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Politique

Après la Légion d'honneur, le CFCM de Moussaoui toujours en quête de légitimité

Rédigé par | Samedi 11 Février 2012 à 13:28

           

Mohammed Moussaoui a été décoré de la Légion d'honneur, jeudi 9 février, devant un parterre de personnalités religieuses et politiques. L'hommage appuyé du chef de l'Etat au président du Conseil français du culte musulman contraste avec l'image déplorable qu'a une grande partie des musulmans de France à l'égard de l'institution.



Nicolas Sarkozy, entouré de Mohammed Moussaoui (à g.) et le cardinal André Vingt-Trois, après la remise de la Légion d'honneur © Pierre Verdy/AFP
Nicolas Sarkozy, entouré de Mohammed Moussaoui (à g.) et le cardinal André Vingt-Trois, après la remise de la Légion d'honneur © Pierre Verdy/AFP
Dans l'ambiance feutrée des salons de l'Elysée, Mohammed Moussaoui, président du Conseil français du culte musulman (CFCM), s’est vu remettre, jeudi 9 février, les insignes de chevalier de la Légion d'honneur par le président de la République. L’occasion pour Nicolas Sarkozy d’évoquer le parcours de ce mathématicien, présenté comme un « homme de paix, de concorde et de rassemblement ».

Un représentant d'un « islam de France ancré dans la société, respectueux de nos usages et de nos lois, respecté par tous les Français », qui a su « conjuguer cet amour du savoir avec une foi profonde, à l’image de cette longue tradition d’intellectuels musulmans, à l’image d’Averroès, qui étaient à la fois de grands scientifiques et de grands théologiens », a déclaré le président. Ce dernier a, par ailleurs, loué les « qualités humaines et intellectuelles » ainsi que « l’autorité morale » de M. Moussaoui. Un hommage très flatteur pour lui, qui n'a pas manqué d'être apprécié par l'assemblée.

Dans la même soirée, le cardinal André Vingt-Trois a été promu au rang d’officier de la Légion d’honneur. L’archevêque de Paris et président de la Conférence des évêques de France s’est vu qualifier de « guide spirituel à hauteur de l'Eglise de France ». « La laïcité est une force pour la République et une protection pour les religions et pour les croyants », a déclaré M. Sarkozy, qui a tout de même rappelé au passage les « vieilles racines chrétiennes » du pays. « La laïcité permet que des femmes et des hommes de convictions différentes de vivre ensemble de façon apaisée », a-t-il ajouté.

Cardinal André Vingt-Trois et Mohammed Moussaoui sont tous deux parmi les cofondateurs de la Conférence pour les représentants des cultes en France, créée il y a un peu plus d'un an et qui rassemble également des responsables du culte orthodoxe, juif et bouddhiste.

La polémique sur les civilisations oubliée le temps d’une soirée

Une dizaine de représentants des cultes catholique et musulman étaient présents, parmi lesquels Anouar Kbibech, président du Rassemblement des musulmans de France (RMF), Haydar Demiryurek, vice-président du CFCM (membre du CCMTF, Turcs), Khalil Merroun, recteur de la Grande Mosquée d’Evry-Courcouronnes, Driss Ayachour, vice-président du CRCM Alsace, ou encore Christophe Roucou, responsable du Service national pour les relations avec l'islam (SRI) de l’Eglise catholique.

Aux côtés de Valérie Pécresse, porte-parole du gouvernement, Claude Guéant n’a pas raté cet événement. Un échange avec M. Moussaoui était fort attendu à l’heure de la controverse entourant les propos du ministre de l’Intérieur, chargé des Cultes, sur les civilisations. Il n’en fut rien. M. Moussaoui, qui avait déclaré plus tôt dans la journée que la polémique était « close », s’est contenté d’être « très honoré » de la distinction qu’il lui a été faite comme l'a été auparavant Abderrahmane Dahmane.

Décoré en 2010 de la Légion d'honneur, l'ex-conseiller de M. Sarkozy en charge de la diversité est, depuis mars 2011, déclaré persona non grata depuis qu'il a sévèrement critiqué le débat sur la laïcité de l'UMP.

Alors que le CFCM pourrait bien user de son statut pour dénoncer avec force la montée de l’islamophobie en France, il n’en est rien. L’attitude (trop) consensuelle de M. Moussaoui se transforme en une preuve d’indulgence pour les uns, un renoncement pour les autres, face à un gouvernement dont le président n’est autre que celui qui a permis la création du CFCM.

De quoi mettre encore plus de distance entre l’institution et les musulmans, qui pointent régulièrement du doigt sa légitimité. Le CFCM a encore bien du chemin à faire pour obtenir son indépendance totale et se faire pleinement accepter des musulmans...




Rédactrice en chef de Saphirnews En savoir plus sur cet auteur



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