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Points de vue

Vincent Feroldi : Inventons une nouvelle manière de faire société ensemble

#1AnAprès

Rédigé par Vincent Feroldi | Mardi 12 Janvier 2016 à 11:55

           

Un an après les premiers attentats qui ont bouleversé la société française, que faut-il retenir de ces funestes événements et de leurs conséquences ? Quels messages promouvoir et que préconiser pour construire une société meilleure ? Le point sur Saphirnews avec le P. Vincent Feroldi, directeur du Service national pour les relations avec les musulmans (SNRM) de la Conférence des évêques de France.



Vincent Feroldi est le directeur du Service national pour les relations avec les musulmans (SNRM) de la Conférence des évêques de France.
Vincent Feroldi est le directeur du Service national pour les relations avec les musulmans (SNRM) de la Conférence des évêques de France.
Si, en France, l’année 2015 se pense aujourd’hui autour de deux moments dramatiques : les 7-9 janvier et le 13 novembre, elle ne doit en aucune façon s’y limiter car les douze mois de cette funeste année ont été traversés par une litanie sans fin de drames, de souffrances, d’horreurs, de terreurs, non seulement sur le territoire français mais aussi dans le monde entier.

Attentats, exodes, migrations, patrimoine culturel détruit, assassinats, décapitations, enlèvements, viols, persécutions, génocides, antisémitisme, islamophobie, déchéance… sont devenus les mots du quotidien, de notre quotidien, dans ce village qu’est la terre, notre Terre.

Nous ne pouvons donc parler de ces attentats et du terrorisme jihadiste sans les lier, les incorporer, les inclure dans une profonde méditation et une vive réflexion sur ce que vivent aujourd’hui nos sociétés, et au lendemain de la mort du petit Aylan et de la COP 21, autres grands événements de 2015. Et sans oublier que les premières victimes des attentats sont des personnes de confession musulmane.

Des signes d’espérance

Tous ces événements ne sont que quelques-unes des facettes d’un monde en plein bouleversement et qui se voit appelé à une nouvelle manière de vivre ensemble, à un nouveau paradigme. À l’évocation de ces conflits, il faudrait en effet juxtaposer les narrations des bouleversements économiques, des révolutions en matière de recherche médicale et des innombrables innovations technologiques.

Heureusement, au cœur de ces ténèbres surgissent des étincelles de lumière et des signes d’espérance.

Il y eut la marche du 11 janvier, les thés de la fraternité dans les mosquées, les rencontres interreligieuses dans des paroisses ou interconvictionnelles dans des communes. De nombreuses prises de paroles, des séminaires, des débats ont été organisées et ont fait émerger un réel désir du vivre-ensemble, tout en n’écartant pas la nécessité d’analyser les événements présents. Il est en effet essentiel de percevoir nos manques, nos erreurs, nos bonnes initiatives, et nos décisions heureuses.

En France, tant du côté juif, chrétien que musulman, et sans nier les difficultés présentes et les peurs existantes, les responsables religieux et les plus hautes autorités spirituelles ont affirmé l’importance d’un respect mutuel, d’une fraternité partagée et d’un engagement commun au service de l’homme, de tout l’homme, dans une société où la laïcité manifeste bien dans ses textes fondateurs qu’elle prend en compte la liberté de conscience et la liberté de croire, et donc la dimension spirituelle de l’être humain.

Le vivre-ensemble s’enrichit de la diversité culturelle et cultuelle

Permettez-moi trois adresses : à tous, aux musulmans et aux chrétiens.

Nous tous vivons en France. Nous nous enracinons dans une société qui s’est construite au fil de l’Histoire, non sans mal, parfois par des luttes sanglantes, mais, au final, en nous retrouvant sur des valeurs qui font le ciment de notre République.

Si une même citoyenneté nous réunit, elle se retrouve autour des trois valeurs que sont la liberté, l’égalité et la fraternité. Elle doit également prendre en compte aujourd’hui la solidarité qui se décline à l’échelle non seulement européenne mais aussi intercontinentale. Elle doit enfin se réjouir de ce que le « vivre ensemble en France » s’enrichisse de la diversité culturelle et cultuelle, prenant ainsi en compte la personne humaine dans toutes ses dimensions.

Amis musulmans, vous êtes porteur d’une foi en Dieu s’inscrivant dans la révélation coranique. Partagez-nous les trésors de votre spiritualité. Vous êtes divers et nous savons que, si certaines dérives existent et amènent certains à mépriser, voire à tuer ceux qui sont différents d’eux, la très grande majorité d’entre vous êtes des croyants de la miséricorde et de l’hospitalité, de l’adoration et de l’aumône, désireux de construire, avec d’autres, un monde où les injustices pourront être combattues et la Nature donnée par Dieu préservée. Soyez des citoyens croyants heureux !

Amis chrétiens, ne nous replions par sur nous-mêmes ! Allons à la rencontre des croyants d’autres traditions et de nos contemporains humanistes, sans peur, ni aprioris ! Il y a tant de défis à relever avec tous ! Le partage de nos convictions doit nous permettre de trouver, ensemble, les meilleures réponses pour l’aujourd’hui et pour la croissance d’une vie humaine épanouie.

Remettre l’homme au centre de nos préoccupations

Il y a urgence à remettre l’homme au centre de nos préoccupations et à valoriser tout ce qui est rencontre, relation, débat, réflexions, échanges et innovation. Foi et raison vont de pair. Jouons de cette partition !

Arrêtons de stigmatiser l’autre ! Ne cherchons pas à amplifier le communautarisme ! Qu’il est bon de vivre ensemble quand nous valorisons la diversité cultuelle et culturelle !

Inventons une nouvelle manière de faire société ensemble où ce qui sera premier n’est pas ce qui nous distingue de l’autre mais ce qui nous permet de vivre avec l’autre !




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