Finance éthique

L’Afrique du Nord prête à l'assaut de la finance islamique

Rédigé par Maria Magassa-Konaté | Mercredi 26 Février 2014 à 06:55

L’engouement pour la finance islamique est de plus en plus prononcé dans les pays d’Afrique du Nord, note Standard and Poor’s (S&B) dans une étude publiée mardi 18 février. Après des années de désintérêt pour cette finance alternative, la Tunisie et l’Egypte tout comme le Maroc seraient prêts à l’intégrer dans leur système économique.



Avec un chiffre d’affaire mondial évalué à 1 400 milliards de dollars, la finance islamique a de belles perspectives devant elle. Et pour cause : elle est peu exploitée dans bon nombre de pays musulmans où elle gagnerait pourtant à se développer. En Afrique du Nord, il semblerait que l’idée de développer les produits bancaires conformes à la finance islamique soit aujourd’hui ancrée dans l'esprit des législateurs et des acteurs bancaires, constate Standard and Poor’s (S&P) dans une étude datée du 18 février. Sa synthèse, publiée par le site anglophone d’informations financières CPI Financial, a été reprise par plusieurs sites marocains comme Yabiladi.

« D’importants déficits courants et la baisse de sources de financement classiques poussent les gouvernements des pays touchés par le printemps arabe à examiner les possibilités offertes par la finance islamique », peut-on y lire. Autrefois jugée « exotique » par les acteurs bancaires, la « perception » de la finance islamique « est en train de changer et la sensibilisation du public augmente », indique Mohamed Damak, analyste à S&P, dans l’étude intitulée « La finance islamique pourrait faire une percée en Afrique du Nord ».

Un système financier encore sous-développée

« Nous avons surtout constaté ces avancées en Egypte, en Tunisie et au Maroc. Leurs gouvernements ont récemment pris des mesures pour la mise en œuvre de politiques visant à soutenir le développement de la finance islamique », note M. Damak, citant le projet tunisien « de lancement des sukuks (obligations) pour attirer une nouvelle classe d’investisseurs ; les nouvelles réglementations encadrant les sukuks en Egypte et l’adoption d’un projet de loi autour de la création de banques islamiques au Maroc ».

Pour l’agence de notation financière, ces avancées ne sont qu’un début. La finance islamique n’a pas encore « démontrée sa valeur ajoutée économique », dans ces pays, estime M. Damak. Elle « reste sous-développée mais les changements de réglementation ont jeté les bases pour sa croissance », juge l’analyste, selon qui que leur « succès dépendra de leur capacité à offrir des produits à un coût compétitif avec les activités bancaires classiques ».

Une finance au service de grands projets d’infrastructure

A terme, le développement d’une telle finance, trop longtemps délaissée, devrait offrir de réelles perspectives d'avenir pour les économies. Elle permettra ainsi de financer des projets d’infrastructure selon S&P, qui fait remarquer que « plusieurs projets dans les énergies renouvelables, les infrastructures de transport et de communication sont en cours ou devraient être lancés à l'avenir dans les pays d'Afrique du Nord ».

Pour l’heure, comme le démontre une étude publiée en octobre 2013, Marocains, Egyptiens et Tunisiens sont encore très peu nombreux (2 %) à opter pour des produits financiers islamiques, caractérisés notamment par l'interdiction de l'intérêt (riba). Avec la prise de conscience de leurs gouvernants, les habitants des pays d’Afrique du Nord qui, par conviction religieuse ou autres intérêts, rejettent la finance classique, peuvent espérer dans les années à venir trouver plus facilement cette alternative.