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Points de vue

Lutte contre l'islamophobie : qu'attendons-nous ?

Rédigé par Aïssa Terchi, Fethi Chouder, Myriam Zerkaoui et Nathalie Levallois | Mercredi 31 Décembre 2014 à 06:00

           


Lutte contre l'islamophobie : qu'attendons-nous ?
Ce texte est un cri d'alerte à toutes celles et ceux qui se revendiquent de la lutte contre les oppressions croisées sur cette nouvelle forme que prend le racisme, à savoir l'islamophobie. Le racisme est, dans notre société, l’un des principaux obstacles au rassemblement de tou-te-s les dominé-e-s et victimes du système injuste que nous combattons.

Le racisme anti-musulman, qui est statistiquement le plus massif dans le débat public, a fait basculer beaucoup d’intellectuels, y compris certaines personnes se réclamant pourtant des idéaux de la gauche, et a conduit à stigmatiser les musulmans dans des termes qui rappellent la façon dont étaient hier stigmatisés les Juifs.

Dans le rapport 2013 de la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH), le racisme, notent les rapporteurs, a subi un profond changement de paradigme dans les dernières années, avec le glissement d'un racisme biologique vers un racisme culturel. Le bilan dressé sur les violences racistes est accablant, les actes anti-musulmans ont progressé pour la troisième année consécutive, et la CNCDH a décidé d'adopter le terme islamophobie : elle est d'avis qu'il convient de nommer ce que l'on dénonce et souhaite combattre, car le racisme anti-musulman apparaît comme le cheval de Troie de toutes les discriminations.

S'engager sans réserve contre l'exclusion

Qu'attendons-nous, camarades, pour nous engager dans la lutte contre ces nouvelles formes de discrimination, d’exclusion et de violence qui se banalisent chaque jour, en particulier à travers les discours publics, médiatiques, politiques ? Est-il utile de rappeler tous ces discours qui, de Marine Le Pen à Manuel Valls, entendent soustraire de la communauté nationale des millions de gens qui vivent et travaillent dans notre pays – et sont, pour la plupart, de nationalité française ? Est-il utile de rappeler les humiliations et les violences qui frappent chaque jour les millions de personnes qui ont, en France, l’islam pour référence religieuse, quelles que soient par ailleurs leurs convictions personnelles ?

En décembre 2014, s'est tenue la Journée internationale contre l'islamophobie, à Saint Denis. Comme d'autres militants, nous étions de celles et ceux qui ont participé à cette journée. L'heure n'est plus aux divisions artificielles liées à l'utilisation de tel ou tel terme. Nous avons d’autres urgences que les débats sémantiques.

Dans toute l'Europe, les mouvements antiracistes se mobilisent pour combattre l'islamophobie, car la situation est grave. Les stigmatisations s'accroissent, que ce soit dans les discours et les pratiques de certains politiques UMP-FN, ou même à gauche, que ce soit sur les sites internet, les articles de presse ou les médias qui ne montrent qu'une image négative des citoyens de confession ou de culture musulmane.

Le combat contre le racisme pour fédérer le peuple

Désormais, tout peut être dit sur les musulmans. Les violences physiques et verbales sont en nette augmentation depuis 2009. L'islamophobie est devenue la nourrice de l'extrême droite, une des causes principales de sa résurgence. Le déchainement médiatique profite aux nazis, leurs thèses s'imposent de plus en plus dans le paysage politico-médiatique. Il est donc primordial de ne pas tomber dans le jeu de ceux qui veulent nous emmener sur le chemin des guerres de civilisations.

Pour fédérer le peuple, nos quartiers populaires, il nous faut être aux côtés de celles et ceux qui subissent chaque jour ces discriminations, et cette nouvelle forme de racisme qu'est l'islamophobie. Ne pas mener ce combat serait une erreur d'analyse de la réalité et de compréhension de l'enjeu de fédérer les nôtres, notre classe. Ceux qui veulent combattre le nouveau fascisme sans dénoncer l'islamophobie se trompent fortement : ils ressemblent un peu à ceux qui auraient voulu lutter contre le pétainisme ou le nazisme sans dénoncer l'antisémitisme.

Islamophobie et montée de l'extrême droite sont liées. Penser qu'il n'y a pas de lien est une mauvaise analyse de la période. Il ne faut pas perdre de vue que dès que l'extrême droite est au pouvoir, elle supprimera les libertés pour tous. Ceux qui croient que la montée de l'extrême droite ne vise que les étrangers, arabes et musulmans, se trompent car c'est toute la société qui est visée.

Le racisme systémique envers les citoyens de croyance, ou de culture musulmane, ne doit pas être pris à la légère. Il est, hélas, bien présent dans notre société et touche des personnes qui subissent déjà de plein fouet les politiques d'austérité et antisociales.

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Aïssa Terchi est conseiller municipal PG-FDG à Clichy (92). Fethi Chouder est adjoint (PG) au maire (PCF) d'Aubervilliers (93). Myriam Zerkaoui et Nathalie Levallois sont des militantes du Parti de gauche.





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