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Monde

En Europe, l’extrême droite en campagne contre l’islam

Les musulmans sommés de réagir

Rédigé par | Vendredi 29 Mai 2009 à 15:00

           

En pleine campagne pour les élections européennes, les partis d’extrême droite refont parler d’eux. Leur combat prioritaire : l’« islamisation » des sociétés européennes contre laquelle chacun s’érige en porte-drapeau. L’aggravation de la crise économique et la montée brusque du chômage en Europe stimulent davantage ces groupes. Face à eux, les musulmans et les minorités semblent rester silencieux. Jusqu’à quand ? Petit tour de l'Europe des extrêmes.



En Europe, l’extrême droite en campagne contre l’islam
Dernière semaine avant les élections européennes qui se tiendront du 4 au 7 juin prochain dans les 27 États membres de l'Union européenne (UE). Un scrutin crucial, puisqu’il permet d’asseoir, tous les cinq ans, une certaine légitimité démocratique de l’institution.

Problème : ces élections ne semblent guère intéresser, comme en témoigne le taux moyen des abstentions aux dernières européennes : 45,5 % en 2004. Cette fois, il pourrait bien atteindre un record. En France, le taux de participation pourrait frôler les 35 % selon un sondage de l’institut IPSOS rendu public ce mardi 26 mai.

Geert Wilders, auteur du brûlot anti-islam « Fitna »
Geert Wilders, auteur du brûlot anti-islam « Fitna »

L’abstention en faveur de l’extrême droite

Signe d’un désintérêt criant pour l’Europe, l’abstention s’ajoutera, sans aucun doute, au vote sanction, l’arme des électeurs pour critiquer l’action de leur gouvernement respectif. Ainsi, en Grande-Bretagne, le scandale des notes de frais, dont les médias en font l’écho en boucle, a (presque) totalement éclipsé la campagne pour les européennes.

Outre-Rhin, les partis politiques allemands préfèrent se préparer aux prochaines élections législatives de septembre prochain. Plus généralement, à l’Ouest comme à l’Est, les électeurs voteront, une fois de plus, en fonction de leurs préoccupations nationales, à savoir la crise et l’emploi.

Vote sanction, abstention, crise, chômage, scandales… à qui profitent-ils ? Un constat : les partis de droite et d’extrême droite ont le vent en poupe en Europe, à commencer par le PVV (Parti de la liberté), de Geert Wilders, qui s’annonce comme le grand favori des élections. Considéré comme le successeur de Pim Fortuyn, leader de l’extrémisme hollandais assassiné en 2003 par un écologiste, M. Wilders fait campagne, comme à son habitude, contre « l’islamisation de la société » néerlandaise et, in extenso, européenne.

Conséquence : si des élections avaient eu lieu aujourd’hui, M. Wilders aurait été élu Premier ministre des Pays-Bas. De quoi « droitiser » certains discours d’hommes politiques, de droite comme de gauche.

Les Pays-Bas, figure de proue de la lutte contre l’islam

Comme le PVV, d’autres partis surfent sur cette vague dans les quatre coins de l’Europe. Le FPO, Parti libéral d’Autriche, proche des néonazis, est crédité de 19 % d’intentions de votes selon divers sondages, soit trois fois plus qu’aux dernières élections européennes de 2004.

En France, la percée du mythique Front national ou de Libertas (de Philippe de Villiers) reste à déterminer. En revanche, en Grande-Bretagne, des candidats de l’extrême droite BNP (British National Party) risquent bien de se faire élire au Parlement européen. Connu pour ses positions xénophobes et islamophobes, il fait aussi campagne « contre l’Europe » que ses membres rendent responsables de l’aggravation de la crise que traverse leur pays.

C’est tout naturellement que ces groupes, dénotés comme eurosceptiques, militent contre l’adhésion de la Turquie pour des raisons « culturelles et religieuses ». À ce jour, son entrée ne fait pas l’objet d’un oui, franc et massif, par une majorité des pays européens, à commencer par la France, l’Autriche et tout récemment l’Allemagne, qui s’est rangée du côté français pour un « partenariat privilégié ». Les probables élus extrémistes pourraient bien faire pencher la balance en la défaveur des Turcs, qui ont engagé des négociations avec l'UE depuis octobre 2005.

Sajjad Karim, député britannique musulman
Sajjad Karim, député britannique musulman

Contre-offensive civique des musulmans européens ?

Les députés d’extrême droite n’ont, à ce jour, pas de groupe identifié au Parlement européen. Un groupe pourrait bien voir le jour à l’issue des élections si ces parlementaires s’avéraient être nombreux. Mais rien n’est encore joué.

Le Conseil des musulmans de Grande-Bretagne (MCB) a d’ores et déjà appelé les électeurs musulmans à voter pour freiner l’influence grandissante du BNP. Depuis quelque temps, des imams et des représentants de la communauté musulmane poussent, notamment lors de la prière du vendredi, les votants à s’inscrire sur les listes et à aller voter le 4 juin. « Lorsqu’ils seront élus, ils rejoindront les islamophobes de l’Europe continentale pour attaquer les musulmans et les autres minorités », affirme le MCB par communiqué de presse, ajoutant que « le vote est un devoir civique et islamique. Nous devons voter (…) pour les personnes qui cherchent le bien commun pour tous les Britanniques ».

Aucun autre appel de la sorte ne s’est fait entendre ailleurs, bien qu'il y ait 14 millions de musulmans dans l'UE, dont 2 millions au Royaume-Uni. Il faut dire que leur niveau d'engagement civique dépend aussi du contexte dans lequel ils vivent. Reste que la sous-représentativité des musulmans et des minorités reste flagrante au sein des institutions européennes.

Parmi les seuls à y avoir accéder, Sajjad Karim, actuel député britannique au Parlement européen depuis 2004. Il est aujourd’hui tête de liste du Parti conservateur au nord-ouest de l’Angleterre. « Il est important que toute la diversité de l’Europe soit correctement représentée à l’échelle européenne. (…) L’UE est composée de minorités dans la mesure où il n’y a pas de culture majoritaire. Une faible participation signifiera que le Parlement agira comme une force négative qui empêchera l'UE de servir au mieux les intérêts de notre population », a-t-il affirmé sur Islam Online le 14 mai dernier.
Il n'est jamais trop tard pour réagir...



Rédactrice en chef de Saphirnews En savoir plus sur cet auteur


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