. Un épisode de sa vie qu’il est d’ailleurs en train d’adapter sur grand écran à partir de son propre livre, L’Avocat à abattre paru en 2008.

S’il n’y a rien d’« opportuniste » dans la création de la LDJM, insiste Karim Achoui, l'inauguration de la Ligue, ce lundi, tombe à point nommé pour lui, qui s’offre ainsi un bain de notoriété de nature bien plus populaire. Car Karim Achoui a réussi, à lui seul, à faire le buzz autour de son initiative contre l'islamophobie par la grâce des réseaux sociaux. Sa page Facebook compte déjà plus de 15 000 fans. Son aura médiatique et son sens de la communication font le reste : les reportages et les plateaux télévisés consacrés à la LDJM et à son président se succèdent depuis la rentrée, occupant un large espace médiatique.

La création de la Ligue de défense judiciaire musulmane nourrit des espoirs que ses soutiens espèrent ne pas se voir transformer en déception.



Rédactrice en chef de Saphirnews En savoir plus sur cet auteur