Arts & Scènes

IAM, les poètes du rap français, de retour au top

Clash contre Copé

Rédigé par Maria Magassa-Konaté | Jeudi 23 Mai 2013 à 06:00

Le nouvel album d’IAM est dans les bacs. C’est un carton. Il s’est classé directement en tête des charts dès le premier jour de sa sortie, le 22 avril. L'album intitulé « Arts Martiens » nous présente des guerriers du rap qui n’ont pas pris une ride. Jean-François Copé, accusé d'être de ceux qui stigmatisent les musulmans, en prend pour son grade. A travers lui, c'est tout un discours et une ambiance politiques à l'égard des musulmans et des immigrés que le groupe dénonce.



Six ans après Saison 5, le groupe IAM a sorti son sixième album intitulé Arts Martiens. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que cet opus a su séduire. Entré directement à la première place des charts français, l’album s’est vendu à près de 25 000 copies, dont 18 000 ventes physiques et 6 600 téléchargements lors de sa première semaine de commercialisation. A ce jour, il s'est vendu à plus de 50 000 disques.

Le groupe marseillais délivre 17 titres composés en seulement trois mois après l’abandon d’un important projet qu’ils avaient annoncé et qui était pourtant bien avancé. Leur idée d’album visant à reprendre des extraits musicaux du compositeur de film italien, Ennio Moriccone, n’a pu voir le jour en raison de droits d'auteur trop élevés. Mais avec Arts Martiens qui cartonne, le groupe à su se relever rapidement de leur déception.

IAM toujours très populaire

Mais pourquoi Arts Martiens ? « Il y a un côté extrêmement martial dans la manière dont ce disque a été travaillé, dans la manière de structurer certains morceaux, comme "Debout les braves". Dans le mot "martien", il y a aussi Marseille, qui fait référence au style de rap typique de la cité phocéenne. C'est un rap très écrit, axé sur l'émotion », explique Akhenaton dans une interview accordée au Figaro.

C’est effectivement un retour aux sources que nous propose DJ Kheops, Kephren, Akhenaton et Shurik'in dans ce nouvel opus. Leur fascination pour la Chine et le Japon reste visiblement intact comme on peut le constater sur un titre comme Benkei et Minamoto, du nom de deux samouraïs mythiques du folklore japonais, rythmé par des sonorités asiatiques. Par dessus tout, il célèbre à leur façon la belle amitié qui lie depuis toutes ces années les membres du groupe, fondé en 1989.

Sur le titre L’amour qu’on me donne, ce sont surtout les airs Groove-funkie qui font hocher de la tête. Après la fête est plus mélancolique et symbolise le temps passé de ces jeunes rappeurs devenu pères de famille. Mais avec Marvel qui fait référence à la maison d'édition américaine à l'origine de super-héros tels Spider-Man ou X-Men, les chanteurs dont l’âge moyen est de 46 ans prouvent qu’ils n’ont pas pris une ride. Comme ils le répètent dans le premier titre de l’album intitulé Spartiate Spirit, IAM est « toujours là ».

Le pain au chocolat de Copé dénoncé

Après 25 ans de carrière, le groupe a par ailleurs gardé intact son esprit critique. Même si IAM a désormais signé chez le label mythique du rap américain, Def Jam, il continue de commenter l'actualité française. Le titre Sombres manœuvres ne peuvent faire qu’écho aux règlements de compte qui se multiplient à Marseille, la ville d'origine du groupe dont le titre Notre dame veille dévoile les brèches. Quant au titre Habitude, il traite de la souffrance morale subie par les sans-abris.

Le groupe marseillais ne se prive pas non plus de tacler Jean-François Copé. Avec le titre Pain au chocolat, les propos tenus par l’actuel président de l’UMP, qui avait déclaré qu’il y a « des quartiers où les enfants ne peuvent pas manger leur pain au chocolat car c'est le ramadan », sont visés.

Cette phrase lâchée en octobre 2012 en pleine campagne électorale interne de l'UMP avait vite fait d’indigner les citoyens musulmans et ... IAM. « Nos ambitions, tant de bouteilles à la mer, amer. On devrait écrire quoi ? Des couplets maladroits pour terroriser le petit Jean-François », chante le groupe.

Plus que ces propos, les artistes dénoncent les discriminations ou encore la stigmatisation des musulmans. Cette « phrase reflète bien tout un état d’esprit qui règne dans le pays », a ainsi commenté Akhénaton sur le plateau du Petit Journal sur Canal+ le 14 mai. C’est faire une « caricature à partir de 300, 400, 500 individus de toute une population d’un million de personnes. Je trouve cela extrêmement grave », a ajouté le rappeur lui-même musulman. Shurik'n a pour sa part regretté un « genre de dérapage contrôlée et tolérée qui revient un peu trop souvent ». IAM compte bien dénoncer ce climat, à sa manière, en musique.

Le groupe prévoit de se produire dans plusieurs festivals cet été et de poursuivre une tournée dans toute la France dès le mois d’octobre. Les titres du nouvel album feront leur effet auprès de leur public.