Société

Une femme en niqab éjectée de l’Opéra Bastille : la fermeture d’esprit saluée

Rédigé par | Lundi 20 Octobre 2014 à 17:05



La Traviata de Verdi, à l'Opéra national de Paris (Bastille). © Elena Bauer/OnP
Après la crise d’hystérie de Nadine Morano à la vue d’une femme en niqab, les polémiques autour du voile intégral repartent de plus belle avec, cette fois au centre, l’Opéra Bastille.

L’incident s’est déroulé le 3 octobre mais n’a été rendu public que le week-end du 18 octobre. Une spectatrice portant le voile intégral a été priée de quitter l’établissement parisien, en pleine représentation de La Traviata de Verdi, sur demande de la direction. Le spectacle venait de commencer lorsque cette femme, assise au premier rang avec son mari, juste derrière le chef d’orchestre, a été repérée par les écrans de contrôle, ainsi que par des choristes qui ont fait savoir en coulisses qu’ils ne chanteraient pas tant qu’une « solution » n’était pas trouvée : le dévoilement ou la porte.

« Ce n'est jamais très agréable de demander à quelqu'un de sortir d'une salle de spectacle, où en principe on parle d'ouverture et de compréhension. Mais là, il y avait une méconnaissance de la loi, et soit cette dame la respectait, soit elle sortait », a fait savoir le directeur adjoint, Jean-Philippe Thiellay à l'AFP, confirmant ainsi une information de Metronews.

Touristes ou non, une loi à respecter

En payant dûment leurs places, le couple de touristes en provenance du Golfe avait été autorisé à assister à la représentation mais la spectatrice est entrée « sans que personne ne la remarque, je ne sais pas comment », explique encore Jean-Philippe Thiellay. Pour ne pas accuser une perte de plusieurs dizaines de milliers d'euros, la direction s’est pliée à la doléance des artistes en s’appuyant sur la loi de 2011 qui interdit de se couvrir le visage dans l'espace public. Elle a profité de l’entracte pour parler aux concernés, qui ont payé leurs tickets d'entrée 231 euros chacun. Sans incident, ils ont quitté la salle et n'ont pas demandé à être remboursés selon l'Opéra.

En ce sens, l'établissement a scrupuleusement appliqué la circulaire d’application de l'interdiction du niqab émise en mars 2011. Celle-ci recommande aux agents du service public de rappeler à la loi toute personne au visage dissimulé et de l'inviter à se dévoiler ou à quitter les lieux. Toutefois, « la loi ne confère en aucun cas à un agent le pouvoir de contraindre une personne à se découvrir ou à sortir. L'exercice d'une telle contrainte constituerait une voie de fait et exposerait son auteur à des poursuites pénales. (...) En face d'un refus d'obtempérer, l'agent ou son chef de service doit faire appel aux forces de la police » pour constater l'infraction.

Une image toujours moins aimable de la France

Le ministère de la Culture, aujourd'hui dirigé par Fleur Pellerin, a décidé de rédiger une note afin de rappeler la consigne à suivre dans les théâtres, les musées et autres établissements culturels publics, qui ne devront désormais pas manquer d'être plus vigilants à l’entrée, tout en faisant preuve d'une « stricte politesse ».

Les riches investisseurs du Golfe, que la France cherche à séduire en ces temps de crise pour booster le tourisme et aider à la préservation du patrimoine historico-culturel, sauront apprécier le message envoyé par cet incident. Avec le tourisme pour compétence, le ministère des Affaires étrangères, invité à rendre « aimable » le concept de laïcité à l'étranger avec le concours de l'Observatoire de la laïcité pour ne pas assombrir l'image de la France, n'a pas réagi à ce jour. Si la loi, bien ou mal fondée, reste loi, les musulmans saluent la pleine fermeture d’esprit dont ont fait preuve les artistes de l'Opéra Bastille à l'origine de la mise à la porte d'une de leurs spectatrices de qui aucun trouble à l'ordre public n'a été constaté. Leur rejet idéologique du voile intégral a pris le pas sur la compréhension des différences culturelles.



Rédactrice en chef de Saphirnews En savoir plus sur cet auteur