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Monde

Zoubir Benhamouche : « L’Algérie doit se doter d’institutions indépendantes »

Cinquantenaire de l'indépendance de l'Algérie

Rédigé par Nadia Henni-Moulaï | Samedi 7 Juillet 2012 à 20:29

           

Zoubir Benhamouche*, économiste, propose une analyse acerbe de la situation algérienne. Dans son viseur, les institutions, symbole d’un État en panne.



Place Emir Abdelkader, à Alger.
Place Emir Abdelkader, à Alger.

Salamnews : Assiste-t-on à un rejet de la jeunesse s’agissant de la célébration du cinquantenaire ?

Zoubir Benhamouche : 70 % des Algériens ont moins de 35 ans et sont nés dans une Algérie indépendante. Cette population, qui n’a pas connu la colonisation, vit sous le même régime, hérité de l’indépendance, et lui attribue cet échec relatif à bâtir une société de progrès. La crise politique et sociale que vit l’Algérie depuis les années 1990 est une crise de légitimité du pouvoir actuel.
Il y a deux sociétés en Algérie : celle du quotidien de 95 % de la population et celle qui est composée du régime et de ses affidés. Ces deux sociétés s’ignorent presque. L’une vit dans un climat économique et social délétère, et l’autre profite de la rente.

Zoubir Benhamouche est économiste.
Zoubir Benhamouche est économiste.

Pourquoi l’Algérie peine-t-elle à décoller économiquement ?

Z. B. : L’Algérie n’a jamais disposé d’une telle aisance financière ; or le contexte social n’a jamais été aussi explosif. La faute à un État dénué de toute vision. Les institutions sont sous l’instrument de groupes d’intérêts, l’unique but étant pour elles d’asseoir leur domination sur la société, d’avoir le contrôle et la jouissance de la rente que procurent les hydrocarbures, qui représentent 98 % des exportations de l’Algérie.

Ces dernières années, il y a toutefois eu des avancées ?

Z. B. : Les projets, financés par la rente, auraient dû avoir un effet d’entraînement important sur l’économie. Des réformes structurelles étaient nécessaires, pour créer les conditions favorables du développement du secteur privé et sortir de l’économie de rente. Rien de cela n’a été fait. Pire, on a tout importé : matières premières, biens intermédiaires et même main-d’œuvre. On a atteint le paroxysme du non-sens économique : un pays abondant en main-d’œuvre non qualifiée a importé de la main-d’œuvre venue de Chine !
L’échec de ceux qui ont pris le pouvoir à l’indépendance et de ceux qui leur ont succédé, c’est de ne pas avoir été à même de bâtir des institutions indépendantes et démocratiques.


* Zoubir Benhamouche est auteur de L’Algérie : l’impasse (Publisud, 2011).






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